«Les vacances...c'est les vacances. On ne va pas à l'école». «Nous passions nos journées à sillonner la rivière, en bas dans la forêt, à chercher les escargots en compagnie de notre instituteur, à collectionner les plantes et leurs noms, à jouer et à apprendre des chansons et à découvrir dans la nature. Nous attendions avec impatience les vacances en ces temps-là. C'était des moments inoubliables», nous raconte Tassadit, âgée d'une soixantaine d'années. Elle évoquait ses souvenirs d'enfance des années 1950 à l'école de Tarihant, village situé sur le littoral de la wilaya de Tizi Ouzou. Leur instituteur, dont elle ne garde plus le nom français, les prenait en charge même durant les vacances. Sans doute, il aimait bien ces petits poussins et surtout son métier. Il ne faut surtout pas omettre de signaler, qu'après une vie pleine de rebondissements heureux et malheureux, Tassadit, avec ses cinq années d'école, écrit et lit mieux que les bacheliers d'aujourd'hui. «Je ne fais rien. Pourquoi? Il faut que je fasse quelque chose? Ce sont les vacances, c'est tout.» Cette réponse est celle du neveu de Tassadit, soixante ans plus tard. Aussi étonné par notre question que nous l'avons été par sa réponse. Pour Samir, le mot «vacances» signifie qu'il ne va pas à l'école pendant deux semaines. Pour Tassadit, par contre, celles-ci revêtent encore un charme. «Je me souviens encore du goût délicieux des plats d'escargots que la femme de l'instit nous faisait partager. J'entends encore nos cris de joie quand on tombait sur un escargot» se remémorait-elle avec nostalgie et une certaine pointe d'amertume. A entendre les deux répliques, l'on constate que le ver et aujourd'hui dans le fruit. S'interroger sur la manière avec laquelle les enfants passent leurs vacances n'est plus dans l'air du temps. Il faut plutôt réfléchir à la manière de réinventer le concept. Cependant, force est de constater que ce ne sont pas uniquement les responsables du secteur qui sont interpellés, mais aussi les parents. Nous avons quand même poursuivi notre quête auprès des enfants. L'espoir de retrouver le sens du mot nous animait toujours. «Je regarde la télé, rien d'autre» répondit Massi, un collégien. Comme réponse à la question du sens du mot vacances, nous n'avons récolté qu'un sourire qui en dit long. «Les vacances...c'est les vacances. On ne va pas à l'école». Nous cherchons à être éclairés, auprès d'un instituteur. «Vous croyez vraiment que nous avons la même volonté que l'instit français des années 1950 dont vous parlez? Je ne fais rien, même pour mes propres enfants. Où voulez-vous que je les emmène?» nous répond Ali, instituteur. Sa réplique nous renvoie toutefois à une autre problématique. Les lieux de loisirs pour enfants sont inexistants à travers les villages de la wilaya. «Les vacances? Eh bien...j'en profite pour aider mes parents dans la cueillette des olives», confie Farid, lycéen. «Que voulez-vous qu'on fasse à la Maison de jeunes? Elle est toujours occupée. Il n'y a d'ailleurs pas d'activités intéressantes», poursuit son ami. Interpellé sur le sujet, le président du comité d'un village ne mâchera pas ses mots pour nous dire qu'il n'a pas le temps pour ça. «Vous parlez d'une aire de jeu pour enfants alors que nous n'avons encore ni voies d'assainissement ni eau potable. Vous êtes un peu en avance sur le temps» ironisa-t-il. En effet, les témoignages sont nombreux à converger vers le constat que les vacances n'ont plus le sens d'antan. Un enfant ira même jusqu'à dire que l'école buissonnière a plus de saveur que les vacances scolaires. Les vacances, il faut bien les réinventer.