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Un avenir piégé
Publié dans El Watan le 30 - 06 - 2010

L'annonce d'un programme d'investissements de 286 milliards US$, durant la période 2010-2014, a relancé le débat sur la stratégie de développement adoptée par le pouvoir en place depuis 1999.
Ce programme s'inscrit dans le prolongement des précédents : 7,5 milliards US$, 60 milliards US$, 150 milliards US$ et, aujourd'hui, 286 milliards US$, dont 130 milliards US$ pour achever les restes à réaliser dans le retard des programmes en cours. Tous ces programmes démarrent sur une confusion fondamentale entre développer et construire. Développer exige un système de gouvernance performant. Construire se contente de l'accumulation de moyens matériels et financiers, d'autant plus que la réalisation est confiée à des entreprises étrangères. Dans le cas de l'Algérie, cette question prend une importance d'existence, puisque l'accumulation des moyens matériels et financiers se fait à travers l'épuisement d'un patrimoine non renouvelable, au détriment des générations futures. Il s'agit de l'exportation d'hydrocarbures.
Pour bien comprendre cette différence entre construire et développer, prenons le cas de la construction d'une école et le développement du système éducatif. Construire une école nécessite la préparation des matériaux de construction, l'engagement d'architectes, de maçons et de manœuvres, et l'école est construite. Développer un système éducatif ne peut se contenter de l'élargissement de l'accès à l'éducation par la construction d'écoles. Il doit être complété par des investissements axés sur l'offre afin d'améliorer la qualité de l'enseignement et la demande pour corriger le sous-investissement des parents dans l'instruction de leurs enfants pour diverses raisons. Il s'agit de définir des stratégies et mettre en place des actions pour aider les élèves à mieux apprendre, les enseignants à mieux enseigner et les écoles à opérer plus efficacement.
L'objectif des investissements dans l'école, c'est l'offre de services d'éducation et pas seulement la réalisation de bâtiments. Des sommes importantes ont déjà été engagées dans les programmes précédents. Cependant, les problèmes majeurs de notre nation sont toujours là, aussi profonds, aussi graves, non résolus. Notre économie est de plus en plus volatile, vulnérable et dépendante, toujours sous perfusion des hydrocarbures. Nous vivons quasi exclusivement de l'exportation des hydrocarbures appelés à s'épuiser dans un avenir que nous ne pouvons repousser trop loin. Le chômage des jeunes est toujours là, c'est la plaie majeure de notre pays, avec la corruption.
La population, majoritairement urbaine désormais, vit dans des villes que nous voyons devenir des dépotoirs, et nos services publics (transports, éducation, santé...) ne cessent de se dégrader, malgré des budgets en augmentation. Il faut également noter que chaque dinar investi dans la construction appelle dans le futur les dépenses de plusieurs dinars pour le fonctionnement, la maintenance et autres coûts d'exploitation des réalisations. Autrement dit, quand on investit des milliards de dollars dans la construction aujourd'hui, on impose aux générations futures des dépenses de plusieurs milliards de dollars US, seulement pour maintenir et faire fonctionner ce qui a été construit. Mais quelles sont les conditions de mobilisation des ressources pour réaliser ce programme d'investissement ?
Malheureusement, ce ne sont pas des moyens humains, ni des réformes, mais seulement des moyens financiers colossaux. Il faut noter que ce programme ne sera pas financé par les réserves de change. Celles-ci servent à financer les importations. Il sera financé, dans le cas algérien, par une partie des recettes fiscales pétrolières. En clair et avec un prix du baril à 70 $ (cours actuel), ce programme sera financé par l'équivalent de 4,8 milliards de barils de pétrole exportés. Cela représente 40% des réserves prouvées de pétrole, estimées à 12,2 milliards de barils à fin 2008 ! Il faut d'autant s'en inquiéter que nos réserves de pétrole, qui ont augmenté de 23% durant la décennie 1990-1999, n'ont augmenté que de 8% durant la décennie qui vient de s'écouler 1999-2008. Pour le gaz, c'est une augmentation de 28% en 1990-1999 et une baisse de - 0,5% en 1999-2008.
Il s'agit donc de l'équivalent de 4,8 milliards de barils ponctionnés sur les réserves non renouvelables qui sont un patrimoine des générations actuelles, mais surtout des générations futures. Lorsque nous parlons de 286 milliards de dollars d'investissements, nous ne parlons pas d'une épargne réalisée sur des revenus permanents renouvelables à partir de notre travail ou notre développement technologique, mais d'extraction, en quelques années, d'un patrimoine non renouvelable que la nature a mis des centaines de millions d'années à constituer. C'est aussi l'équivalent de 2,6 millions de barils à exporter chaque jour. A cela, il faut ajouter les barils à exporter pour couvrir le déficit du budget de fonctionnement et ceux qu'il faut extraire pour répondre à la demande intérieure. Qui peut se donner le droit d'utiliser plus de la moitié des réserves en quelques années sans consulter le peuple et sans en débattre dans des institutions libres et performantes ? N'est-ce pas piéger l'avenir des générations futures ? Dans quelle situation va se trouver le pays à l'achèvement de ce programme, fin 2014 ?
