Le constat est unanime : cinquante ans après l'Indépendance, l'économie algérienne reste tributaire, dans une large mesure, des hydrocarbures. Rentière, elle est gangrenée par la corruption. Elle reste pour ainsi dire à construire. Invité hier par le Front des forces socialistes (FFS), dans le cadre d'une série de conférences en perspective de la convention sur les échéances électorales du parti prévue le 11 février prochain, le professeur Ammar Belhimer a estimé que l'économie algérienne est “une économie de comptoir”. “C'est une économie de comptoir caractérisée par la fuite des capitaux, la fuite des cerveaux (200 000 cadres ont quitté l'Algérie entre 1962 et 1990) et la corruption qui touche notamment les secteurs du bâtiment, des travaux publics et le commerce extérieur”, a-t-il résumé au cours d'une conférence sur le thème “Les grands indicateurs de la situation économique et sociale en Algérie”. Selon lui, la facture d'importation qui dépasse la barre des 40 milliards de dollars est excessive. Il soutient que le gaspillage et la surfacturation sont à l'origine de ce coût mirobolant. Dans son analyse des indicateurs macroéconomiques, ce docteur en droit, enseignant à l'université d'Alger, a estimé qu'“ils témoignent de deux caractéristiques : un régime de croissance alimenté par les hydrocarbures et hypothéqués par les transferts sociaux”. Chiffres à l'appui, il a détaillé les investissements publics. Si les marqueurs de la décennie écoulée sont notamment la relance, le remboursement de la dette dans le souci des autorités de récupérer la décision économique- et la consolidation de la croissance, Ammar Belhimer n'a pas manqué de désigner du doigt les obstacles à la réforme : il y a d'une part, “le déficit démocratique”, marqué par la prééminence de la violence politique, comme mode de régulation institutionnelle, et le refus de l'alternance au pouvoir. D'autre part, il y a les intérêts économiques locaux qui risquent d'être contrariés. “Nous avons un pouvoir de janissaires acquis aux intérêts étrangers”, a-t-il résumé. Dans leurs interventions, de nombreux présents n'ont pas manqué de soulever certaines questions d'actualité. À qui profite la dévaluation ? a interrogé Ahmed Djedaï. Quels sont les mécanismes de contrôle du Fonds de régulation ? s'est-il encore demandé. L'homme de théâtre, Slimane Benaïssa, a proposé, lui, à l'assistance de disserter plutôt sur “le système”. “Nous sommes dans une logique de tolérance de ce système”, a-t-il dit, recommandant plutôt d'organiser les débats autour de la manière de dépasser le système, à l'origine de la faillite. “On essaye ici de parler de concepts scientifiques pour expliquer une politique de voyous”, a-t-il dit sous un tonnerre d'applaudissements. K K.