Rien ne va plus entre le Maroc et l'Espagne, après cette décision de Rabat de vouloir “une réévaluation globale de ses relations” avec Madrid “dans tous les domaines”, suite à la motion adoptée par les députés ibériques demandant au gouvernement Zapatero de “condamner les incidents violents du 8 novembre”, survenus lors du démantèlement d'un campement de contestataires sahraouis au Sahara occidental. En dépit du silence complice du gouvernement socialiste espagnol sur l'agression sanglante des forces marocaines dont ont été victimes des civils sahraouis le 8 novembre dernier à Gdeim-Izik, près d'El-Ayoune, les députés espagnols ont remis les pendules à l'heure jeudi en adoptant une motion demandant à l'Exécutif Zapatero de “condamner” ces incidents violents survenus lors du démantèlement d'un campement de contestataires sahraouis au Sahara occidental. Selon un communiqué du Parlement espagnol, les élus demandent aussi à l'Exécutif d'“exprimer aux autorités marocaines leur préoccupation face aux informations sur des violations des droits de l'Homme sur le territoire sahraoui”. Ils réclament aussi au roi du Maroc “qu'il respecte le libre accès et la circulation de la presse, des observateurs indépendants et des organisations humanitaires sur le territoire du Sahara occidental”. Il faut croire que ce texte, approuvé pratiquement à l'unanimité des voix, soit 327 voix pour et une seule abstention, sur proposition du groupe parlementaire de diverses gauches ERC-IU-ICV, crée une véritable crise entre Rabat et Madrid. Il suffit de prendre connaissance des déclarations du ministre marocain de la Communication, Khalid Naciri, pour s'en convaincre. Réagissant à la position des députés espagnols, le porte-parole du gouvernement d'Abbas al-Fassi a déclaré que le Maroc considère que “le moment actuel nécessite une réévaluation globale des relations (du royaume) avec l'Espagne, dans tous les domaines”, sans pour autant en préciser les formes. Naciri a notamment affirmé que la résolution adoptée, jeudi matin, par le Parlement espagnol se caractérise par son hostilité à l'égard du Maroc, et contient des passages et des expressions antimarocains qui ne peuvent être acceptés. Il ajoutera que “cette résolution se solidarise implicitement avec les adversaires du royaume alors qu'elle reste muette sur la position de l'Algérie bien que celle-ci endosse la responsabilité principale dans la vive tension dont pâtit la région”. Le ministre marocain soulignera que “le gouvernement marocain note que les forces politiques espagnoles mettent encore une fois le Maroc au cœur de la lutte politique interne, et ce, dans le sillage d'une course électorale effrénée afin de détourner l'attention de l'opinion publique espagnole de la profonde crise économique que traverse l'Espagne”. Pour rappel, le Maroc a rejeté samedi dernier l'idée d'une enquête de l'ONU sur ces violences et refuse que la mission de l'ONU, Minurso, ait compétence en matière de droits de l'Homme, malgré les nombreux appels en ce sens émanant notamment du Parlement européen, de Human Rights Watch et Amnesty International. Reste à savoir comment évoluera cette nouvelle crise entre Madrid et Rabat, dont les relations ont de tout temps été caractérisées par des hauts et des bas, particulièrement lorsqu'il est question des enclaves espagnoles de Ceuta et Melilla, de l'île Perejil (Persil), qui constituent des sujets de discorde, ou du Sahara occidental. Ceci dit, le royaume alaouite n'est jamais allé jusqu'au bout de ses menaces en direction de l'Espagne, il fait juste du bruit pour montrer sa désapprobation comme ce fut le cas lors de la visite du roi Juan Carlos dans les enclaves espagnoles, pas plus.