Le sommet ASO Chlef-JS Kabylie s'est achevé en queue de poisson, jeudi, avec l'arrêt avant terme du match. Il semble que cette fois-ci les bornes soient largement dépassées et qu'il n'est plus possible d'imputer au seul énervement des supporters ou à l'importance de la rencontre les «incidents» qui ont émaillé la rencontre de jeudi entre deux grandes écoles du football algérien. Ces «incidents» récurrents en font dès lors un problème de société qu'il faut aborder en tant que tel pour lui trouver les solutions adéquates avant que la situation ne devienne incontrôlable quand les stades algériens ont de plus en plus tendance à se transformer en arènes de défoulement public. De fait, sur les 17 clubs de la D1, 13 d'entre eux ont eu à subir ou subissent toujours le huis clos. Le match Chlef-JSK, qui se jouait pour le compte de la 31e journée du championnat de division Une, a ainsi été interrompu suite aux jets de pierres lancées sur la pelouse du stade Boumezroug de Chlef. C'est en fait la première fois qu'un match de football est arrêté pour cause de violences dans un stade algérien. Une première qui illustre la déliquescence dans laquelle est plongé le sport numéro 1 en Algérie, alors qu'il ne se passe plus de journées «foot» où il n'y eut pas à déplorer quelques incidents qui dénaturent un jeu à onze qui, certes, avait connu des jours meilleurs. Les mesures prises jusqu'ici par les autorités du football (la Fédération (FAF) et la Ligue nationale (LNF) n'ont pas été, à l'évidence, dissuasives, puisque chaque week-end c'est le même scénario qui se reproduit entraînant des sanctions (notamment le huis clos infligé aux clubs fautifs) répétitives qui ne semblent pas avoir eu le résultat attendu. A contrario, le football algérien se clochardise chaque jour un peu plus. Mais là où cela devient problématique est le fait que la violence - presque «intégrée» comme partie prenante des rencontres sportives - gangrène de plus en plus les stades d'Algérie, singulièrement, les trois paliers du football de haut niveau (divisions I et II et l'Interrégions), qui ne sont guère épargnés. Ces championnats dits de «l'élite» souffrent le plus d'une violence, dans et autour du stade, devenue récurrente. Sans avoir été plus grave que bien d'autres scènes de «caillassage» de la pelouse d'un stade, la rencontre de Chlef était télévisée en direct et beaucoup de responsables du football qui regardaient le petit écran ont pu «apprécier» en direct le résultat de leur gestion et le nivellement par le bas d'une pratique footballistique. Ce qui explique mieux les dizaines d'exposés savants sur le pourquoi de la déchéance du football algérien et son recul dans la hiérarchie régionale, continentale et internationale. Un problème de société transféré dans les travées des stades? C'est certes une lecture plausible qu'il appartient cependant aux sociologues de prendre en charge et d'expliciter. Aussi, le huis clos a-t-il maintenant largement montré ses limites et il convient de passer à des sanctions plus drastiques, sinon radicales, comme l'exclusion de clubs dont les galeries perturbent le jeu, ou carrément l'arrêt du championnat pour une période donnée. Si l'on ne se trompe pas, il semblerait qu'une bonne moitié des stades des divisions I et II sont astreints actuellement au huis clos. Ce qui n'a pas pour autant calmé les galeries sportives puisque plusieurs d'entre elles sont récidivistes. De fait, à ce rythme il y a le risque que la saison 2008-2009 se termine avec des rencontres de football totalement privées de public. Ce qui serait réellement unique dans les annales du football mondial. Le fait que la violence dans les stades soit devenue une donne plus ou moins intégrée dans la pratique du football en dit long quant aux dérives qui imprègnent aujourd'hui le milieu sportif en Algérie. Les jeunes viennent se défouler dans le stade. C'est la norme tant que cela demeure dans les limites admissibles et ne porte pas atteinte aux biens et aux personnes. Cela n'est plus acceptable du moment où cela dépasse le contexte propre au sport. Ce qui semble être le cas sans que ces dérives n'aient été prises au sérieux, comme en attestent les saccages dont ont été victimes des stades, notamment le temple du 5-Juillet. En fait, ce qui aurait dû être l'exception est devenu au fil des années la règle sans que réellement les autorités sportives, les dirigeants des clubs, premiers concernés, n'y prennent garde pour y mettre le holà. Le fair-play n'a seulement plus de sens lorsque le stade se transforme en terrain de pugilat où tous les coups seraient permis. Les scènes de jeudi, des scènes de trop, interpellent plus que jamais les dirigeants sur le sport le plus populaire en Algérie pour qu'enfin ils prennent leurs responsabilités avant que ne survienne l'irréparable, d'autant que les stades algériens sont devenus infréquentables. Cela ne peut plus durer. Il faut agir!