La deuxième voie, c'est le travail à une transformation graduelle générée par les citoyens pour que le peuple s'organise, se définisse une place et des tâches permanentes afin de devenir une source de visions et de programmes alternatifs. Cela demande du temps et de l'engagement en face de la fermeture de tous les canaux nécessaires à une telle mobilisation. Nous vivons aujourd'hui une banalisation de la complaisance et celle de la critique. Critiquer le pouvoir est devenu monnaie courante ; mais responsabiliser les différentes composantes de la société n'est pas encore un discours accepté, car la culture victimaire a pris le dessus sur le sens du devoir et de l'imputabilité. Il s'agit alors de mobiliser les médias (la presse écrite, la radio et la télévision) pour passer de la complaisance à la vérité ; le secteur économique pour passer de la dénonciation à la mise en place des remèdes ; l'université et les intellectuels pour transmettre les idées des élites aux masses populaires. Cette dynamisation des organisations de la société civile est orientée vers : la définition d'un espace démocratique indépendant ; l'articulation d'une alternative de développement au statu quo ; la mobilisation des citoyens en leur offrant des espaces pour s'attacher à des intérêts partagés (sociaux, culturels, économiques) librement, collectivement, pacifiquement. Sans l'engagement dans l'une ou l'autre voie, que peut-il arriver ? Il faut prendre acte du fait que la double transition politique et économique, engagée à la fin des années quatre-vingt du siècle écoulé, est toujours aléatoire, que les réformes sont en panne. D'où l'urgence de dépasser le statu quo politique et économique. Il faut se préoccuper sérieusement du risque de voir se créer en Algérie, deux sociétés antagonistes : celle des nouveaux riches par la rente, l'aisance financière, le gaspillage et la corruption ; et celle des laissés-pour-compte parmi les régions et à l'intérieur des régions. Le danger est réel, car face à l'aisance financière affichée de l'Etat, il y a les conditions de vie de millions de personnes, marquées par les inégalités, la pauvreté cachée, les mauvaises mœurs, la débrouille et la perte de la morale collective. Il faut bien noter que la pauvreté possède quatre dimensions : (i) Le manque d'opportunité, à savoir, la rareté des actifs et le faible rendement sur les actifs qui n'autorisent pas un revenu minimum de survie, (ii) Le manque de capacité, du fait de la faiblesse d'accès à la santé et à l'éducation, (iii) Le manque de sécurité face à la violence, les chocs économiques, les désastres et les calamités naturelles, (iv) Le manque de voix, faible pouvoir pour influencer les débats et les décisions et absence de contrôle sur l'allocation des ressources. Donc la pauvreté ne se limite pas à la faim Alors, la pauvreté passe à la révolte et non pas à la prise de conscience, parce que les institutions capables de transformer la révolte en révolution et son corollaire le changement, sont soit vassalisées soit neutralisées. Il faut bien noter cette différence entre la révolte qui mène vers la “trappe de misère permanente” et la révolution qui mène vers les changements nécessaires ! Il faut le répéter avec insistance, plus la crise se compliquera, plus la protestation sociale se répandra, plus la situation politique devient intenable. À jeudi prochain pour la suite de notre analyse. Entretemps, débattons sur les meilleurs moyens d'avancer vers un avenir de progrès et de prospérité pour tous les Algériens. À la tentation du pessimisme, opposons la nécessité de l'optimisme ! A. B. NDLR : le titre est de la rédaction