«Les pouvoirs publics ont donné un cachet technique à un problème purement politique», a déclaré l'économiste Mohamed Gharnaout. Les Algériens ont entamé l'année 2011 avec la valse des étiquettes sur les prix de produits à base de sucre et de céréales. La flambée des prix qui a caractérisé récemment le marché n'a pas épargné les fruits et légumes dont les coûts donnent le tournis. Rien ne semble endiguer cette frénésie. Cédé à 200 DA le kilo, le poivron demeure intouchable pour les bourses moyennes. La courgette affiche des prix hors de portée. Elle est écoulée à 160 DA. Le chou-fleur frôle la barre des 90 DA/kg. Les bourses moyennes sont encore une fois, mises à rude épreuve. De ce tableau «sombre», on se demande si les mesures gouvernementales prises pour l'huile et le sucre afin de calmer les esprits des jeunes révoltés se répercuteront sur les produits maraîchers. Suite aux manifestations ayant touché plusieurs wilayas, un conseil interministériel agissant au nom du gouvernement a, avec l'accord du chef de l'Etat, arrêté plusieurs mesures. Des exonérations temporaires et exceptionnelles ont concerné les droits de douane, de TVA et d'IBS, sur le sucre roux et sur les huiles alimentaires. «Ce n'est pas une solution. Ce sont uniquement des mesures d'apaisement», a déclaré, hier, à L'Expression Djelloul Djoudi, chargé de la communication au sein du Parti des travailleurs. Excepté la TVA, dit-il, les deux autres impôts profitent aux importateurs. Pas aux citoyens. Le gouvernement semble faire dans la diversion. Un avis que confirme l'économiste, Mohamed Gharnaout, joint par téléphone. «Les pouvoirs publics ont donné un cachet technique à un problème purement politique», a souligné le spécialiste. Illustrant ses dires, il explique que les prix du sucre et de l'huile, qui ont augmenté sur le marché international, n'est que la goutte qui a fait déborder le vase. Entendre des jeunes, pendant des manifestations tumultueuses à Oran, crier à tue-tête de les laisser partir en Europe, est la meilleure explication, enchaîne M.Gharnaout. Le chômage, la mal-vie, le manque de loisirs...sont les raisons, les vraies, de cet éveil juvénile. L'Ugcaa et la Caci ont appelé, dimanche, à «élargir ces mesures fiscales à tous les produits». Pourquoi le gouvernement n'a pas pris des décisions radicales qui mettent fin à toute pénurie sachant qu'il s'agit de produits locaux. C'est cette absence de décisions définitives qui a fait persister la crise du lait depuis plus d'un an. Si réellement, ce sont uniquement les prix du sucre et de l'huile qui ont fait sortir les jeunes dans la rue, il serait possible, dans ce cas, de voir les mêmes émeutes se reproduire pour la pomme de terre...ou d'autres produits à usage courant. S'agissant des prix, on note que les dérivés du lait ne sont pas épargnés par la surenchère. Le yaourt est passé de 14 à 16 DA. La farine n'était pas en reste. En plus de sa rareté, elle est passée à 50 DA le kg. Le prix du pain risque, comme l'ont signifié les boulangers, de s'envoler. Les pâtes alimentaires ne dérogent pas à la règle. Il y a quelques semaines, le paquet d'un kilo de spaghetti coûtait entre 30 et 35 DA il se vend, actuellement, à 40. Motif de cette montée vertigineuse? Du côté du PT, on évoque le désengagement de l'Etat. «L'Etat doit rouvrir des entreprises agroalimentaires et intervenir de façon directe dans le commerce interne et externe». Et d'ajouter: «Comme l'Onil qui est l'office du lait, on doit avoir un office de l'agroalimentaire qui assure cette intervention». Pour l'instant, le gouvernement annonce que le prix du sucre sera de 90 DA et celui du bidon de 5 litres d'huile de 600 DA.