La mise en place d'une aire marine gérée adjacente au Parc national de Taza est un projet pilote en Algérie initié par le WWF (World Wilde Fund) en association avec la DGF (Direction générale de Forêts). Ce projet d'envergure vise, entre autres, la réhabilitation des bonnes pratiques de pêche ainsi que la réorganisation de ce secteur en déliquescence. Si le niveau de pollution du littoral et du milieu marin algérien n'inquiète pas outre mesure les spécialistes, la lanterne rouge est allumée. L'accumulation des déchets du fait du rejet des eaux usées et industrielles sans traitement préalable dans les milieux semi-fermés et fermés (ports et baies), l'important trafic maritime et le dégazage à tout va - et échappant littéralement à tout contrôle - des navires sillonnant nos eaux territoriales et la surpêche, pour ne citer que ces sources ont, d'une part, induit l'insalubrité des plages notamment, dans le secteur centre (Alger et environ). D'autre part, la présence en excès des produits chimiques d'origine industrielle et agricole ont immanquablement porté atteinte aux écosystèmes marins (les herbiers,…). Sur la base de ce constat, la conservation de la biodiversité marine et côtière apparaît comme une alternative incontournable. Mais au-delà de cette préoccupation, il en est une autre qui suscite autant sinon plus d'inquiétude : La surpêche. Les stocks de poissons surtout, en mer Méditerranée s'épuisant, il devient dès lors, difficile de garantir la sécurité alimentaire dans les pays du bassin méditerranéen. En octobre 2001, la Conférence de Reykjavik avait défini “les règles d'une pêche responsable” - périodes d'interdiction de pêche et repos biologique de certaines espèces péchées comme le thon tropical ou encore la coquille Saint Jacques – toutefois, en l'absence d'instruments juridiques idoines et d'une réelle volonté politique nationale, la dégradation du milieu marin suivait jusque-là son cours. Pour Samir Grimes, enseignant-chercheur, protection des écosystèmes marins sensibles, impliqué en tant qu'expert dans le projet en question, les aires marines et côtières protégées (AMP) remplissent plusieurs fonctions. Les plus importantes d'entre elles sont inhérentes, explique-t-il, à la préservation des écosystèmes remarquables, rares et uniques en Méditerranée, au maintien des processus écologiques fragiles et des habitats vulnérables aux activités humaines et à la protection des espèces sensibles et emblématiques. “Ces aires marines protégées participent, par ailleurs, à sauvegarder les zones de frayère (de reproduction) indispensables à l'équilibre global”, ajoute notre interlocuteur et de poursuivre : “Les AMPs participent dans une gestion durable des ressources halieutiques en préservant les œufs, larves et juvéniles et en alimentant ainsi les stocks de pêche, elles peuvent constituer un moteur du développement local durable, en favorisant l'émergence d'activités compatibles et harmonieuses avec les spécificités de la région considérée.” Dans un autre chapitre, M. Grimes met en exergue l'opportunité qu'offrent les AMP méditerranéennes en constituant une composante du tourisme scientifique et d'élite très prometteuse pour l'avenir. Partant du principe que la conservation in situ de la biodiversité à travers les AMP est considérée à l'heure actuelle comme l'un des instruments les plus efficaces capable d'assurer la durabilité des écosystèmes les plus remarquables et le maintien de leurs processus originels à l'abri des dégradations liées aux multiples usages anthropiques possibles de ces espaces fragiles, notre interlocuteur rappelle qu'en Algérie, cette conservation in situ pose quatre problèmes majeurs : la planification sectorielle des espaces à protéger avec des objectifs et des catégories de classement qui ne remplissent pas les mêmes fonctions ; l'absence de mécanismes de gestion concertée et intégrée effectives de ces espaces biostratégiques et l'absence de réglementation spécifique et adaptée pour les aires marines et côtières protégées. Cette situation est amplifiée par la lenteur des procédures de classement et de mise en réserve, d'autant que la vitesse de dégradation est plus rapide que les délais de classement. “Certains sites perdent quelques unes de leurs composantes sous la pression des activités humaines dans des délais relativement courts, hypothéquant ainsi les objectifs de conservation et de protection visés par le classement “, conclut-il. Nahla R