Après Air Algérie, les cimenteries, Cosider et Saidal, c'est au tour de l'association AXA-BEA et probablement bientôt de Tonic emballage de bénéficier des financements du Fonds national d'investissement (FNI). Une liste qui devrait continuer à s'allonger très rapidement en conférant à cette institution stratégique le statut d'un véritable bras financier de l'Etat algérien. En dépit de son poids croissant dans le financement de beaucoup d'entreprises stratégiques, les activités du FNI restent entourées d'une discrétion qui confine à la confidentialité. Nous avons cherché en vain la trace d'un communiqué officiel émanant de cette institution en dehors de celui qui annonçait sa création voici plus de 20 mois. Pas trace non plus d'un quelconque site Internet ou du moindre bulletin d'information. La communication ne fait manifestement pas partie des priorités de l'institution dirigée par Sadek Alilat. La collecte des informations sur le FNI s'effectue donc grâce aux informations glanées auprès de ses partenaires ainsi que des indiscrétions relayées par la presse. Avec AXA et Tonic La montée en puissance progressive du FNI est illustrée par des annonces, intervenues au cours des dernières semaines, qui l'ont projeté sur le devant de la scène économique nationale. C'est ainsi qu'on a appris successivement, depuis le début du mois de novembre, la prise de participation du FNI, aux côtés de la BEA et du Groupe AXA dans l'accord de partenariat qui permettra au numéro un mondial de l'assurance de s'installer en Algérie. Il s'agit de la première prise de participation du FNI dans le capital d'un projet d'investissement réalisé en partenariat avec une entreprise étrangère. Le fonds public disposera d'une minorité de blocage de 30% dans la nouvelle société qui devrait être opérationnelle au début 2011. Quelques jours plus tard, la presse nationale, faisant état d'indiscrétions, évoquait l'annonce prochaine d'un plan de sauvetage du papetier privé Tonic emballage en situation de faillite depuis 2009. L'intervention du FNI permettrait tout d'abord de faire tourner à nouveau les machines d'un complexe de création récente et qui employait plus de 4 000 personnes. Elle aurait en outre l'avantage de soulager la BADR, qui a déjà injecté, au mépris des dispositions prudentielles légales, le montant colossal de 65 milliards de DA (650 millions d'euros) dans l'entreprise et qui n'est plus, aujourd'hui, en mesure de financer son redémarrage. Le secteur public d'abord Ces dernières interventions, évoquées par les médias nationaux, contrastent avec la discrétion qui a caractérisé les premières activités du FNI qui sont pourtant loin d'être négligeables et ont déjà entraîné la mobilisation de près de 2 milliards d'euros. C'est ainsi que l'institution a pris dès 2009, une part importante au financement de plusieurs projets pétrochimiques avant de contribuer, surtout depuis le début de l'année en cours, aux programmes d'investissements de nombreuses entreprises publiques. Parmi ces dernières, les interventions les plus importantes du FNI ont consisté à accompagner la démarche initiée par le gouvernement en vue de restructurer et de relancer le secteur public. Elles se sont traduites principalement par l'octroi d'une série de prêts à long terme d'un montant très important. Les premiers bénéficiaires ont été les cimentiers algériens qui, par l'intermédiaire du GICA, ont obtenu voici près d'un an un crédit de plus de 64 milliards de DA (640 millions d'euros). La contribution au plan de croissance de Cosider, première entreprise de travaux publics du pays a mobilisé 26 milliards de DA (260 millions d'euros). Encore plus récemment, l'ambitieux programme de développement du champion national de l'industrie pharmaceutique, Saidal doit se traduire par des prêts à long terme estimés à plus de 16 milliards de DA (160 millions d'euros). La liste est loin d'être close. Elle est appelée à s'allonger au fur et à mesure que le Conseil des participations de l'Etat approuvera les plans de développement des groupes industriels dont la création est prévue par les pouvoirs publics. Des conditions de financement très avantageuses En dehors des prises de participation dans le capital de certaines entreprises qui restent pour l'instant très peu nombreuses, les financements attribués par le FNI sont essentiellement constitués de crédits à long terme accordés à des conditions qui apparaissent comme extrêmement avantageuses pour leurs bénéficiaires. C'est ainsi qu'on a appris, grâce à certains responsables économiques plus diserts que la plupart de leurs collègues, comme par exemple le P-DG D'Air Algérie, Abdelouahid Bouadellah, que la compagnie nationale a obtenu,dans le cadre d'une des premières interventions du FNI, pour le renouvellement de sa flotte un crédit remboursable sur une durée de 25 ans et assorti du très modeste taux d'intérêt de 2,5%. Les conditions accordées à Saidal sont à peine moins intéressantes avec un crédit de 20 ans plus 4 ans de différé et un taux d'intérêt de 4%. Futur instrument du droit de préemption de l'Etat ? La montée en puissance du FNI pourrait s'accélérer au cours des mois à venir dans l'hypothèse de la mise en œuvre du droit de préemption de l'Etat créé par la loi de finances complémentaire 2009 et dont le Fonds d'investissement apparaît comme l'instrument le plus approprié. Cette mise en œuvre semble notamment de plus en plus probable dans le dossier Djezzy à propos duquel les pouvoirs publics algériens ont encore récemment réaffirmé leur détermination de racheter l'entreprise à son propriétaire égyptien. Compte tenu du coût estimé de cette opération qui varie entre 2 et 7 milliards de dollars selon les estimations différentes des parties concernées, le montant des engagements du FNI pourrait connaître une croissance beaucoup plus rapide que prévu lors de sa création. Le financement du secteur privé en question Le principal sujet de controverse au sujet de cette jeune institution concerne sa contribution au développement du secteur privé national. La plupart des informations disponibles indiquent que les ressources du fonds ont, jusqu'ici, été pour l'essentiel consacrées au financement des entreprises publiques dans le cadre de la priorité franche réservée à ces dernières par les orientations du gouvernement de M. Ouyahia. Les statuts du FNI prévoient pourtant clairement qu'il doit financer le développement de l'investissement productif aussi bien des entreprises publiques que des entreprises privées. Des voix se sont déja élevées au sein des associations patronales ainsi que dans le secteur bancaire privé, qui réclament une contribution plus active du FNI à la dotation des entreprises privées nationales en fonds propres ou sous forme de prêts à long terme. Cette intervention du Fonds public serait pour beaucoup d'opérateurs de nature à stimuler le développement de nombreuses entreprises privées en leur permettant de grandir en proposant des projets “bancables” aux institutions financières classiques. Il semble bien que, dans ce domaine, les entreprises du secteur privé et particulièrement les PME algériennes devront continuer à s'armer de patience. Nos sources indiquent en effet que le FNI est toujours à la recherche des locaux qui devraient abriter ses 48 antennes régionales .