Marquée par de rares soubresauts épisodiques pendant la “basse saison”, la scène politique connaît depuis quelques semaines un certain emballement. Le contexte actuel, caractérisé à la fois par les débats parlementaires sur les réformes dites “du Président” et surtout la perspective des prochaines législatives, le tout sur fond de Printemps arabe, qui est, soit dit en passant, en train de glisser vers l'été islamiste, y est pour grand-chose dans ce brusque réveil de notre Gotha politique. Ce qui est amusant à relever en observant les postures des uns, en écoutant les déclarations des autres, est le fait que ce manège a tout l'air d'une foire d'empoigne où chacun tente de tirer son épingle du jeu. Au sein de la coalition présidentielle, le psychodrame “je t'aime, moi non plus” continue. Abou Djerra Soltani, qui croit cette fois-ci à la bonne étoile des islamistes, chevauchant, en preux chevalier, la vague verte qui a déferlé sur la Tunisie, le Maroc et l'Egypte cherche à s'ériger en leader de cette mouvance en quête de chef. Il y croit d'autant plus que la nouvelle loi sur les partis politiques le prémunit de la concurrence éventuelle des anciens du FIS, déclarés hors jeu ad vitam. Reste l'inconnue, Djaballah. Et pour être en accord avec la nouvelle stature qu'il cherche à se donner, le chef du MSP est passé depuis quelque temps en mode “opposition”, tirant à boulets rouges sur ses deux partenaires de la coalition. Le but de la manœuvre étant d'échapper au devoir d'inventaire du gouvernement et du Parlement dont il fait partie. Abdelaziz Belkhadem, qui n'en finit pas de s'étriper avec les redresseurs, dont il sous-estime, à tort, la puissance et les appuis, croit sortir de haut dans cette encombrante affaire en abattant la carte atout d'un quatrième mandat pour Bouteflika. Comble de démagogie et d'irresponsabilité, crie Seddik Chihab, envoyé par Ouyahia en éclaireur. Et dans la foulée, il lance une mortelle torpille contre le rêve d'Abou Djerra, en affirmant, droit dans ses bottes, que le risque d'un raz-de-marée islamiste n'existe pas. “Je te tiens, tu me tiens par la barbichette”, semblent se dire les trois larrons de la coalition pendant que Louisa Hanoune, longtemps allié objectif des islamistes par défaut dans les années de crise, embouche elle aussi la trompette de l'anti-islamisme en assenant en boucle : “Islamistes no passaran !” Du côté des démocrates, on se limite pour le moment à scruter l'horizon, en attendant de voir dans quel sens le vent soufflera. O. O.