Les deux parties tournent le dos à l'essentiel et cherchent à se cacher derrière des accusations stériles. L'hémicycle s'est-il transformé en chambre d'accusation opposant le pouvoir législatif au pouvoir exécutif? Tenant compte de la scène qui s'est passée jeudi dernier, dont les acteurs ne sont autres que les ministres de la République et les députés, la réponse ne peut être qu'affirmative. Explication: lors de la séance plénière afférente aux questions orales, les députés et les ministres de la République ont consacré une bonne partie de leur temps au jeu du chat et de la souris. Les deux parties ont complètement tourné le dos à l'essentiel pour se prêter à des accusations stériles. Les représentants du gouvernement ont accusé les députés de vouloir régler leurs comptes, avec des élus locaux et des directeurs d'organismes et institutions gouvernementales. Ne s'arrêtant pas-là, les ministres reprochent aux «élus du peuple», de mettre la pression sur les responsables locaux après que ces derniers n'aient pas accepté de répondre aux exigences des députés. L'autre «problématique» qui dérange nos ministres, est le fait que la presse publie les questions des députés avant même qu'elles ne soient déposées sur les bureaux des ministres. Cet état de fait a été qualifié par les ministres comme portant atteinte aux institutions et hauts organismes de l'Etat. Ainsi, le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, Rachid Harraoubia, appelé à répondre aux questions des députés, a préféré soulever une question n'étant pas à l'ordre du jour. Le ministre a demandé aux parlementaires de ne plus «glisser» les questions aux journalistes avant de les poser aux ministres car il estime que les députés ouvrent de cette façon la voie aux critiques de la presse contre les responsables de différents secteurs. Le même responsable s'est dit étonné de lire des questions sur les colonnes de la presse, avant même qu'elles ne parviennent sur son bureau. De son côté, Djamel Ould Abbès, ministre de la Solidarité nationale, de la Famille et de la Communauté nationale à l'étranger accuse les députés d'utiliser le statut dont ils jouissent pour régler leurs comptes avec les élus locaux. Il témoigne que ce constat a été établi au niveau même des autres départements ministériels. Et de demander aux parlementaires d'être dignes de leur mandat. Ces deux exemples illustrent bien la manière de coopérer des deux pouvoirs. Or, l'urgence consiste à traiter le fond des problèmes. C'est-à-dire répondre aux attentes des citoyens. L'urgence ne réside pas dans le fait que la presse publie les questions. Le danger est lorsqu'un ministre de la République tourne le dos à l'essentiel et cherche à se cacher derrière des accusations stériles. L'autre fait surprenant est de voir que les députés et les deux ministres qui se sont adonné à une partie d'échecs appartiennent au même courant politique ou bien s'inscrivent dans la même logique politique. Il est évident que les ministres ont défendu le Programme du Président et se sont engagés à l'appliquer sur le terrain. Quant aux députés, ils avaient approuvé ce même programme en adoptant le Plan d'action présenté par le Premier ministre, Ahmed Ouyahia. Il est temps pour les deux parties d'assumer les responsabilités qui leurs sont confiées par la loi et d'éviter la fuite en avant. Les affrontements et les accusations à ce niveau, c'est-à-dire entre les pouvoirs législatif et exécutif, ne peuvent que témoigner du danger qui se profile à l'horizon. Pour éteindre le feu et calmer les esprits, Ben Hlima Boutouika, député du FLN, qui a dirigé cette séance, a souligné que le bureau de l'APN devait revoir la manière avec laquelle seront posées les questions orales.