En matière de hadith, la mère des croyants demeure une référence incontournable par la qualité et le nombre de hadiths rapportés de cette dame de l'islam qui avait consacré sa longue vie, en approchant les 70 ans, à l'enseignement et à la propagation de la sunna, porte principale de l'interprétation du texte sacré, le Coran. Les grands réformateurs En dépit des efforts de continuation menés par la suite, par exemple par Mouloud Kacim, Malek Bennabi, le Dr Aroua et d'autres durant plus de trois décennies, s'étaient installées chez nous des idées importées, non pas favorisant la thèse des seconds cités plus haut dans l'interprétation du hadith et partant du Coran, mais, malheureusement, des premiers avec toutes les implications. Que de discours enflammés n'avons-nous pas entendus ! Que de fatwas fabriquées autorisant le vol, le viol, la destruction du pays, le sang de citoyens innocents paisibles, de savants honnêtes et de femmes sans défense! Leur incursion préparée en douce et dans la profondeur de la société a surpris tout le monde. Avec le recul, on peut maintenant déceler les éléments ayant favorisé leur naissance et leur développement. C'est le foisonnement et la propagation de hadiths détournés de leur sens véritable et voulu, l'éclipse de hadiths authentiques et leur remplacement par des hadiths douteux permettant d'interpréter et d'orienter le texte coranique à leur guise, qui étaient à l'origine de ce marasme. Les maîtres à penser dans le premier cas ont réussi leur coup. Pour un temps. Les savants les plus éclairés, les plus ouverts, les plus sages et les plus tolérants sont écartés et dans beaucoup de cas insultés ou assassinés sans vergogne. Le suivisme est partout. L'aveuglement aussi. Le prix payé a été élevé. La leçon doit être retenue. Toute crise a ses origines. La crise qui avait engendré la violence et le terrorisme trouvent les siennes d'abord dans l'interprétation du hadith et l'orientation qui s'en suit. Alors que le projet de société défendu par les seconds était basé sur le mariage et l'harmonie entre la modernité et l'authenticité, les premiers s'en tenaient à un autre discours et à une autre philosophie, celle du suivisme et de l'absence de l'effort, forts de l'endoctrinement et de la simplicité trompeuse dans l'interprétation du hadith et de la faiblesse de proposition et de conviction. Des courants étranges et des idées folles ont été répandus en trouvant un terrain propice à leur développement. La grande maison du hadith La question qui se pose est quel hadith nous faut-il après cette débâcle qui nous a renvoyés des décades en arrière ? Ne rien faire c'est continuer à favoriser le retour en puissance de ce courant qui croit sauver la société et l'Islam, alors qu'il travaille contre eux. Si on doit bouger, la question qui se pose est qu'est-ce qu'il y a lieu de faire pour occuper le vide et permettre de jeter les bases d'un développement durable et enraciné ? Le terrorisme est certes combattu par son propre langage, c'est-à-dire la persévérance, la ruse et les armes. Mais les courants de l'immobilisme et du suivisme demandent des actions et des pensées beaucoup plus profondes, des idées et une philosophie claire allant au fond de la problématique : comment réformer l'enseignement du hadith et permettre une meilleure interprétation du texte divin ? Sur ce plan, l'exemple de notre mère Aïcha qui avait consacré sa vie à cet enseignement est là pour nous éclairer. Il faut fonder la grande maison du hadith qui portera son nom ou ceux qui avaient milité en leur temps pour que le meilleur projet de société pour l'Algérie se concrétise et couper l'herbe sous les pieds à ceux qui nous envoient leurs idées de l'extérieur pour faire de notre pays un terrain d'expérience et un champ de bataille à leurs fantaisies. Si comme on l'a vu, le sang de Fatma Zohra coule en chacun de nous, le legs spirituel de Aïcha doit toucher également chacun de nous pour notre équilibre et notre promotion. Elle n'est pas la première dame universelle pour rien. Que Dieu les agrée ! S. B. E-mail : [email protected] Le hadith est, en effet, la deuxième base après le Coran lui-même qui autorise à comprendre, expliquer et interpréter les versets. Viennent ensuite la connaissance de la langue et les dires des savants autorisés. En dernier lieu, les portes de l'Ijtihad sont permises aux savants ayant une spécialité et une expérience dans le domaine. Sans cela pas de crédibilité et pas de reconnaissance d'effort d'interprétation. Ce sont des limites mises par le Prophète (P. et S. sur lui). Dans les faits, les choses ne se passent pas toujours ainsi, d'où les risques de déviation que ce soit pour le rétrécissement ou l'excès d'interprétation et surtout de blocage. Se posent aussi les problèmes d'adaptation des textes selon le contexte et l'époque pour beaucoup de cas qui partagent les savants entre ceux qui défendent les imitations à la lettre et se plaisent dans l'immobilisme et ceux qui militent pour une approche différente et prônent l'innovation dans un cadre approprié tout en restant dans le cadre légal. Les luttes à travers l'histoire musulmane, pour s'approprier les premiers rôles dans ce domaine, sont peut-être plus pernicieuses et plus notables que celles engagées pour l'accès au pouvoir et s'y maintenir. Les périodes phares Il a été prouvé chaque fois que les premiers prennent le dessus sur les seconds, s'en suivit une longue période de ralentissement et de décadence. Il a été aussi constaté l'inverse lorsque les seconds arrivent à émerger et faire entendre leur voix. Les périodes phares de la civilisation musulmane correspondent, en effet, avec l'apparition de grands savants et exégètes réformateurs qui secouent le cocotier pour un temps avant que les autres ne viennent mettre fin à cet élan et dicter leurs propres règles et préparer les conditions de la rechute vers l'abîme de la société, de l'individu et partant du pouvoir en place. Les dégâts sont souvent irréparables. La moindre faiblesse est exploitée par l'ennemi extérieur qui envahit la terre musulmane affaiblie sur le plan spirituel et sur le plan matériel. Vient ensuite une longue période de déculturation et de domination, difficile à repousser, d'où l'apparition de luttes salutaires pour la récupération de l'identité et la libération. Dans notre histoire récente, on cite celle du grand réformateur Abdelhamid ben Badis qui avait jeté les jalons pour un long réveil. Son action de récupération identitaire (islamité-arabité-amazighité) avait été d'un concours décisif dans la préparation morale pour le déclenchement de la guerre d'indépendance.