Les conséquences politiques du coup de pied décoché contre Nicolas Sarkozy vont au-delà du vote de demain, car la décision du président du Modem, François Bayrou, de voter pour le candidat socialiste constitue, certes, un coup d'assommoir pour Nicolas Sarkozy. À la peine dans les sondages, Nicolas Sarkozy comptait sur ce débat pour inverser la tendance. Durant les jours précédant ce match, le président-candidat était donné vainqueur du pugilat et lui-même disait en boucle que son adversaire était nul. C'est peu probable et l'impression donnée mercredi soir par le face-à-face des finalistes de la présidentielle française était que les jeux étaient faits. Le favori des sondages reste le favori. Nicolas Sarkozy n'a pas réussi à faire sortir François Hollande de ses gonds, ce qui était le but recherché puisque le candidat de la droite parlait même de “débusquer” son adversaire. C'est manqué et surprise, le candidat socialiste a non seulement paré au punch du candidat à un second mandat mais il a montré son dynamisme, son entrain et sa pugnacité, pour tout dire, sa capacité à traduire dans les faits les prévisions des sondages. Il a montré “une vraie hauteur de président”, se sont enthousiasmés les Français, après le duel télévisuel Sarkozy-Hollande, parlant du candidat socialiste. Serein et prudent, celui-ci attend le verdict des urnes. C'est demain que les électeurs trancheront et, à en croire, les politologues, le favori des sondages devrait passer comme une lettre à la poste d'autant qu'en plus il a marqué des points durant le match contre le président-candidat. Hollande a, en effet, pris l'ascendant psychologique dès le début, en contrant systématiquement son adversaire par des incises courtes, précises et assassines. Pourtant, le président sortant a sorti sa grosse artillerie pour ses attaques sur des thèmes nauséabonds de la droite lepéniste. Immigration, islam, défense de la culture judéo-chrétienne, chasse aux Sud-Méditerranéens, Sarkozy n'a pas pu déstabiliser son rival, même en évoquant DSK. “C'est vous qui l'avez nommé au FMI”, répond Hollande qui est resté fidèle à son programme social, notamment sa partie concernant les étrangers du Maghreb et d'Afrique dans la ligne de mire de Sarkozy. “Vous aurez du mal à passer pour une victime”, n'avait cessé Hollande de le mettre en garde. Celui-ci pensait contraindre Hollande à la défensive, mal lui a pris, le socialiste n'a pas joué en défense, il a pratiqué la contre-offensive en interpellant sans relâche Sarkozy sur le bilan de son quinquennat et sa campagne électorale a fait l'impasse. Au fil de l'émission, Sarkozy n'a pas pu masquer sa nervosité : “Calomnie, mensonge”, lançait-il régulièrement ! Ses chiffres, Hollande n'a eu aucun mal à les défaire. Même sur l'Europe, pas de chance pour Sarkozy. Les récentes informations de Bruxelles sur un plan concerté européen de relance par la croissance lui ont coupé l'herbe sous les pieds, faisant de lui le candidat de l'austérité organisée et, comme le disait Hollande, imposée par l'Allemagne. Sur la fin, on observera que François Hollande n'hésitait plus à dire : “Moi, président”, supprimant le préambule de prudence “si les Français m'accordent leur confiance”. Nicolas Sarkozy n'a même pas repris son challenger avec une phrase du genre : “Mais vous ne l'êtes pas encore”. Marine Le Pen dont les thèses ont été siphonnées par Nicolas Sarkozy, a égratigné ce dernier qu'elle qualifiait de copieur et épargné François Hollande. La présidente du FN estime que “Sarkozy est battu depuis longtemps et je ne crois pas que le débat d'hier ait changé quelque chose”. Quant à François Hollande, elle juge qu'en “termes de posture, il a rempli son rôle” ! Nouveau coup de massue : dans les heures de campagne pour les deux finalistes de la course à l'Elysée, François Hollande, toujours favori dans les derniers sondages, a vu son avantage encore conforté par le choix personnel de François Bayrou. Les conséquences politiques du coup de pied décoché contre Nicolas Sarkozy vont au-delà du vote de demain, la décision du président du Modem de voter pour le candidat socialiste constitue certes un coup d'assommoir pour Nicolas Sarkozy qui jeudi l'avait pratiquement supplié de le rejoindre mais aussi et surtout un séisme dans le paysage politique français, notamment au sein de l'UMP sa famille d'origine. Quoi qu'il en soit, à 24 heures du scrutin, François Hollande a été jugé plus convaincant (45%) que Nicolas Sarkozy (41%) lors de leur débat de l'entre-deux-tours, tandis que 14% des personnes interrogées répondent “ni l'un ni l'autre”, selon un sondage. Le candidat socialiste a également été jugé comme le candidat le plus proche de leurs préoccupations par 47% des téléspectateurs, contre 33% pour Nicolas Sarkozy. La messe n'est cependant pas dite entièrement, il faut attendre le verdict des urnes. D. B