En réalité, l'édile socialiste d'un arrondissement de la deuxième ville de France, peu habituée aux codes locaux, semble avoir interprété à sa manière des propos plutôt banals, mais tenus sur le ton de la courtoisie. Après 25 ans de militantisme, la sénatrice française Samia Ghali n'est pas vraiment une novice en politique. Son passage à Alger, dimanche, a pourtant toutes les chances de se révéler comme son véritable rite initiatique. Mardi, l'élue marseillaise a passé son temps à essayer de recadrer des propos qu'elle a tenus devant les journalistes et qui ont résonné comme un coup de tonnerre dans le ciel algérois lorsqu'ils y sont parvenus lundi matin. À quelques jours de l'annonce par le président Bouteflika de sa candidature pour un 3e mandat, l'élégante quadragénaire, descendante d'une famille des Aurès, lui attribue des confidences selon lesquelles il aurait renoncé à son projet, voire même désigné un successeur. Rien que ça ! Manipulation du chef de l'Etat ? C'est une hypothèse qui a été évoquée. En réalité, l'édile socialiste d'un arrondissement de la deuxième ville de France, peu habituée aux codes locaux, semble avoir interprété à sa manière des propos plutôt banals, mais tenus sur le ton de la courtoisie. Evoquant avec le Président son éventuelle succession sans aucune référence au prochain mandat, M. Bouteflika a cité des noms de personnalités politiques en faisant particulièrement les éloges d'une femme. La sénatrice a fait de ces éloges une “piste” menant à une succession qui n'est pas du tout ouverte. Elle ne s'est donc pas fait le relais d'une improbable bataille qui agiterait le sérail. En évoquant sa conversation avec le chef de l'Etat, elle ne s'imaginait pas du tout l'écho que la presse allait lui donner en Algérie. Selon des membres de la délégation marseillaise, Mme Ghali s'émoustillait et se pâmait en sortant du bureau présidentiel. C'est comme si elle sortait d'un rendez-vous avec un héros mythique. Elle a pris son téléphone pour appeler sa famille et s'est répandue en compliments sur le président. Une attitude qui ne suggère pas un mauvais coup prémédité de sa part. On assure qu'elle a rapporté naïvement ce qu'elle a cru comprendre. La péripétie semble n'en être pas une, en définitive. L'espace d'un voyage à Alger, Mme Ghali aura pris une bonne leçon de communication politique. Cette femme, titulaire d'un diplôme de comptabilité, conseillère d'arrondissement depuis 1995 a été élue, en mars, à Marseille, où elle est la première adjointe du maire Jean-Claude Gaudin. Elle a ensuite été élue sénatrice. L'élue, née à Marseille et élevée par des grands-parents originaires des Aurès, milite depuis 25 ans au PS dans le quartier où elle a grandi, un secteur défavorisé du nord de la ville. Tenace, elle a réussi à gravir les échelons et devenir le bras droit de Jean-Noël, une figure socialiste locale. C'est une des figures de l'ouverture du PS à la diversité. Tenace, mais naïve : les chemins politiques ne sont pas souvent pavés de roses. A. O.