Un cachet par-ci, un sirop par-là… On ne jure que par lui et on lui prête toutes les vertus. Au moindre petit bobo, on se précipite à la pharmacie ! Ce qui n'a nullement échappé à l'attention des laboratoires et autres industriels du médicament. La manne financière est tellement séduisante que les professionnels de la pilule rivalisent d'ingéniosité, parfois maléfique, pour mieux nous piquer notre argent. D'ailleurs, ils ne se sont pas gênés pour nous inventer des pandémies à dimension planétaire, rien que pour vendre plus. La grippe du virus H1N1 est encore dans toutes les mémoires. Il est clair pour beaucoup d'experts internationaux que “nous avons été collectivement victimes de la corruption d'un organisme international, en l'occurrence l'OMS, qui n'a pas fait son job pour des motifs fondamentalement commerciaux.” C'est en tout cas l'avis du Dr Fernand Turcotte. Il est l'un des cofondateurs du département de médecine sociale et préventive de l'université Laval. Il y a enseigné durant plus de 30 ans et demeure actif dans le domaine de la Santé publique. La chance ne sourit qu'aux audacieux ! L'Algérie, au même titre que le reste du monde subit le diktat de ces lobbies du médicament. Mais, devrions-nous endurer une politique pharmaceutique internationale, sans réagir ? Eh bien, il semble que du côté d'El Madania, on a opté pour l'indépendance. Une sorte de souveraineté pharmaceutique qui puisera ses ressources au sein même des potentialités nationales et de partenaires étrangers désireux de s'implanter en Algérie. Cette politique constituera-t-elle l'antidote nécessaire, à même de garnir en produits sensibles, nos officines et autres pharmacies des hôpitaux, parmi les plus reculés du pays ? Le temps nous le dira. Mais, il faut bien commencer un jour ! Ne dit on pas : “La chance ne sourit qu'aux audacieux ?” Le nouveau train de mesures pour produire localement sera mis sur les rails, doucement mais sûrement, pour atteindre sa vitesse de croisière vers 2013. Deux ans après son départ prévu pour 2011. Dans un premier temps, on tentera de réduire la facture du médicament. En 2009, les importations ont coûté près de 2 milliards de dollars. La santé passe incontestablement par le médicament. Et cela, le fringant ministre de la Santé et de surcroit médecin de formation, il le sait ! On ose aussi espérer que la roq'ia, inquiétant phénomène de société, ne soit pas perçue comme un palliatif à la cherté du médicament. Gageons qu'elle ne coûte que le prix d'une eau minérale et une pièce de monnaie pour le raqi. La misère a cette tendance à nous dévier du bon sens ! Générique de fin ? Le véritable remède, s'appelle “générique''. Le médicament princeps reste bien au-dessus des moyens de l'Algérien lambda. Notre pouvoir d'achat est tel qu'avant de se faire servir une ordonnance, le client a besoin d'exiger un “devis'', comme s'il devait entreprendre des travaux onéreux. Mais, là aussi, il y a un colossal travail à mener sur le plan psychologique. Et pour l'atteindre, ça passe par le génie de la communication et les merveilles du marketing. Les médicaments génériques contiennent le même principe actif que les médicaments de référence, seul l'excipient change. Cela, tout le monde le sait. Mais, dès qu'il s'agit de changer sa marque habituelle par un générique, ça ne passe pas. Les menus détails, comme la forme, la couleur, etc., du médicament, sont perçus par le malade comme d'importants points de repère. C'est sa canne blanche. “Mal nommer les choses, c'est ajouter au malheur du monde”, dixit Albert Camus. Placebo ou Nocebo ? Il y a aussi d'autres facteurs psychosomatiques. C'est semble t-il, lié soit à un autre facteur survenu en même temps, par hasard, soit à une certaine appréhension, consciente ou non, provoquant un effet “nocebo” le contraire de l'effet “placebo”. Ce qui arrive souvent. Finalement, si la “démocratisation” du médicament générique n'est pas judicieusement accompagnée d'un mix, “communication-marketing” à travers une large compagne de vulgarisation, d'abord, puis de sensibilisation, par la suite, le résultat ne saurait être profitable. Ni aux patients ni à la politique nationale du médicament. Comment en effet convaincre un malade qu'un produit générique acheté beaucoup moins cher que l'habituel princeps, puisse le soulager de son mal, de la même manière ? Pourtant, il est vrai que le générique est aussi efficace, mais ce rôle de mise en confiance, incombe au médecin d'abord. Le prescripteur. Seulement, le toubib, lorsqu'il est installé à son compte et régulièrement démarché par des laboratoires internationaux en tant que “cible économique”, il finit par faire son choix et élire son camp. Ce qui peut être de bonne guerre ! Et ce concept est aussi valable pour les officines. La nature a horreur du vide. Donc, encore une fois, il ne suffit pas d'avoir une politique, mais les moyens de sa politique. Aujourd'hui, la volonté est là… le professionnalisme devra faire le reste. Sans quoi, la pilule ne passera pas ! R. L. [email protected]