Alger réagit et accuse ouvertement Rabat de vouloir l'impliquer dans le conflit libyen. Alger réagit et accuse ouvertement Rabat de vouloir l'impliquer dans le conflit libyen. Sans aller par trente-six-chemins, Ahmed Ouyahia, Premier ministre, pointe du doigt le Maroc l'accusant d'avoir orchestré, par le biais de son lobbying à Washington, l'histoire de l'envoi d'armes et de mercenaires algériens en Libye. «Ces derniers temps, on observe (...) des déclarations de l'Agence officielle marocaine et une agitation du lobby officiel marocain aux Etats-Unis pour vouloir impliquer l'Algérie dans l'envoi de mercenaires en Libye, dans l'envoi d'armes en Libye», a-t-il dénoncé dans une conférence de presse, tenue hier à la résidence El-Mithak. Pour le chef de l'Exécutif, de telles déclarations ne sont guère en faveur de l'ouverture des frontières terrestres algéro-marocaines. Et d'insister que dans un climat pareil, cette question n'est même pas inscrite à l'ordre du jour, même en prévision du match retour de football, Maroc-Algérie qu'abritera la ville de Marrakech samedi prochain. Sur ce point, le conférencier a tenu à préciser que la réouverture des frontières n'est pas conditionnée par le désaccord entre Alger et Rabat sur la question du Sahara occidental. Pour preuve, justifie-t-il, les frontières étaient bien ouvertes, alors que cette question était toujours posée. Ce qui bloque, selon Ouyahia, ce sont les déclarations des officiels marocains ainsi que les coups de poignard que plantent les lobbying marocains, soutenus par Maroc agence presse (MAP), dans le dos de l'Algérie. «Nous avons besoin d'un climat empreint de bonne foi et de confiance mutuelles entre voisins. Les dernières déclarations n'encourageaient malheureusement pas cette tendance», a-t-il ajouté. Et de soutenir qu'il arrivera le jour où cette frontière sera rouverte. A condition! «Pour que ce jour arrive, il a besoin d'un climat et le climat se concrétise par des déclarations.» A propos des relations bilatérales entre les deux pays, M.Ouyahia s'est félicité du fait que le Maroc est le premier partenaire de l'Algérie, en matière d'échanges commerciaux, en Afrique, même bien avant la Tunisie, a-t-il révélé. Alger et la situation en Libye L'occasion s'est offerte au Premier ministre pour revenir sur la position de l'Algérie quant à la situation en Libye. L'Algérie, rappelle-t-il, est liée et elle tient à la position de l'Union africaine (UA) qui appelle à l'arrêt des combats et à une solution politique du conflit. D'autre part, il réitère le respect de l'Algérie des décisions du Conseil de sécurité de l'ONU, y compris celle portant sur les sanctions contre le régime libyen. Le Premier ministre a dévoilé que le gouvernement algérien avait reçu de la part d'opérateurs libyens des demandes d'achat qui portaient essentiellement, sur insistance de l'Algérie, sur les produits alimentaires et les médicaments. Et de souligner que le dossier a été soumis au comité de sanctions de l'ONU pour vérifier si ces opérateurs se conformaient aux règles et pour empêcher la sortie de notre territoire de produits autres que les produits de première nécessité et les médicaments. Armes libyennes et terrorisme en Algérie Le désastre que vit la Libye sur le plan sécuritaire a eu des répercussions négatives sur la bande sahélo-saharienne et surtout sur l'Algérie. Ahmed Ouyahia s'est interrogé sur le retour, ces dernières semaines, des attaques terroristes contre les services de sécurité dont le nombre de victimes était de 40 personnes assassinées, selon le bilan du Premier ministre. «La recrudescence terroriste en Algérie pourrait-elle ne pas être liée au soutien moral ou à la circulation non contrôlée d'armes en Libye?», s'est-il interrogé. Et d'affirmer que les autorités maliennes avaient déclaré