Au moins, 300 personnes ont péri dans les combats interreligieux à Jos, une ville dans le centre du Nigeria, une sorte de frontière entre le Nord musulman et le Sud chrétien. Le calme a été rétabli par l'armée fédérale, mais il est précaire. Jos a connu d'autres flambées et, en 2008, des incidents de même nature ont fait au moins 200 morts. En 2009, l'armée fédérale a dû intervenir de nouveau pour arrêter la progression d'un groupuscule islamiste donné pour proche d'El-Qaïda. La reprise de la fièvre interreligieuse a repris de plus bel avec l'absence prolongée du président nigérian Umaru Yar'Adua, enfonce le pays dans la paralysie institutionnelle et, dans une volonté de mettre fin à cette crise institutionnelle, la Haute Cour fédérale étudie trois requêtes visant à transférer officiellement le pouvoir exécutif au vice-président, Goodluck Jonathan, de manière temporaire. Le vice-président serait ainsi président par intérim en attendant le retour du président Yar'Adua, s'il revient d'Arabie saoudite où il est soigné depuis le 23 novembre pour des complications cardiaques. La crise institutionnelle au Nigeria pose de multiples problèmes, à la fois internes et internationaux. Le plus grand pays africain en termes de population, 154 millions, ne peut se permettre d'avoir un exécutif absent, d'autant que c'est une mosaïque avec une dizaine d'Etats qui appliquent la charia sur la trentaine d'Etats qui constituent le fédération. L'organisation de défense des droits de l'homme Human Rights Watch estime que plus de 13 500 personnes ont été tuées dans des violences entre communautés depuis la fin du régime militaire en 1999 au Nigeria. Ce pays est régulièrement secoué par des vagues de violences entre chrétiens et musulmans. Les islamistes radicaux souhaitent instaurer un Etat “islamique pur” dans le nord du pays. À cela il faut ajouter les guérillas en action dans les régions pétrolières, notamment dans le Delta où le pouvoir central s'est vu contraint de signer avec la rébellion une armistice en attendant d'établir un plan de partage plus équitable de l'or noir. À l'heure où les conflits interethniques ont repris une tournure violente, la décision d'attribuer la présidence par intérim au vice-président, chrétien du Sud, amène son lot d'inquiétudes. Dans une perspective plus internationale, l'immobilisme de l'exécutif nigérian empêche le bon fonctionnement de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), que le Nigeria préside à l'heure actuelle. De plus, il est, depuis le 1er janvier, un membre non permanent du Conseil de sécurité des Nations unies. En plus de cela, le Nigeria a été inscrit sur la liste américaine des quatorze pays nécessitant des mesures de sécurité plus strictes. Il n'est pas évident que l'investiture officielle de Goodluck Jonathan en tant que président par intérim, si elle intervient, calme la crise. Umaru Yar'Adua avait accédé à la présidence en avril 2007 suite à des élections entachées de fraudes et condamnées par les observateurs internationaux.