Deux mois et demi après le coup d'Etat, qui a renversé le président Sidi Ould Cheikh Abdallahi, Washington est sorti de son mutisme en annonçant des mesures punitives contre les putschistes de Nouakchott. Après un long silence sur la situation en Mauritanie, les Etats-Unis prennent position avec l'Union, qui avait exigé, le 22 septembre, que le président Sidi Ould Cheikh Abdallahi, élu en 2007, soit rétabli dans ses fonctions le 6 octobre “au plus tard”. L'instance africaine avait même évoqué des “risques de sanctions et d'isolement” pour les putschistes s'ils ne satisfaisaient pas à cette “exigence”. Cette position a été réitérée le 7 octobre, à l'issue de consultations avec des émissaires de la junte. Washington emboîte donc le pas à l'Union africaine de façon ferme en annonçant des restrictions de déplacement contre certains membres de la junte militaire et du gouvernement mis en place par le général Mohamed Ould Abdel Aziz. Les Etats-Unis “appuient fermement les efforts de l'Union africaine et réitèrent leur appel à la libération du président Sidi Ould Cheikh Abdallahi et au rétablissement immédiat de l'ordre constitutionnel”, indique un communiqué de la représentation diplomatique américaine dans la capitale mauritanienne, rendu public vendredi. La même source ajoute que “le peuple mauritanien a le droit de profiter de la démocratie pour laquelle il a durement œuvré (...) et de jouir de la sécurité et du développement que seule la démocratie peut apporter”. “Le secrétaire d'Etat a ordonné le 16 octobre des mesures de restriction sur les voyages aux Etats-Unis contre certains membres de la junte et du gouvernement ainsi que contre d'autres individus qui soutiennent des politiques ou des actions compromettant le retour de la Mauritanie à l'ordre constitutionnel”, affirme l'ambassade américaine à Nouakchott. Ainsi, les autorités américaines ont pris des “mesures de restriction sur les voyages aux Etats-Unis contre certains membres de la junte”, deux mois et demi après le coup d'Etat qui a renversé le président mauritanien élu Sidi Ould Cheikh Abdallahi. Réagissant aux sanctions américaines, le ministre de la Communication nommé par les militaires après le coup d'Etat du 6 août a estimé vendredi que les sanctions prises par les Etats-Unis contre la junte résultaient d'“une évaluation erronée de la situation en Mauritanie”. Le ministre Mohamed Ould Meine a déclaré lors d'une conférence de presse : “Nous savons que les Etats-Unis sont un pays important, une grande puissance souveraine dans ses décisions, mais nous pensons que sa décision est dictée par une évaluation erronée de la situation dans notre pays”. Il ajoutera que “des milieux hostiles à la Mauritanie ont travaillé pour donner une fausse image des réalités en Mauritanie et des circonstances réelles qui ont conduit au changement du 6 août qui est une réponse à une demande de l'immense majorité du peuple et de sa classe politique pour mettre hors d'état de nuire un homme qui menait le pays vers le chaos”. Le ministre a également affirmé que la Mauritanie était “suffisamment prospère et qu'une bonne gestion de ses moyens propres lui permettraient de se développer sans problème en cas de sanctions internationales”, tout en promettant de tout faire pour les éviter. N'ayant jusque-là obtenu que le soutien du Maroc, les putschistes mauritaniens se retrouvent dans une situation des plus embarrassantes. L'étau se resserre autour du général Mohamed Ould Abdel Aziz, le chef de la junte, qui voit sa marge de manœuvre se rétrécir et pourrait l'être davantage les prochains jours après la réunion avec l'Union européenne. Nouakchott a été convié par les 27 partenaires de l'Union européenne à partir du 20 octobre 2008 à Bruxelles pour discuter de la situation créée par le coup d'Etat et du “retour à l'ordre constitutionnel” attendu. Par ailleurs, Paris a pris “contact” la semaine dernière à Nouakchott avec le général Mohamed Ould Abdel Aziz à la tête de la junte et les principaux “acteurs politiques” mauritaniens pour les encourager à réfléchir à une “sortie de crise” et préparer les consultations. Merzak T.