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loi de finances 2012
De l'austérité pour tous
Publié dans Liberté le 11 - 01 - 2012

Pour que l'austérité soit acceptée par tous, il faut au préalable réunir les conditions d'une plus juste répartition du revenu national. Concrètement, cela signifie qu'il faut lutter contre la fraude fiscale, l'évasion fiscale, le commerce informel, l'enrichissement illicite, le blanchiment d'argent, la fuite des capitaux, la corruption…
La légitimé des gouvernants doit être non seulement puisée des urnes et sanctionnée par le suffrage universel, mais elle doit aussi se mesurer, à l'aune de la transparence dans leur mode de gestion des affaires de la cité, au sens grec du terme. Selon M. Ferhane, DG de la prévision et des politiques au ministère des Finances, dans une interview accordée à l'APS en novembre 2011, la loi de finances 2012 table sur “un produit de la fiscalité qui représente 93% des ressources budgétaires et se décompose en produits de la fiscalité pétrolière et de la fiscalité ordinaire. Les deux composantes, d'environ 1600 milliards de DA chacune, augmenteront respectivement de 2% et de 8,3% en 2012 par rapport à la LFC 2011”.
Ce qui est notable dans les propos de M. Ferhane, c'est que le produit de la fiscalité ordinaire augmentera de 8,3% soutenu par les éléments suivants : “L'activité économique dans les secteurs de l'industrie, du BTP et des services, dont l'évolution se situera, en 2012, à +12%, induirait un accroissement de l'impôt sur les revenus (hors salariés) et les taxes sur les affaires de l'ordre de 13%. L'accroissement des rémunérations des salariés des personnels des administrations centrales et de leurs services déconcentrés contribuera à l'évolution du produit de l'impôt sur le revenu global des salariés de 7%.” Si ces chiffres venaient à se confirmer, cela signifierait que des progrès ont été enregistrés dans la lutte contre la fraude et l'évasion fiscale. Cependant, ces progrès restent insuffisants. Même si le discours “optimiste” des pouvoirs publics argue d'un matelas financier de plus de 175 milliards de dollars de réserves de change et d'un fonds de régulation de recettes avoisinant 75 milliards de dollars, il n'en demeure pas moins que le déficit budgétaire pour l'exercice 2012 est estimé à 25,4% du PIB contre 34% en 2011.
Nos importations avoisineront les 60 milliards de dollars et le taux de croissance de 4,7% n'arrivera pas à absorber celui de l'inflation de 5% prévu par les spécialistes, d'autant plus que la crise de la “zone euro” nous affectera via l'inflation importée liée aux au renchérissement des prix des biens de consommation et d'équipement dont nous sommes dépendants. Ces signaux rouges, qui ont été à maintes reprises lancés par les experts à travers les différents forums et think tanks, ne semblent pas inquiéter outre mesure le pouvoir, qui préfère “la fuite en avant” pour gagner du temps en tentant de “calmer la grogne du front social”. Cette posture est axée sur des démarches “démagogiques et de nature populiste”, en accordant des augmentations de salaires anarchiques, incohérentes et inégales, créant un profond sentiment de frustration et d'injustice au sein de larges pans de la société et de nombreuses catégories socioprofessionnelles. C'est ce qui est, en parie du moins, à l'origine des grèves à répétition, de l'avalanche de revendications inconsidérées ; chacun “voulant sa part du gâteau dans une économie de rente pétrolière”. Il faut bien que tout le monde comprenne, qu'à l'instar de nombreux pays du monde, notamment en Europe, avec la banqueroute de Malte et plus récemment de l'Irlande, sans omettre d'autres, tels que l'Espagne, l'Italie, la France et l'Allemagne mises sous surveillance dernièrement par les agences de cotation, l'Algérie ne peut éternellement vivre au-dessus de ses moyens, du seul fait de la rente pétrolière, en hypothéquant dangereusement l'avenir des générations futures. Au plan de la politique des équilibres macroéconomiques, le taux d'inflation de 4% retenu pour 2012 risque d'être affecté par les contraintes externes évoquées, ainsi que par la lenteur mise dans la relance de l'outil de production national et de la faible productivité de celui-ci (la croissance est tirée essentiellement par la dépense publique).
D'où l'éventualité d'une poussée inflationniste plus importante que celle de 2011, et son impact sur le pouvoir d'achat des catégories les plus vulnérables de la société, avec, évidemment, des tensions sociales qu'elle pourra engendrer, d'autant que les mécanismes de régulation du marché national des biens de large consommation ne sont pas encore suffisamment maîtrisés. Ces quelques considérations confortent l'idée que la loi de finances 2012 est un ensemble de mesures “juxtaposées” qui relèveraient plus de l'improvisation, dictées par “l'ordre des nécessités”, que d'une démarche cohérente et globale, intégrant l'ensemble des facteurs endogènes et exogènes qui permettent la poursuite du développement durable, avec rigueur et contrôle de la dépense publique, à l'instar de la majorité des pays développés qui tentent d'anticiper la crise, ou d'endiguer ses retombées, en mettant en place des plans d'austérité en matière de dépenses publiques.
A. H.


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