Au cours des affrontements à Biskra, 15 personnes ont été blessées. Grave est la situation que vit le FLN depuis deux jours. Plusieurs de ses mouhafadhas sont attaquées dans dix-sept wilayas du pays. Si ceux qui se proclament comme opposants à la ligne imprimée au parti depuis son huitième congrès ont pu s'emparer, hier, des sièges des mouhafadhas de Biskra, Mostaganem et Naâma, avant que les militants de la formation de Ali Benflis ne les récupèrent, ils n'ont pas pu mener à terme leur stratégie. Un membre du bureau politique, rencontré hier, a qualifié ces attaques de vaste complot visant, en fin de parcours, la prise du siège national du parti à Alger pour proclamer la tenue d'un congrès extraordinaire qui changera de cap au FLN. Le bureau politique du parti s'est d'ailleurs réuni en urgence, hier, sous la présidence de Ali Benflis, “à l'effet d'examiner la situation découlant de ces actes d'agression”. Dans un communiqué rendu public à l'issue de cette réunion, la formation majoritaire à l'APN souligne qu'“au moment où le pays n'a pas fini de panser les blessures de la tragédie nationale qui l'a endeuillé le 21 mai dernier, des individus n'ayant aucun lien avec le parti ont vainement tenté d'occuper les locaux abritant les mouhafadhas” dans les wilayas de Biskra, Mostaganem et Naâma. Ces actes, indique la même source, “relèvent de la pratique mafieuse et sont le fait de délinquants, inspirés, commandités et se prévalant de la complicité de certains cercles au sein de l'appareil de l'Etat”. À ce titre, “de tels agissements, estime le FLN, interpellent obligatoirement les pouvoirs publics qui doivent assurer pleinement la sécurité des personnes et des biens, afin d'épargner au pays les conséquences incalculables qui peuvent résulter de ces comportements irresponsables”. Cette situation, affirme encore le parti de Ali Benflis, “ne manquera pas, également, en ce qu'elle crée comme dérèglement et perturbation de la pratique saine et sereine de l'action politique, d'interpeller l'ensemble des forces politiques et sociales qui œuvrent à l'approfondissement de la pratique démocratique et au renforcement du pluralisme dans notre pays”. Le bureau politique considère, en effet, que le mobile de ces actes désespérés est à rechercher “dans les desseins inavoués et les vains calculs de ceux qui voient leur démarche contrariée par le processus de renouveau et de modernisation du parti, un parti souverain dans ses décisions et maître de son destin”. En condamnant fermement ces attaques qui constituent, à ses yeux, “un précédent grave et une dérive pour l'avenir de la démocratie et du pluralisme politique dans le pays”, le FLN affirme que “cette machination est une grossière erreur politique et une faute de jugement grave de la part de ses commanditaires, qui n'ont, à l'évidence, pas mesuré l'ampleur des conséquences néfastes d'une telle démarche qui ne saurait, par ailleurs, aucunement entraver la marche du parti vers la concrétisation de ses principes, de ses idéaux, de ses valeurs et des décisions du dernier congrès”. La formation de Ali Benflis, qui prend à témoin l'opinion publique nationale sur la gravité d'une telle situation, et qui souligne qu'elle “ne saurait être ébranlée par de tels agissements ou toute autre forme de déstabilisation”, indique que “l'Algérie de la démocratie et du progrès est en marche, n'en déplaise aux tenants des combats d'arrière-garde, de la régression et des visions passéistes”. Rencontré hier au siège du FLN, Abdelkader Saâdi, député et membre du BP, précise que le complot contre le parti a commencé juste après le congrès. Ses auteurs ne sont, selon lui, que ceux qui n'ont pas pu être élus à de hautes responsabilités au sein du comité central. Il s'agit surtout de Abdelkader Hadjar, Ammar Tou, Tayeb Louh, Daâdoua Layachi, Saïd Barkat, Mahmoud Khodri, Bouabdellah. Bénéficiant, dira-t-il, de complicité de certains cercles officiels, ce groupe a constitué des cellules qui ont élaboré un plan afin de déstabiliser le parti. La stratégie est d'abord de réactiver les comités de soutien à Abdelaziz Bouteflika, ensuite la récupération du FLN à travers les actions de ces deux derniers jours. Ainsi, une réunion s'est tenue, mardi dernier, dans un lieu tenu secret, et sous la présidence de Ammar Tou. C'est lors de cette rencontre, qui a duré de 14 heures à 17 heures et à laquelle d'ailleurs ont pris part des personnes qui ont quitté le FLN pour rejoindre le RND il y a longtemps, entre autres Boudina Mustapha, désigné sénateur dans le tiers présidentiel, que les attaques contre les mouhafadhas ont été décidées. Abdelkader Saâdi, qui affirme que la vigilance des militants du FLN et leur détermination ont fait échouer ces agressions, indique que, selon des informations recueillies par les militants, les pouvoirs publics ont laissé faire. Les affrontements à Biskra ont fait 15 blessés. À Blida, dira-t-il, le wali, en complicité avec Ammar Saïdani, le coordinateur des comités de soutien de Abdelaziz Bouteflika, a suivi l'opération de bout en bout. Les mêmes informations lui sont aussi parvenues de Mostaganem où “le wali et le chef de sûreté sont impliqués dans cette affaire”. Les affrontements ont failli, ajoute-t-il, dégénérer en bain de sang. Si Affif, un des opposants à la ligne Benflis, a même ameuté “ses six chiens (des dobermans et des jeunes délinquants qui ont été payés, pour s'attaquer au siège de la mouhafadha”. Les militants du parti et d'autres citoyens ont fait face à cette agression et ont tué trois des six animaux. Dans cette wilaya, enchaîne ce membre du BP, “les responsables de l'administration et la police exercent des pressions sur le maire, Azi Benthabet, pour avoir accueilli, il y a quelques jours, la réunion des élus locaux de l'Ouest, présidée par le secrétaire général du parti”. “La situation est grave", lancera un autre militant du FLN hier. Pour lui, "des irresponsables veulent libaniser l'Algérie avec la création de milices au niveau de chaque formation politique”. Les autorités, ajoute-t-il, “doivent protéger les institutions comme le stipule la Constitution du pays. C'est dangereux” ! Ali Benflis, ancien Chef de gouvernement et secrétaire général du parti, organiserait dans les tout prochains jours une conférence de presse où il donnera plus d'éclaircissements sur la situation que vit son parti. S. R.