Selon les dernières statistiques, il existe quelque 5340 artisans dans la wilaya de Tizi Ouzou. Une partie de ces derniers ont bénéficié des aides du Fonds national de promotion des activités artisanales. Les portes ouvertes organisées par la direction des Petites et moyennes entreprises et des métiers de l'artisanat de la wilaya de Tizi Ouzou, ont révélé l'existence d'un immense potentiel d'une formidable diversité. Cette semaine, qui a réuni les différents artisans de la région et les organismes d'Etat gérant ce créneau, a mis en évidence de grandes capacités de développement économique local. Les visiteurs pouvaient découvrir, parmi les stands, les différents métiers artisanaux qui reflètent la richesse du patrimoine traditionnel et les multiples mécanismes et dispositifs d'aide à la création d'une vraie dynamique économique pour le secteur. La traditionnelle bijouterie d'argent kabyle occupe une grande partie des étalages. L'Avzim traditionnel trônait sur les différentes créations de ciseleurs par son histoire étroitement liée avec celle de ces montagnes et ces femmes qui le portaient jadis. La robe kabyle des différentes localités laissait, de son côté, briller ses éclats de couleurs vives. Il s'y distinguait la robe kabyle des Ouadhias avec ses teintes rougeâtres et jaunâtres et celle de Azzaz avec sa couleur dorée et ses carreaux. Un peu plus loin, les artisans tailleurs de pierre de la région de Azzazga, ont reconstruit ce paysage pierreux des antiques villages kabyles. La feldspath est leur matière première. Cette pierre abondante dans cette région ainsi que dans la région de Makouda, est facilement malléable. Non stratifiée, elle s'est imposée comme matériau de construction climatisant. La poterie de Maàtkas resplendissante de formes cubiques et de couleur argileuse. A l'autre angle, c'est la pâte faite de blé dur dans la région de Draà El Mizan, qui dégage ses senteurs appétissantes. Mais, hélas, dans ce décor harmonieux mariant l'authenticité et la mélancolie d'un passé irréversiblement révolu avec un futur fait de projections de développement prometteuses, un grand couac se laisse apercevoir. Ce potentiel artisanal peut constituer un véritable créneau d'investissement s'il est pris en considération. L'interdépendance des différents créneaux rend le développement ardu en l'absence d'une stratégie à même de réaliser l'harmonie entre ces différents secteurs. Ainsi, ces journées portes ouvertes, même si elles ouvrent des perspectives et des projections dans l'avenir pour les artisans et les dispositifs de l'Etat présent, il n'en demeure pas moins que l'absence d'agences locales des banques algériennes freine cette dynamique. L'ensemble des jeunes rencontrés n'ont cessé de dénoncer les entraves des banquiers de Tizi Ouzou. Des discussions, il s'avérait que la durée trop longue de la phase de traitement des dossiers par les banques est la principale cause des découragements des jeunes chômeurs. Les artisans et les dispositifs de l'Etat Lors de cette rencontre à la frontière entre l'économique et le culturel, une rudimentaire connaissance en matière de développement local permet aux visiteurs de constater bien hélas, que le secteur du tourisme est absent. Le comble est que la Direction de ce secteur, dont l'avenir est étroitement lié avec les métiers de l'artisanat, a son siège à la Maison de l'artisanat qui accueille ces portes ouvertes. Pourtant, à l'exemple des pays voisins, le secteur de l'artisanat et toutes les spécificités culturelles, en général, sont indéniablement des facteurs primordiaux dans l'activité touristique. Toutes les infrastructures touristiques constituées de complexes hôteliers, de plages, de villages authentiques foisonnent d'artisans et de boutiques relevant de cette petite industrie. Il est indéniable que de l'importance donnée à ce créneau, découle le développement du tourisme. A l'évidence, les stratégies de développement mettent l'action, à l'inverse, sur le fait que les métiers de l'artisanat dépendent eux, également du développement du secteur du tourisme. Les mécanismes mis par l'Etat pour le développement d'une petite et moyenne entreprise pouvant englober les métiers de l'artisanat sont très nombreux. Les initiatives politiques pour la création d'une dynamique de développement local liée à ce secteur ne manquent pas. Sous d'autres cieux, ces mécanismes sont la meilleure stratégie de création d'une industrie légère. L'exemple de la Grameen Bank, du milliardaire Bangladeshi, Mohamed Yunus, prix Nobel, en est la meilleure preuve. L'Algérie, faisant partie des pays du Sud, n'a rien à envier en la matière aux pays du Nord. Depuis les années 2000, la microfinance jouit d'un grand appui des pouvoirs publics. L'intérêt de l'Etat algérien se manifeste par les cadres juridiques et l'encadrement législatif mais, bien plus, par les importants moyens de financement et de garanties mobilisés à cet effet. En 2004, en application de l'article du décret présidentiel du 22 janvier 2004 relatif au dispositif du microcrédit, il a été créé un fonds de garantie qui enlève toutes les entraves financières et l'hypothèque de biens familiaux. Ces moyens d'encadrement sont constitués par de nombreuses agences. Celles-ci ont la mission de mettre les moyens financiers et de donner des orientations appropriées aux jeunes intéressés par ce type d'investissement. Les métiers de l'artisanat sont, de ce fait, étroitement concernés mais, néanmoins, en dépit des efforts fournis par ces mécanismes comme l'Angem (Agence nationale de gestion du microcrédit) et ses antennes régionales, les jeunes demeurent affreusement entravés par la lourdeur du système bancaire. La gestion bureaucratique des affaires économiques et financières semble être la tare du personnel, apparemment en manque de formation pour assurer un service bancaire constamment lié à l'évolution de la finance internationale. Les jeunes artisans mal informés A ces entraves, outre que les ministères de l'Emploi et de la Solidarité tentent de dépasser par de nouveaux mécanismes, s'ajoute le manque d'information et/ou de quête d'informations. En effet, la majorité des jeunes interpellés sur la question, n'ont pas connaissance des multiples dispositifs mis à leur service par l'Etat. Présentés dans les foires et expositions, ces mécanismes semblent être découverts pour la première fois. Un jeune tailleur de pierre affirmera, dans ce contexte, que n'étaient-ce les mises en garde de la Direction de la santé, il ne connaîtrait jamais les dangers que représente ce métier. Le mécanisme de l'Anem (Agence nationale de l'emploi et des métiers), pourtant ayant à charge de délivrer des certificats de qualification aux artisans, n'est pas connu. Ainsi, et bien que les organismes de l'Etat sont en mesure d'assurer leur rôle, le problème de la communication reste le plus important obstacle qui sépare des jeunes chômeurs et artisans. Le manque d'information est cependant engendré par les méthodes d'affichage qui se limitent souvent aux sièges des mairies et de ces propres organismes. Les jeunes préfèrent la communication directe. Le réflexe ancré par la tradition orale de la région y est pour beaucoup. Enfin, ces journées dédiées à l'activité manuelle la plus représentative de la personnalité et des spécificités culturelles de la région ne peuvent être que bénéfiques pour tous les acteurs appelés à intervenir dans le processus économique local. Elles auront aussi prouvé que l'interdépendance de tous les créneaux est une donne incontournable pour leur survie. De ces foires et expositions dont l'objectif est d'abord celui d'informer, une dynamique doit être insufflée afin que beaucoup de métiers en voie de disparition, puissent être sauvés.