Du jamais-vu! Des avions de chasse et des hélicoptères ont bombardé les manifestants et les casernes de Tripoli, la capitale libyenne. Est-ce une attaque ennemie? Non! C'est le despote libyen qui règle ses comptes avec son peuple. Dès dimanche soir, le fils aîné de Mouamar El Gueddafi, Seif el-Islam El Gueddafi, annonçait la «couleur» en affirmant, dans une allocution télévisée, que le peuple devait choisir soit de construire une «nouvelle Libye» (sous-entendu avec le clan des Gueddaf Eddam, la tribu des Gueddafi), soit de plonger le pays dans la «guerre civile». C'était clair, la clan Gueddafi ne cédera rien, quitte à commettre un génocide, ce que les soldats qui lui sont fidèles et des mercenaires africains se sont empressés de mettre à exécution. Dans cet optique, le colonel El Gueddafi, dans un discours retransmis par le télévision d'Etat, a indiqué hier qu'il se «battra jusqu'à la mort» appelant ses partisans à manifester derrière l'armée et la police, promettant la «peine de mort» aux manifestants armés. Aucune nuance, le «guide» libyen ne se remet pas en cause, c'est son peuple qu'il remet en question. El Gueddafi met ainsi en pratique, à une échelle nationale, la loi du talion, voulant se venger de son peuple qui le rejette après 42 années de dictature et de pouvoir sans partage. De fait, ne s'en tenant pas à cette déclaration de guerre à son peuple, El Gueddafi est revenu hier, dans un discours direct à la télévision, sur ce qu'il disait plus tôt, affublant les manifestants du qualificatif de «rebelles» et leur promettant de connaître une riposte «similaire à Tien anmen (en Chine) et Fallouja (en Irak)». Deux lieux restés tristement célèbres dans la mémoire internationale après le massacre par l'armée chinoise d'étudiants sur la place Tien anmen à Pékin, en 1989, et le carnage de Fellouja par l'armée d'invasion américaine en 2004. Dans la nuit de dimanche, peu après la menace de «guerre civile» de Seif el-Islam El Gueddafi, il y eut des scènes d'horreur dans la capitale libyenne, Tripoli qui avait rejoint, dans la journée de dimanche, le mouvement de révolte, parti le 15 février de Benghazi dont l'aéroport a été bombardé, dans la nuit de lundi, selon le chef de la diplomatie égyptienne, Ahmed Aboul Gheit. Du jamais-vu! Des avions de chasse et des hélicoptères ont bombardé les manifestants et les casernes de Tripoli, la capitale libyenne. Est-ce une attaque ennemie? Non! C'est le despote libyen qui règle ses comptes avec son peuple. Ces bombardements barbares ont été confirmés par Seif el-Islam El Gueddafi qui semble avoir pris les choses en main, indiquant, lundi, que «les forces armées ont bombardé des dépôts d'armes situés dans des zones loin des concentrations urbaines», cité par l'agence officielle Jana. Or, on a dénombré, peu après ces bombardements dans la périphérie des casernes attaquées, plus d'une centaine de corps brûlés. Les mêmes scènes de chaos se sont produites à Zaouia, ville à 60 km à l'ouest de Tripoli, proche de la frontière tunisienne. De fait entre lundi et hier, plusieurs villes sont tombées entre les mains des manifestants, notamment la grande métropole de l'Est, Benghazi, où une certaine accalmie a été observée hier après la cessation des combats. Il n'en reste pas moins que l'usage d'armements lourds pour mater le peuple, voilà qui, outre d'être choquant, dépasse l'entendement. C'est ahurissant de voir des avions bombarder une manifestation populaire. Il n'y a pas d'exemples similaires où un despote tue les enfants de son peuple pour garder le pouvoir. Il s'agissait bien de garder le pouvoir, comme le suggérait lundi soir, Seif el-Islam El Gueddafi, qui expliquait, à juste raison, que la Libye n'est pas la Tunisie, ni l'Egypte. Et pour cause! Le pouvoir en Libye est essentiellement fondé sur les tribus et les alliances tribales. Aussi, le clan El Gueddafi était-il prêt à susciter la fitna entre les tribus, laquelle pouvait déboucher sur la guerre civile, comme en a menacé le peuple, le fils aîné d'El Gueddafi. Depuis, le début des manifestations et surtout après la sauvage répression de séides du «guide», le nombre des victimes n'a cessé de s'alourdir, dépassant, selon les ONG, les 500 morts. En fait, dans un pays fermé où les médias étrangers sont interdits, il est très difficile d'établir un bilan fiable. Le nombre de victimes doit, vraisemblablement, dépasser le millier de morts, tant les combats ont été intenses et violents à Benghazi, Al Bayda, Zaouia, Derna et Tripoli, où on dénombrait hier une soixantaine de morts qui s'ajoutent au macabre bilan de ces derniers jours.