Fifi dormait à poings fermés, quand le facteur sonna à la porte : un paquet pour toi Fifi... Sûrement un cadeau. Fifi oubliant carrément de remercier le facteur s'empara du colis et ferma la porte. Mais que peut-il bien contenir ? Elle coupa la ficelle est ouvrit la petite boîte dans laquelle s'entassaient deux tablettes de chocolat, deux foulards, quelques savonnettes et un coupon de tissu. Fifi sauta de joie et s'attaque au chocolat sans tarder avant de plier un foulard en deux pour l'essayer devant un semblant de glace effritée qui était accrochée tant bien que mal à la porte d'entrée. Fifi s'empressa par la suite de ramasser ses cadeaux et de se diriger, clopin-clopan, vers sa grande caisse en bois ou elle gardait ses trésors. Ce n'est que quelques instants plus tard qu'elle se demanda d'où provenaient ces cadeaux, et qui aurait pu penser à elle qui n'avait plus personne au monde. Peu importe, se dit-elle, l'essentiel est que j'ai quelque chose à la veille du nouvel an. Le lendemain à la même heure, le facteur se présenta de nouveau chez Fifi. Cette dernière espérant recevoir un autre paquet, souriait de toutes ses gencives : - Alors, le facteur, un paquet pour moi ? - Euh, Fifi…. Non, il n'y a rien pour toi aujourd'hui, mais il semble que je me sois trompé d'adresse hier... Le colis que je t'ai remis ne t'était pas destinée, et je te prie de me le rendre. - Mais il n'y a pas eu de colis pour moi, dit Fifi... je n'ai rien reçu... je n'ai rien vu... ni chocolat, ni savon... Ni... Enfin, je n'ai rien. - Voyons Fifi, dit le facteur, je sais que c'est ma faute, mais au moins dis-moi ce qu'il y avait dans ce colis pour que je puisse à la rigueur le rembourser intégralement. - Fais ce que tu veux, espèces de brute... tu ne me connais pas... tu ne m'a jamais vue, je suis morte... Invente n'importe quoi... Et puis d'ailleurs, à part le chocolat... Je me rappelle même pas de ce qu'il y avait dans ce colis. - Fifi, je suis prêt à te payer deux boîtes de chocolat. Dis-moi enfin ce qu'il y'avait dans ce colis ? - Une bombe, dit Fifi, avant de claquer majestueusement la porte. Elle s'enfuit sous son lit (sa cachette préférée) et se boucha les oreilles. Le facteur avait beau frapper, il n'obtient aucune réponse. Fatigué, il décida quand même de faire son rapport en précisant que la faute lui en incombait. Il ne faut surtout pas accuser la pauvre vieille Fifi qui n'a pas toute sa raison. Entre-temps, Fifi sortant furtivement de sa cachette étala encore une fois devant elle savonnettes, foulards et tissu. Cocotte le chat huma le tout avant d'opter pour le tissu sur lequel il s'allongea paresseusement. Fifi le chassa en faisant la moue, et frotta son visage défraîchi au beau coupon de soie. - Mais, se dit-elle, que pourrais-je faire avec ? Une belle gandoura ? Un beau séroual ? non, je l'étendrai dans la cour. Comme cela, les voisines crèveront de jalousie à sa vue. Chose pensée, chose faite. Fifi étendit son morceau de tissu au milieu de ses habituelles guenilles, ce qui ne manqua pas d'attirer l'attention des voisines. Quelques-unes échangèrent même quelques regards interrogateurs. D'où lui vient ce tissu coûteux ? Fifi rigolait à gorge déployée. Je prépare mon trousseau… Regardez, j'ai aussi des savonnettes et des foulards… ils sont beaux hein ? Ha, ha, ha. Minou la poule vint picoter une savonnette, mais lui trouvant un goût bizarre, elle s'éloigna. Fifi lui lança : - Tu es jalouse toi aussi poule de malheur, crève ! Il commençait à faire nuit, et Fifi rentra chez-elle en laissant sur la corde son tissu et ses foulards. Durant la nuit, le vent se leva et les emporta sans crier gare. Au petit matin, Fifi se précipita dans la cour pour constater la disparition de ses cadeaux. Elle poussa un cri et se mit à courir dans toutes les directions. On m'a volé mon linge, bouh alia, les jalouses, elles m'ont volée… Fifi pleurait à chaudes larmes, et ses lamentations faisaient fondre les cœurs. Compatissantes, les voisines ayant compris de quoi il s'agit vinrent la consoler de leur mieux. Ne pleure pas Fifi, nous te donnerons d'autres foulards et tissus. - Je veux les miens, criait Fifi… les miens. - Mais Fifi, le vent les a emportés… - Vous me prenez pour une imbécile… Le vent n'à ni mains, ni pieds, puis lui, c'est un radjel, que fera-t-il de mes foulards et de mes tissus ? Les voisines éclatèrent de rire. - Fifi, sois tranquille, nous irons gronder ce vent, et lui ferons lâcher prise… Fifi se calma. Dans l'après-midi, une voisine lui apporta deux coupons de tissus et deux foulards. - Tiens Fifi, le vent nous a rendu les tissus et les foulards qu'il a volés. Essaye de reconnaître les tiens. Fifi s'empara du linge en s'imposant : ils sont tous à moi ! la voisine sourit : prends-les Fifi. Ils sont tous à toi. Fifi s'éclipsa et fourra le tout dans sa vieille caisse en bois. Maintenant qu'elle est plus tranquille, elle pourra piquer un petit somme. Cocotte le chat s'installa avec elle sur le grand lit, et tous deux sombrèrent bientôt dans un sommeil profond. Comme un enfant, Fifi suçait son pouce en souriant. Elle était très heureuse. Pour une fois qu'elle recevait des câdeaux. Y. H.