Même si la récolte 2009 s'annonce bonne, les exportations de ce produit ne vont par représenter un gros montant en devises ! Le tour de la question est vite fait, et la farce vite dénoncée. Celle des prétendus efforts pour l'exportation hors hydrocarbures, ou plutôt : le discours sur l'exportation de la datte n'est qu'un justificatif indirect à l'orientation résolument hydrocarbures. Pour le court terme, une perte de temps, d'argent et d'énergie : une quarantaine d'exportateurs dont une demi-douzaine plus ou moins actifs, des recettes d'exportation en baisse sur le long terme et en baisse relative du tonnage exporté par rapport à la production. La plantation de nouvelles palmeraies irriguées au goutte-à-goutte a permis l'entrée en production précoce de jeunes plantations (5 ans au lieu de 7 habituellement). Grâce au Plan de développement de l'agriculture (Pnda), il faut le remarquer, la palmeraie algérienne a augmenté de 50%. “Mais ce n'est pas pour autant qu'il faudrait s'attendre à exporter plus. Ce n'est pas automatique, voyez les chiffres”, se désole Bennini, directeur général de l'Agence nationale pour la promotion du commerce extérieur (Algex). 10 000 tonnes exportées pour une valeur de 20 millions de dollars en 2008 ! Effectivement, dans l'année 2003 (10 200 tonnes de dattes exportées pour une valeur financière de l'ordre de 16,45 millions de dollars de recettes), en 2004 (un peu moins de 8 000 tonnes pour 14,4 millions de dollars), en 2005 (10 860 t pour 18,5 millions de dollars), en 2006 (12 330 t pour 20 millions de dollars), en 2007 (13 350 t pour 23 millions de dollars), et enfin pour 2008, un niveau de 10 000 t pour des recettes de 20 millions de dollars. Ceci en quantités globales, toutes variétés confondues, où la Deglet Nour se taille traditionnellement la plus grosse partie, 8 800 t pour 17,8 millions de dollars de recettes en 2008, le reste se répartissant entre “autres dattes fraîches”, 1 000 t pour 2 millions de dollars de recettes, et les dattes sèches, 230 t pour 160 000 dollars, toujours en 2008. Des clopinettes. 10 000 00 tonnes en tout pour tout en 2008, et 13 000 dans le meilleur des cas en 2007, 30 000 au cours des premières années de l'Indépendance, quelle est la probabilité d'atteindre l'objectif d'exporter 43 000 t pour 2009 et 60 000 t en 2013 ? M. Bennini : “On peut toujours rêver, je n'en vois pas pour l'immédiat, pour le court terme. Il faudrait que tout le monde, à tous les niveaux, jusque les plus hauts, se mette à penser, à s'organiser, à s'équiper et à agir en termes d'exportation avant le stade même de la production, jusqu'au supermarché du consommateur final à l'étranger. - Faut-il d'autres lois, des règlements, des installations spécifiques ? Il y en a suffisamment. Ce qu'il faut, c'est que les hommes s'y mettent.” Une question non posée à M. Bennini, pour respecter sa discrétion : “Aux plus hauts niveaux de l'Etat ?” Ailleurs, dans des pays moins portés aux dépenses excessives de coûteuses importations, les responsables des organismes analogues à Algex, ceux responsables de la promotion des exportations, ont accès direct avec les plus hauts niveaux de l'Etat, ne serait-ce que pour débloquer un dossier, ou bien ont carte blanche vis-à-vis de toutes les autorités pour débloquer un dossier ou une cargaison destinée à l'exportation et en souffrance pour une sordide raison ou une autre. Question : “Il y a tout de même une activité d'exportation ? Si vous voulez, mais ce serait plutôt une activité héritée du temps de la colonisation, et du maintien de ces réseaux après l'Indépendance. Rien à voir avec cette dynamique qu'on veut insuffler aux exportations hors hydrocarbures. Des exportateurs rentiers, en quelque sorte ? - C'est bien ça, répond-il. Commerçants traditionnels, clientèle traditionnelle, petites recettes traditionnelles. On ne voit rien là dedans qui ressemble à de la recherche de nouveaux marchés ou même d'augmenter les quantités exportées. On me dit que la production est bonne pour cette saison 2009. Mais en termes d'exportation, pardon…” Il y a, en fait, un problème de taille critique, de quantités critiques pour l'exportation de la datte. Les quantités exportées sont de loin inférieures aux capacités de transport et d'acheminement et parce que la datte est un produit périssable, il faudrait tout un réseau coûteux spécialement équipé allant du producteur jusqu'au navire ou l'avion pour, au final, une vingtaine de millions de dollars de recettes d'exportation en moyenne ces dernières années. Un investissement non rentable ? Pour la seule datte, certes. Mais pour tous les fruits et légumes frais et bio en plus (vins, agrumes, pommes de terre, fruits de montagne, huile d'olive, et même… lait), la question mérite que l'on fasse quelques calculs. “Si, si, c'est possible, il y a de la production, et il y a des infrastructures, des ports… Il faut de la volonté, je vous dis”, rectifie M. Bennini. Une seule indication : la production de dattes doit passer de 600 000 t prévue pour 2009 à près de 830 000 t en 2013. Parmi les chiffres d'exportation, la moyenne de recettes va de 1 600 dollars le kg de Deglet Nour en 2006 (1,6 dollar le kg) contre 2 000 en 2008. Et la production actuelle est évaluée à près de 550 000 tonnes, dont 244 000 t pour la seule Deglet Nour, soit près de 500 millions de dollars en potentiel de recettes et un objectif bien lointain de120 millions de dollars pour 2013. Ce n'est peut-être pas beaucoup, mais il n'y a pas de petits profits. “Et ça crée toujours de l'emploi”, ajoute M. Bennini. Dernier coup bas en date, qui relativise ces espoirs, le salon de la datte prévu ces dernières semaines, a été pour une deuxième fois reporté, faute de moyens… et d'intérêt de la part de la gouvernance.