En cette période où la crise franco-turque a atteint son apogée, sur fond de débat sur le génocide algérien, le ministre des Moudjahidine, Chérif Abbas, a réitéré sa détermination à revenir à la charge pour faire aboutir le projet de loi criminalisant le colonialisme français, tant que Paris n'assumera pas ses responsabilités. Bien qu'il estime que la crise entre Paris et Ankara est une affaire qui ne concerne que ces deux pays, car le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan, qui a accusé vendredi dernier la France d'avoir commis un génocide en Algérie en réaction au vote en France d'un texte de loi réprimant la négation du génocide arménien, ne faisait que “défendre les intérêts de son pays, comme le font les députés français”, le ministre algérien des Moudjahidine a saisi l'occasion lundi à Guelma pour remettre au goût du jour le projet de loi criminalisant le colonialisme français. Ainsi, la polémique sur le génocide arménien aura donc permis de déterrer cette initiative présentée à l'Assemblée nationale populaire en février 2010 mais reste pour l'heure dans un tiroir en raison de “considérations diplomatiques et juridiques”, comme l'avait déclaré en octobre de la même année le président de l'APN, Abdelaziz Ziari. Et c'est le ministre algérien des Moudjahidine, Mohamed-Cherif Abbas, qui est revenu à la charge lundi en marge du colloque sur le défunt président de la République, Houari Boumediene, pour rappeler que la demande de “criminaliser le colonialisme” était “une revendication du peuple algérien et le restera tant que la France officielle n'assumera pas sa responsabilité”. Dans sa déclaration à l'agence APS, il soulignera que “cette revendication populaire est plus que légitime et un devoir envers la mémoire des chouhada”. Poursuivant dans le même sens, il prendra le soin de préciser que “cet appel à la criminalisation de la colonisation en Algérie n'est ni une fin en soi, ni un moyen d'atteindre un quelconque objectif politique, mais une demande légitime”, car ajoutera-t-il, “l'essentiel de la question réside, aujourd'hui, dans la manière la plus efficace pour faire aboutir cette revendication”. Le ministre regrettera toutefois l'absence actuellement de ce genre de mobilisation en Algérie autour de cette question. Il n'en demeure pas moins que la demande de criminaliser le colonialisme et d'obtenir “des excuses” de la France pour son comportement durant ses 132 ans d'occupation de l'Algérie est récurrente de la part de nombreux responsables algériens. Pour rappel, en décembre 2009, 125 députés du parti du Front de libération nationale (FLN), parti majoritaire, avaient élaboré une proposition de loi portant “criminalisation du colonialisme français”, qui n'a cependant pas été présentée pour débat et vote. Il n'en demeure pas moins que l'Algérie officielle attend que la France reconnaisse ses torts, si l'on en juge par la récente déclaration du porte-parole du ministère algérien des Affaires étrangères, Amar Belani, dans laquelle il affirmait que “Mourad Medelci a réaffirmé, à partir de Moscou, que l'Algérie est toujours dans l'attente d'une position française qui ne soit pas timide ou timorée sur la question de la mémoire. Nous avons, certainement, besoin d'une position plus claire et plus explicite à ce sujet pour assainir, de manière définitive, l'atmosphère des relations globales que nous entretenons avec notre partenaire français”. Reste à savoir combien durera cette attente ! Merzak Tigrine