Ce kidnapping intervient au moment où le GSPC multiplie les faux barrages et les attaques contre les civils. Soixante-quatre millions d'euros. Quel toupet ! Passés les razzias et les rackets dans les villages kabyles et les routes du littoral, voilà donc que Hattab multiplie la mise. Si tant est que le GSPC soit le véritable auteur de l'enlèvement des 32 touristes étrangers (jusqu'à l'heure, il n'y a aucune revendication écrite, encore moins authentifiée, de la main d'Abou Hamza), force est de reconnaître que l'organisation de sinistre mémoire signe là un coup d'envergure inédite. Un coup, pour tout dire, inespéré. La montée au créneau du GSPC, on l'aura remarqué, intervient à un moment où, sur le front interne, les hordes de la Jamaâ Salafia multiplient faux barrages et attaques contre les civils. Toutefois, l'opération la plus spectaculaire (et la plus sanguinaire), convient-il de le souligner, est sans doute celle perpétrée contre un convoi militaire près de Biskra, le 5 janvier dernier, et qui avait fait 43 morts parmi les éléments de l'ANP. Tout récemment encore, le GSPC s'est distingué par une série de faux barrages et d'embuscades en Kabylie, qui se solderont, entre autres, par l'assassinat du député FLN de Maâtkas, Rabah Radja. Si le sigle du GSPC a marqué de son sceau macabre cette affaire, il le doit surtout, à en croire des informations concordantes, à la “prouesse” d'un coupeur de routes, érigé en légende vivante : le “scieur” Mokhtar Mohamed Belmokhtar, alias Khaled Abou El-Abbes, alias Belaouar (le borgne). Tout le monde soupçonne, en effet, ce contrebandier de grands ergs, originaire de Ghardaïa, d'être le véritable artisan de l'opération. Du reste, il est aisé de remarquer qu'un enlèvement d'un tel “professionnalisme” n'aurait pu être conclu sans avoir sous-traité avec les caïds du désert, qu'ils soient terroristes activistes ou trafiquants mercenaires, monnayant leurs services. Pour rappel, le GSPC a été créé officiellement le 14 septembre 1998. Toutefois, son existence sur le terrain remonte à 1996 (lire Le Matin du 16 au 19 septembre 2002, le dossier de Mohamed Issami, consacré au GSPC). Né le 14 décembre 1967 à Rouiba, le fondateur du groupe, Hassan Hattab, a intégré la mouvance armée en 1993, au sein du MEI (Mouvement pour l'Etat islamique) de Abdelkader Chebouti et Saïd Makhloufi avant de rallier le GIA dont il devient “émir” de la Zone II (la Kabylie). Il entre en dissidence du temps de Djamel Zitouni dont il désavoue les méthodes et crée — avec, entre autres, Abdelaziz Abi, dit Okacha Le Para, et Amari Saïfi dit Abderrezak Le Para — le Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC). C'est tout naturellement que Hattab installe ses quartiers dans la zone dont il détenait le contrôle sous le GIA, dans les monts de Sid-Ali Bouneb. Le GSPC figure depuis sur la liste des organisations classées terroristes par le FBI et qui sont dans le collimateur de l'Administration américaine suite aux attentats du 11 septembre 2001. L'affiliation du GSPC au réseau Al-Qaïda a été établie à travers un émissaire de Ben Laden, d'origine afghano-pakistanaise, qui a été éliminé l'an dernier à Batna. R. N.