Avec la mort, samedi dernier, du grand cheikh Amokrane Agawa, c'est une véritable bibliothèque en matière de chants liturgiques et de poésie religieuse kabyle (dikr) qui s'en va en ce mois sacré. Sa perte est qualifiée d'immense par les nombreux amateurs et surtout amatrices de ce chant que Amokrane Agawa avait l'habitude de diriger de sa haute voix “émergente” avec des groupes de répétiteurs (femmes et hommes), qu'il formait et qui l'entouraient, notamment lors des décès intervenant dans les villages. Ce type de chant atténuait sensiblement la douleur et consolait en quelque sorte les membres des familles où le décès a lieu. Cheikh Amokrane Agawa, de son vrai nom Ouali Mohand-Amokrane, est né en 1929 à Aït Atelli (Larbaâ Nath Iraten), où il a été inhumé avant-hier par une foule nombreuse composée de centaines de personnes venues de diverses régions du pays et de la wilaya, notamment des chanteurs, ainsi que des autorités locales et des responsables du secteur de la culture dans la wilaya de Tizi Ouzou. “Agawa” est le surnom diminutif par lequel l'appelaient ses anciens camarades et collègues, animateurs à la radio kabyle de Béjaïa durant la guerre d'indépendance. Il se rapportait à la région d'origine du chanteur, Igawawen, aux Aït Irathen, en Grande-Kabylie d'alors. L'auteur de “Larbaâ Nath Iraten, a-tin u-mi zin s-ssur” (Ô Larbaâ Nath Iraten, cerclée de mur), dans laquelle il exprimait sa nostalgie et son ardent désir de la revoir, laisse en héritage un riche répertoire de chants religieux et aussi de société.