Des réserves d'hydrocarbures sur la voie de l'épuisement ; des constructions sans développement qui vont exiger plus d'exportations de ressources naturelles pour financer leur maintenance et leurs frais d'exploitation ; un budget de fonctionnement appelant à plus d'exportation d'hydrocarbures pour combler un déficit très élevé. Autrement dit, un fort besoin d'exportation des hydrocarbures face à des réserves de plus en plus rares. J'ai déjà appelé à la constitutionnalisation de l'utilisation des réserves d'hydrocarbures. Je le répète aujourd'hui. Il faut bien considérer que chaque baril ponctionné sur les réserves non renouvelables est, au départ, une perte pour la nation. Une fois qu'il sort du sous-sol, il ne fait plus partie du patrimoine des générations futures. C'est l'utilisation qui est faite des recettes qu'il génère, qui fera, a posteriori, que c'est en fin de compte une perte ou un gain pour la nation.
S'il est utilisé pour financer le budget de fonctionnement, c'est une perte. S'il est investi dans la construction, sans intérêt pour les générations futures, c'est un gaspillage de ressources. S'il est investi en développement pour générer des revenus stables et durables, hors hydrocarbures, c'est un gain. Il est légitime de demander des comptes aux gouvernants. Alors que les besoins des générations actuelles ne sont pas assurés malgré l'aisance financière, nous compromettons de façon irrémédiable l'avenir des générations futures qui ne pourront plus disposer des ressources d'hydrocarbures extraites aujourd'hui ! Il est légitime d'être très inquiet quand on constate que l'option de fuite en avant, face à nos problèmes, est à nouveau prête à être mise en place avec ce programme de dépenses colossales.
Nous savons pertinemment que loin de résoudre nos problèmes majeurs, cette fuite en avant ne fera que les aggraver. En s'enfonçant dans la construction au lieu de se lancer dans le développement, nous ouvrons la voie à davantage de corruption, de malvie, d'exaspération et de désespoir de notre société. La seule solution viable, qui répondrait aux intérêts de notre nation, serait une refondation de notre système de gouvernance qui permette réellement de voir accéder au pouvoir une nouvelle génération de dirigeants politiques compétents et intègres. Pour favoriser la prise de conscience quant à la nécessité d'un changement pacifique, nous avons lancé, depuis le 1er novembre 2009, une initiative à travers nos cercles d'initiative citoyenne pour le changement (cicc) : www.cicc-dz.net Nous avons ouvert un débat sans complaisance, mais plein d'espoir sur l'Algérie que nous voulons à terme.
Ce débat, que l'on souhaite lucide, recentre la réflexion sur la société dans laquelle nous voulons vivre, qui nécessite une nouvelle gouvernance pour répondre à nos aspirations, et couvrir nos besoins, tant dans la sphère sociale que dans la sphère économique. Nous y faisons des propositions claires sur les priorités de l'Algérie au cours de la prochaine décennie :
réformer et moderniser profondément la gouvernance et le fonctionnement de l'administration en injectant de réelles compétences, honnêtes, à tous les niveaux de l'Etat, des institutions et des entreprises publiques.
Réorienter l'effort budgétaire vers les secteurs clés à transformer pour former rapidement les ressources humaines dont l'Algérie a besoin, pour se redresser et évoluer dans la compétition mondiale (éducation, santé, instruments modernes d'urbanisme, e-administration).
Eliminer au niveau de l'administration les entraves qui bloquent, aujourd'hui, l'initiative privée pour évoluer vers un Etat régulateur et stratège en mesure d'appuyer efficacement notre économie. Pour parvenir à mettre en œuvre ces changements, il faut d'urgence mettre un coup d'arrêt aux mécanismes de l'économie rentière qui a plongé notre pays dans une profonde malédiction des ressources naturelles. Nous proposons à tous les Algériens de débattre de la constitutionnalisation de l'utilisation des recettes d'hydrocarbures, en donnant une priorité à la préservation de ces ressources pour les générations futures.
Financer un investissement par les hydrocarbures, c'est le financer par une dette sur les générations futures sans obligation de remboursement. C'est vivre au-dessus de ses moyens avec la voie ouverte au gaspillage et à la corruption. Quand la situation devient insupportable, quand le sentiment d'injustice domine, l'expérience montre qu'il suffit d'incidents mineurs pour provoquer des embrasements majeurs. Ce qui prime, aujourd'hui, c'est une prise de conscience collective de la menace sur l'avenir de l'Etat et de la nation. Chaque citoyen et chaque institution doivent intérioriser très fortement l'urgence et l'absolue nécessité du changement du système de gouvernance dans le calme et la sérénité. A la tentation du pessimisme, opposons la nécessité de l'optimisme !
A. B. : Ancien Premier ministre


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