L'Algérie célébrera vendredi le 40e anniversaire de son indépendance. L'événement grandiose est à la mesure des festivités prévues pour l'occasion. L'Algérie officielle va assurément insister, en cette date historique, sur les sacrifices consentis par toute une génération pour libérer le pays du colonialisme français. On nous parlera du 1er Novembre 1954, du 20 Août 55, du 11 Décembre 61, des accords d'Evian et de l'indépendance du 5 Juillet 1962. On survolera, le temps d'une journée, ces étapes qui ont jalonné le combat victorieux du peuple algérien. Les faits appartiennent à l'Histoire. Et les hommes en Algérie se montrent très avares quand il s'agit de raconter l'histoire du pays. Cela la génération post-indépendance en sait quelque chose. En effet, on lui a caché bien des événements. «Ce mutisme» est développé à travers les médias lourds dans les discours officiels. Mais aussi dans les programmes scolaires. Un officiel algérien avait déclaré dans un entretien accordé à une télévision arabe il y a quelques mois qu'«il est regrettable de constater qu'à notre époque l'hymne national n'arrive pas à arracher une larme à nos jeunes». La déclaration contient peut-être une part de vérité, mais cette vérité ne peut être, selon des observateurs avérés, que le symptôme des crises frénétiques qui tourmentent le pays depuis 40 ans. Il serait plus judicieux dans ce cas-là, de la classer dans un cadre global, ayant trait à la gestion politique du pays. Depuis son indépendance, qu'a-t-on fait pour enraciner l'amour de la patrie dans le coeur de nos jeunes? Qu'a-t-on réalisé pour ce pays de martyrs? Nous n'avons nullement besoin d'interviewer de hauts responsables de l'Etat pour en avoir le bilan officiel. De ces quatre dernières décennies contentons-nous de voir la réalité, au moins elle ne saura pas nous mentir. Sans censure aucune, elle révélera tous les paradoxes d'un pays envers lequel tous les Algériens déclarent leur amour et leur respect le plus profond. Mais auquel l'on a fait beaucoup de mal. «Par amour pour la patrie», l'ex-parti unique a gouverné le pays durant 26 ans, refusant l'opposition, et toujours avec le même slogan, on a instauré le multipartisme en 1989. «La démocratie s'arrache», autre slogan qui a été «scandé» «pour justifier» la mort d'une centaine de jeunes, durant les événements du 5 octobre 1988. L'Algérie entre dans l'Histoire encore une fois, en optant pour la démocratie. Prenant ainsi de l'avance par rapport à ces voisins. Un choix qui a fini par coûter cher, trop cher au pays. 100.000 morts tel est le bilan palpable de dix ans de terrorisme, parce qu'il faut savoir qu'en Algérie on égorge aussi pour «un semblant d'amour du pays». Enfin pour ce même «amour», chaque parti politique en Algérie se prévaut de nationalisme, l'autre est critiqué, boycotté et rejeté. Pour ce même amour, certaines personnalités revendiquent l'autonomie de la Kabylie. Les sacrifices des martyrs de la guerre de la libération se perdent malheureusement au fil des années dans les calculs des politiques, mettant en otage un pays et, à travers lui, plusieurs générations.