Pour ne pas compromettre une relation historique entre leurs deux pays et afin de ne pas rompre le dialogue dès leur première rencontre, l'un et l'autre ont consenti des concessions de forme, sans conséquence sur le fond de leurs positions respectives. Le sommet Obama-Netanyahu, qui a réuni lundi les deux nouveaux dirigeants américain et israélien pendant deux heures et demie à la Maison-Blanche, n'a pas permis de rapprocher leurs points de vue et leurs positions sur les deux dossiers principaux : le conflit israélo-palestinien et la menace nucléaire iranienne. Mieux : ils ont exposé au grand jour et assumé leurs divergences. Benyamin Netanyahu a résisté aux insistances de Barack Obama en faveur de la création d'un Etat palestinien, conformément à la “feuille de route” et aux engagements pris à Annapolis en 2007. De son côté, le président américain s'est montré intraitable dans sa volonté de donner sa chance à la diplomatie avec l'Iran. Pour ne pas compromettre une relation historique entre leurs deux pays et afin de ne pas rompre le dialogue dès leur première rencontre, l'un et l'autre ont consenti des concessions de forme, sans conséquence sur le fond de leurs positions respectives. “Je veux dire clairement que nous ne voulons pas gouverner les Palestiniens” et “je crois que nous pouvons envisager un arrangement dans lequel Palestiniens et Israéliens vivent côte à côte dans la dignité, la sécurité et la paix”, a affirmé le Premier ministre israélien. “Nous n'allons pas discuter éternellement” avec l'Iran, a rassuré de son côté Barack Obama, car “nous devrions avoir d'ici à la fin de l'année une assez bonne idée pour savoir s'ils vont dans la bonne direction”. Dans le cas contraire, Téhéran s'expose à “des sanctions internationales bien plus rigoureuses”, a-t-il encore précisé. Ceci pour la forme. Dans le fond, les deux responsables n'ont pas modifié d'un iota leurs positions respectives. Netanyahu refuse d'évoquer la perspective d'un Etat palestinien indépendant, évite la question du gel des colonies en Cisjordanie dont son gouvernement, encourage l'extension et pose toujours comme préalable à la reprise des négociations la reconnaissance d'Israël comme “Etat juif” par l'Autorité palestinienne. Ce dernier préalable est inacceptable pour les Palestiniens, qui le rejettent catégoriquement, car il fermerait définitivement les portes au retour à la terre natale des réfugiés. “Il est dans l'intérêt non seulement des Palestiniens, mais aussi des Israéliens, des Etats-Unis et de la communauté internationale de parvenir à une solution à deux Etats”, a insisté le président américain, qui n'a pas manqué de rappeler que l'Etat hébreu, comme l'Autorité palestinienne, a le devoir de “prendre au sérieux (ses) obligations”, en conformité avec les accords passés. En particulier, “la colonisation doit cesser”, a-t-il précisé. Le moins qu'on puisse dire est que les deux hommes, Netanyahu à la tête du gouvernement le plus à droite de l'histoire d'Israël et Obama qui se situerait à l'aile gauche du parti démocrate américain ne sont pas faits pour s'entendre. Et si l'objectif du Premier ministre israélien était de nouer des relations de confiance, force est de noter qu'il a échoué dans sa mission. À l'épreuve d'une relation très difficile qui s'annonce, c'est la nature des liens très spéciaux entre les deux pays qui pourraient connaître quelques turbulences. Aussi paradoxal que cela puisse paraître, dans cet espèce de bras de fer qui ne dit pas son nom, l'impression qui se dégage est que Barack Obama, président de la première puissance mondiale, tente d'émanciper son pays de la tutelle diplomatique, non écrite mais réelle, de l'Etat hébreu. Il est à peu près acquis, et c'est tant mieux, que le locataire de la Maison-Blanche ne reculera pas et ne modifiera pas sa politique et les approches qu'il préconise. Il devrait le confirmer le 26 mai en recevant le président égyptien Hosni Moubarak, deux jours plus tard au cours du tête-à-tête programmé avec le président de l'Autorité palestinienne Mahmoud Abbas et, surtout, le 4 juin à l'occasion de sa visite d'Etat au Caire qu'il mettra à profit pour s'adresser au monde arabe et musulman. La fermeté dont il a fait preuve face à Netanyahu devrait être aussi un signal en direction de l'Union européenne. On se rappelle que le sommet UE-Israël, qui devait se tenir à la mi-mai, a été reporté à début juin à la demande du gouvernement israélien. Il serait souhaitable et sans doute utile, à cette occasion, que Bruxelles fasse preuve au moins d'autant de fermeté que Washington. M. A. Boumendil