Il s'agit des manifestations les plus sanglantes depuis celles ayant suivi la réélection fortement contestée du président iranien et qui se sont soldées par plusieurs morts et des milliers d'arrestations. Des manifestations de l'opposition au régime ont été violemment réprimées samedi et dimanche en Iran, occasionnant au moins quinze morts, chiffre confirmé par la télévision d'Etat sur la foi d'informations données par le ministère des Renseignements. Cinq des victimes auraient été tuées par “des groupes terroristes” et plus de dix autres appartiendraient à “des groupes antirévolutionnaires”, affirment les sources officielles pour lesquelles “groupes terroristes” et “groupes antirévolutionnaires” désignent en réalité les manifestants opposés au régime de Téhéran de plus en plus contesté. Parmi les victimes figure, en tout cas, un neveu du principal adversaire d'Ahmadinejad à l'élection présidentielle de juin dernier, Mirhossein Moussavi. Il s'agit des manifestations les plus sanglantes depuis celles ayant suivi la réélection fortement contestée du président iranien et qui se sont soldées par plusieurs morts et des milliers d'arrestations. Des dizaines de milliers de manifestants, profitant des festivités de l'Achoura pour prendre à défaut la vigilance de la police et des bassidjis, ont envahi différents points de la grande avenue Enghelab qui traverse Téhéran d'est en ouest et longue d'une dizaine de kilomètres. Les rassemblements ont donné lieu à des scènes très violentes, et des vidéos montrant de jeunes manifestants s'attaquant à un commissariat ont été mises en ligne sur internet. D'autres montrent des manifestants brûlant des poubelles et divers objets pour ériger des barricades de fortune, afin de retarder l'avancée des forces de police et de la milice religieuse. Des membres de cette milice, les bassidjis, ont investi les locaux d'une agence de presse iranienne où des manifestants ont trouvé refuge. Ils y ont fait preuve d'une grande violence et ont notamment gravement blessé un journaliste. Plusieurs arrestations ont été opérées et le chiffre de 300 a été officiellement annoncé. Pour le président Mahmoud Ahmadinejad et son régime, les manifestants ne font qu'obéir à la presse étrangère et sont manipulés par des officines. Aussi ont-ils pris soin de verrouiller le dispositif qui a permis à l'opposition de mettre en difficulté le régime des mollahs en juin dernier. Plusieurs mesures restrictives ont été édictées et mises en œuvre pour réduire l'impact de manifestations hostiles au régime et qui prennent de plus en plus les contours et l'ampleur d'une insurrection populaire. Des reporters étrangers dûment accrédités ne sont pas autorisés à couvrir les événements, le réseau de téléphone portable a été mis en berne dans la capitale et le débit de l'internet a été fortement restreint pour empêcher la mise en ligne instantanée d'images compromettantes pour le régime. Ni la violence des services du régime ni la chape de plomb dont il veut couvrir le pays n'arrivent cependant à décourager une rue plus déterminée que jamais. “Mort au dictateur !” “Nous nous battrons, nous mourrons, mais nous reprendrons l'Iran !” “C'est le mois du sang et les bassidjis vont tomber !” ont scandé les émeutiers alors que les forces de répression, dépassées, tiraient à balles réelles, selon des témoignages difficilement vérifiables dans les circonstances actuelles. Depuis les obsèques à Qom du grand ayatollah dissident Hossein Ali Montazeri, marquées par de violents affrontements, l'opposition au régime n'a cessé de se manifester, la mobilisation et la radicalisation montant crescendo. Tantôt c'est Téhéran, tantôt c'est telle ou telle province qui s'enflamme. La mort de plusieurs manifestants et, surtout, l'assassinat par balle du neveu de Moussavi marquent un tournant dans le bras de fer sanglant entre l'opposition au régime. Et de l'avis de nombreux observateurs au fait de la chose iranienne, cela présage de la chute inéluctable d'un régime totalitaire qui a pris en otage tout un peuple depuis trente ans.