En Egypte, pour la première fois dans l'histoire du pays, les téléspectateurs ont assisté à un débat télévisé en direct, à l'approche de la présidentielle dont le premier tour aura lieu les 23 et 24 mai 2012. C'est un face à face entre l'ancien chef de la Ligue arabe et ex-ministre des Affaires étrangères, Amr Moussa et l'islamiste modéré, Abdel Mounem Abou Al-Foutouh, tous deux faisant figure de favoris parmi la douzaine de candidats en lice. Un marathon télévisuel qui a duré près de quatre heures, suivi par des millions d'Egyptiens et de téléspectateurs du monde arabe. Au départ, Abdel Mounem Abou Al-Foutouh, des Frères musulmans, a insisté sur sa dimension de rassembleur “honnête”. Même son de cloche chez Amr Moussa qui a précisé ses différences sur les idées avec l'islamiste. Mais très vite le débat a viré à la confrontation. Abou Al-Foutouh insistant sur le fait que Moussa a été ministre des AE de Moubarak et Moussa soulignant qu'Abou Al-Foutouh a été membre dirigeant des Frères musulmans. Des échanges parfois vifs mais qui n'ont jamais dérapé. Un débat qui pourrait influencer une partie des 50% d'Egyptiens qui n'ont pas encore choisi leur candidat. En ce qui concerne la politique étrangère, les deux candidats ont promis de revoir le traité de paix signé en 1979 avec Israël, un pays qu'Abou Al-Foutouh a qualifié d'ennemi et Moussa d'adversaire. Le 17 avril dernier, la Commission électorale égyptienne a écarté 10 des 23 candidats en lice. Ces disqualifications ont bouleversé le paysage politique égyptien, car plusieurs favoris figuraient parmi les exclus. Le premier est le général Omar Souleimane, l'éphémère vice-président de Hosni Moubarak, ex-patron des moukhabarate. Il a été mis hors course sur la base d'un détail technique, il n'avait pas rassemblé des signatures populaires qui devaient totaliser au moins 15 des 27 provinces égyptiennes. Vient ensuite Khayrat Al-Chater, le candidat des Frères musulmans. Condamné sous Moubarak et gracié par l'armée après la révolution, il n'a pas retrouvé ses droits civiques et politiques. Troisième favori à tomber sous le couperet de la commission, Hazem Abou Ismaïl, le candidat salafiste. Sa mère a obtenu, avant son décès, la nationalité américaine alors que la constitution intérimaire exige que le candidat soit de parents uniquement égyptiens. La redistribution des cartes ne profite pas aux islamistes dont les prétendants Khayrat Al-Chater et Hazem bénéficiaient d'un très large soutien de la population, ils faisaient figure de favoris. Leur élimination a suscité des réactions assez virulentes avec une centaine de morts aux portes du ministère de la Défense. Quoi qu'il en soit, quatre poids lourds restent en lice. Abdel Moneim Abou Al-Foutouh, candidat islamiste et ex-Frère musulman. La confrérie garde toujours un candidat avec Mohamad Morsi, chef du parti Liberté et justice, qui s'était présenté comme suppléant de Khayrat Al-Chater. Le général Ahmad Chafiq, dernier Premier ministre de Hosni Moubarak, et enfin, Amr Moussa. Les Frères musulmans et les salafistes s'étaient préparés au rejet des jokers de leur parti en présentant d'autres candidats, mais ceux-là, ne sont pas populaires. Dans les 13 candidats qui sont restés en compétition, le face à face se jouera sauf grande surprise entre Amr Moussa et Abdel Moneim Abou Al- Foutouh. Amr Moussa, est le plus connu, mais il constitue la perpétuation de l'ancien régime. Mais il n'est pas non acquis qu'Abou Al-Foutouh, moins connu que son principal adversaire, bénéficie du soutien des jeunes et du camp révolutionnaire. Le jeu sera serré comme l'a présagé le face à face des deux favoris à la télé. D. B.