La célébration du 47e anniversaires de la fête de l'Indépendance a ouvert la plaie pour ces deux veuves de chahid, venues à notre bureau régional pour crier leur désarroi. “On fête l'indépendance, alors que les héritiers des artisans de cette gloire vivent dans des conditions dramatiques”, s'exclame M'barka, 83 ans, veuve de chahid. Les deux veuves se disent scandalisés par le comportement des autorités à tous les niveaux. “Nous sommes bonnes uniquement pour les festivités officielles.” B. Dahbia et T. M'barka sont souvent ensemble car beaucoup de choses les unissent. Selon leurs déclarations, leur situation n'a pas changé d'un iota entre la période coloniale et celle d'aujourd'hui. “Durant la guerre de Libération, nous avons été déportées et aujourd'hui nous sommes des vagabondes. Nous passons notre temps à y aller d'une maison à une autre. Parfois chez nos filles ou chez des amis”, s'indignent-elles avec amertume. En plus d'être veuves, leur maisons avaient été brûlées par l'armée française en 1958 et 59. Pour Dahbia, coutumes obligent, elle avait rejoint le domicile parental. Elle avait été prise en charge par son père avec qui elle a vécu jusqu'à 1985 date de son décès. Comme le malheur n'arrive jamais seul, son frère l'oblige à quitter le domicile familial. Actuellement, elle vit chez ses trois filles mariées. Pour M'barka, sa situation n'est pas reluisante. Elle avait élu refuge chez son frère après que son domicile eut été incendié en 1959. En 1971, elle quitte son domicile et s'installe avec son fils. La famille devient nombreuse, plus de 11 personnes, dont 3 asthmatiques, dans un logement exiguë. Elle se retrouve contrainte à faire la navette entre les domiciles de ses 5 filles mariées. Ces deux veuves ne cherchent qu'à avoir un toit décent. “Un F3 qui les ressemble serait le bienvenu.” Elles sont prêtes à terminer leur vie ensembles. “Nous avons enduré les mêmes misères, nous sommes prêtes à vivre sous le même toit. À la fin de nos jours, l'Etat peut le récupérer et l'attribuer aux nécessiteux”, diront-elles. Plusieurs démarches ont été effectuées auprès des autorités. Des lettres ont été adressées à la présidence de la République, au ministère des Moudjahidine, à celui de la Solidarité et bien sûr au niveau local en passant par l'APC, la daïra et le wali. Selon leur déclaration, pour la première fois de leur vie, elles furent reçues par le wali de Bouira au mois de septembre 2008 qui leur a promis de les loger. “Il était très sensible à nos doléances. Il nous a promis un toit où nous allions égorger le mouton de l'Aïd El-Adha de l'année 2008. À ce jour, nous attendons ce sésame.”