Estimant qu'il y a au sein de la Ligue arabe “quelqu'un qui fait tout pour que les Syriens ne parviennent pas à un accord entre eux”, la Russie a critiqué la décision de l'organisation panarabe de suspendre la Syrie, avant la cruciale réunion ministérielle des chefs de la diplomatie arabe demain à Rabat. Après un long silence sur la question syrienne, le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a sévèrement condamné hier la décision de la Ligue arabe de suspendre la Syrie, en la jugeant “incorrecte”. Selon les agences de presse russes, Lavrov a déclaré : “Nous considérons que la suspension de la Syrie en tant que membre de la Ligue arabe est incorrecte. Ceux qui ont pris cette décision ont perdu une véritable occasion de rendre la situation plus transparente.” Sans citer aucun pays directement, il accusera des parties de travailler contre la Syrie en ajoutant : “Il a quelqu'un qui fait tout pour que les Syriens ne parviennent pas à un accord entre eux”. S'adressant aux représentants du Conseil national syrien, qui représente l'opposition, devant se rendre à Moscou aujourd'hui, il dira : “Nous allons essayer de leur faire part de notre préoccupation, car la lutte pour le pouvoir devient un but en soi, mais il faut penser à son pays, à son peuple”. Sur sa lancée, Sergueï Lavrov a accusé les pays occidentaux d'inciter l'opposition à renverser le régime en place. Pour rappel, la Russie, allié de longue date de la Syrie, s'oppose, de même que la Chine, à toute résolution au Conseil de sécurité de l'ONU condamnant la répression en Syrie, insistant sur la nécessité du dialogue et faisant porter une part de la responsabilité des violences sur l'opposition. Pékin a toutefois exhorté hier la Syrie à mettre en oeuvre le plan de sortie de crise proposé par la Ligue arabe. En dépit de la situation confuse prévalant dans son pays, le ministre syrien des Affaires étrangères, Walid Mouallem, a affirmé hier que la Syrie se dirige vers la fin de la crise qui la secoue depuis la mi-mars, tout en présentant les excuses de son pays pour les attaques menées contre les missions diplomatiques. “La crise en Syrie ne s'amplifie pas, au contraire nous nous dirigeons vers la fin de la crise”, a-t-il assuré au cours d'une conférence de presse. “La crise arrive à sa fin. Le programme des réformes est devenu clair, mais nous sommes en retard en ce qui concerne le dialogue (avec l'opposition) et nous essayons d'y remédier”. Ces déclarations apaisantes interviennent juste avant la réunion des ministres des Affaires étrangères de la Ligue arabe demain pour décider du sort de la Syrie. Cette réunion coïncide avec un forum dans la capitale marocaine, qui réunira les pays arabes et la Turquie, inquiète des troubles meurtriers qui secouent depuis huit mois son voisin et partenaire économique. “Nous avons décidé d'une réunion des ministres des Affaires étrangères de la Ligue arabe le 16 novembre à Rabat sur la Syrie en marge du Forum Turquie-pays arabes”, a annoncé le porte-parole du ministère algérien des Affaires étrangères Amar Belani. Il a précisé que cette réunion devait faire le point sur la mise en oeuvre d'un plan d'apaisement en Syrie décidé le 2 novembre lors d'une réunion ministérielle de la Ligue arabe. Par ailleurs, l'oncle exilé du président syrien, Rifaat al-Assad a souhaité dimanche incarner une nouvelle voix de l'opposition en prônant la création d'une alliance internationale qui négocierait la démission de Bachar al-Assad en échange de garanties pour sa sécurité et permettrait de le remplacer par un membre de sa famille. Le frère cadet de l'ancien président Hafez al-Assad, longtemps considéré comme son successeur, a pris dimanche dans un hôtel parisien la tête d'un nouveau mouvement d'opposition, le Conseil national démocratique, dont la direction est composée essentiellement de membres de son propre parti, l'Alliance nationale démocratique unie et d'ex-membres du parti Baas au pouvoir. Merzak Tigrine