que les armes découvertes en possession de terroristes provenaient «du trafic d'armes et du chaos qui sévit en Libye». Et d'indiquer que «les stocks d'armes libyennes échappaient à tout contrôle». Pour ce qui est de la coopération militaire entre les pays du Sahel, il a précisé que les pays de la région ont un intérêt commun, car tout ce qui touche cette ceinture touche tous les pays de la région. Pas de grâce pour les détenus islamistes Ahmed Ouyahia a bien mis un trait sur la libération des islamistes emprisonnés. Certains dirigeants de l'ex-FIS avaient confié à la presse, qu'environ 7000 détenus islamistes seront graciés à l'occasion de la Fête de l'Indépendance, le 5 juillet prochain. Le Premier ministre s'est vu offrir une occasion pour apporter un démenti catégorique à cette question. «Je démens formellement cette rumeur», a-t-il tranché. Et de préciser: «On a annoncé un chiffre de 5000 ou 4000 détenus islamistes, or, le nombre exact n'est même pas à hauteur de 10% du chiffre annoncé.» Nezzar et l'opposition Abordant le sujet relatif aux consultations politiques engagées par Abdelkader Bensalah, M.Ouyahia a invité l'opposition à prendre part aux consultations afin que toutes les parties soient impliquées. «Je souhaiterais que l'opposition puisse contribuer activement par des idées et des propositions claires à la réussite des consultations», a-t-il dit. Et d'affirmer que l'Algérie a décidé de ces réformes en toute souveraineté. Sur la révision de la Constitution, il a affirmé qu'elle sera soumise en tout état de cause au Parlement avant le référendum conformément aux textes en vigueur de la Loi fondamentale. Sollicité à commenter les déclarations du général à la retraite, Khaled Nezzar, qui a critiqué la position du gouvernement sur les marches à Alger, ainsi que le refus d'agréer de nouveaux partis politiques, M.Ouyahia a affirmé que Nezzar parle en son propre nom et il est libre de donner son avis et de s'exprimer sur les réformes. Djezzy et l'audiovisuel Le patron de l'Exécutif est revenu sur le climat des affaires qu'il avait dressé samedi durant les travaux de la tripartite. A ce titre, il a tenu à préciser que le constat de la Banque mondiale qui classe l'Algérie à la 136e place, n'est pas un constat d'échec. «J'ai vu certains titres se délecter: constat d'échec, aveu d'échec. Il n'y a ni constat d'échec, ni aveu d'échec. Il y a une réalité que le gouvernement assume au côté du monde des affaires», a-t-il soutenu. Et de reconnaître que l'Algérie enregistre des retards en matière de climat des affaires et que le gouvernement veut améliorer cette situation. Une fois de plus, Ahmed Ouyahia réitère l'engagement de l'Algérie à racheter l'opérateur de téléphonie mobile Orascom Telecom Algérie. «Je vous confirme que la procédure (de rachat) ira à son terme.» A une question sur le montant de l'évaluation d'OTA faite par «Sherman and Sterling LLP France», il a répondu en disant laisser le cabinet faire son boulot. La réouverture du champ audiovisuel n'est toujours pas à l'ordre du jour du gouvernement. Malgré les réformes annoncées dans le domaine de l'information, celles-ci n'iront pas jusqu'à l'ouverture du champ audiovisuel. Le Premier ministre a fait savoir qu'un jour, l'audiovisuel sera libéré et non pas maintenant. «Lorsque le jour viendra, vous saurez les raisons de notre position», a-t-il expliqué. La représentation féminine Le gouvernement soumettra bientôt une loi organique sur une représentation féminine de 30% dans les assemblées élues, a révélé hier Ahmed Ouyahia. Ce projet de loi organique reste «une exception» dans l'agenda du gouvernement qui comprend également des projets de lois en phase préliminaire qui seront soumis à plusieurs parties pour consultation et enrichissement, à l'instar de la loi sur les partis.