Disposant, durant l'ère George Bush, de la liberté totale lors des interrogatoires des “ennemis combattants”, les membres d'Al-Qaïda capturés, les agents de la CIA ayant violé le droit humanitaire risquent d'être rattrapés par l'impunité si l'enquête que diligentera le département américain de la justice aboutira à des résultats concrets. Ayant eu recours à des méthodes violentes, s'apparentant à la torture, même si le mot n'est pas cité jusque-là lors des interrogatoires antiterroristes, les agents de la CIA concernés peuvent se retrouver devant les juges. Les enquêtes que mènera le département américain de la Justice seront concluantes. En effet, un procureur a été nommé par le ministre américain de la Justice pour enquêter sur les méthodes violentes utilisées par la CIA dans le cadre des interrogatoires antiterroristes. C'est à John Durham, un procureur nommé par son prédécesseur en 2008 pour enquêter sur la destruction par la CIA de 92 vidéos d'interrogatoires, qu'a été confiée l'enquête préliminaire. Le ministre américain de la Justice, Eric Holder, a affirmé dans un communiqué : “Les informations que j'ai en ma possession justifient l'ouverture d'une enquête préliminaire pour savoir si les lois fédérales ont été violées dans le cadre des interrogatoires de certains détenus hors des Etats-Unis.” John Durham devra faire des recommandations quant à l'éventuelle nécessité de mener une “investigation complète”, sans pour autant présumer que “des poursuites suivront automatiquement”, a assuré le ministre. Bien que le président américain, Barack Obama, s'est toujours dit opposé à des poursuites judiciaires contre les politiques antiterroristes pratiquées sous l'Administration Bush, estimant qu'il valait mieux “aller de l'avant que regarder en arrière”, son ministre de la Justice a assuré que la “décision finale de savoir si quelqu'un a violé la loi est prise en toute indépendance”. La lecture d'un rapport de l'inspecteur général de la CIA, datant de 2004 et dont des extraits ont été rendus publics lundi, a convaincu le ministre de rouvrir plusieurs dossiers de violence contre des détenus que ses prédécesseurs avaient classés. Ce document détaille comment des agents de la CIA ont menacé le cerveau autorevendiqué des attentats du 11 Septembre, Khaled Cheikh Mohammed, de tuer ses enfants s'il ne parlait pas. Il est également rapporté comment le principal suspect dans l'attentat contre le navire américain USS Cole en 2000, Abdel Rahim al-Nachiri, a été menacé d'un revolver puis d'une perceuse électrique en marche avant que les interrogateurs lui laissent entendre qu'ils pourraient violer sa mère en sa présence. Le rapport en question indique que des pastiches d'exécution sommaire figuraient également dans l'éventail des méthodes d'interrogatoire, unanimement condamnées, lundi, par les organisations de défense des droits de l'Homme. Tout ceci a amené l'Inspecteur général à conclure que “des techniques d'interrogation et de détention non autorisées, improvisées et illégales ont été utilisées”, tout en précisant que “des agents sont au courant de méthodes d'interrogatoire hors ou au-delà des limites fixées” par les textes réglementaires rédigées par le ministère de la Justice. Tout ceci n'est guère apprécié par le directeur de la CIA, Leon Panetta, nommé par M. Obama dès son arrivée à la Maison-Blanche, qui a estimé que les faits relatés étaient de l'“histoire ancienne”.