La secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton a entamé une longue tournée en Afrique axée sur la démocratie, la croissance et la sécurité régionale, conformément à la stratégie africaine du président Barack Obama. Mais derrière cette profession de foi, se cache en fait une rivalité acharnée pour la mainmise sur les richesses africaines et de ses marchés. Les Etats sont en compétition ouverte avec la Chine qui dispose déjà d'importantes chasses gardées. Alternance démocratique en Afrique : Hillary Clinton montre le Sénégal en exemple. Entamant par ce pays son périple de 11 jours, la secrétaire d'Etat américaine a magnifié l'engagement avec lequel les Sénégalais ont, à la dernière présidentielle “prouvé à la face du monde leur grande maturité démocratique". Pour elle, le Sénégal, à travers sa seconde alternance, a montré que “l'Afrique n'a pas besoin d'hommes forts, mais d'institutions fortes", le message livré en 2009 par le président Obama juste après son élection à la Maison- Blanche et qui constitue l'abécédaire de sa politique africaine. Hillary Clinton était vendredi au Soudan du Sud, avant de rejoindre l'Ouganda, le Kenya, le Malawi et l'Afrique du Sud. Officiellement, les Etats-Unis entendent contribuer au “renforcement des institutions démocratiques et de la croissance économique" et “faire progresser la paix et la sécurité" en Afrique. La partie visible de la vision américaine du continent africain fut présentée par le premier président noir des Etats unis dans un discours au Ghana en juillet 2009 et systématisée en juin dernier dans une feuille de route. Les Etats-Unis, a dit Obama, sont prêts à aider les pays africains qui travaillent pour améliorer leur gouvernance, luttent contre la corruption et cherchent à résoudre les conflits régionaux. La tournée africaine de sa chef de la diplomatie est la première depuis la publication de la nouvelle stratégie envers cette Afrique noire qualifiée de contient du XXIe siècle par tous les prospectivistes. La nouvelle politique américaine repose sur quatre piliers : renforcer les institutions démocratiques, stimuler la croissance économique, encourager le commerce et l'investissement et promouvoir le développement. Malgré les espoirs suscités par l'élection d'Obama, aux racines africaines (son père est né au Kenya), le gouvernement américain n'a pas lancé de nouveaux projets d'envergure, à la différence de Bill Clinton et de son successeur George W. Bush, qui avait investi des milliards de dollars dans la lutte contre le sida en Afrique, ont observé des analystes. À l'occasion de sa tournée africaine, Mme Clinton devrait donc rattraper ce retard mais comme Washington est à court d'argent, elle se contentera de faire le point sur les programmes américains sur le développement, l'éducation et le sida, ainsi que sur l'intérêt économique des Etats-Unis pour un continent aux immenses ressources et dont certains pays, comme l'Angola, affichent un taux de croissance économique enviable. En se rendant dans le plus jeune Etat du monde, qui a fêté sa première année d'indépendance le 9 juillet, le Sud-Soudan, elle a encouragé le président Salva Kiir dans les négociations avec Khartoum afin de parvenir à un accord sur le dossier pétrolier, les deux Etats se déchirant sur la démarcation de la frontière sur une zone pétrolifère : le Sud a hérité de l'or noir mais pour l'exporter, il doit passer par le Nord. Aux Nations unies, des membres du Conseil de sécurité ont intensifié leurs pressions afin qu'ils s'entendent. Un ultimatum fixé par l'ONU expirait jeudi. En fait, derrière la guerre Juba/Khartoum se cache l'emprise de la Chine qui a toujours soutenu le régime soudanais dont le président est sous le coup d'un arrêt de la Cour pénale internationale (CPI) pour crimes de guerre au Darfour. Mme Clinton est attendue en Ouganda, malgré la présence du virus Ebola dans la capitale Kampala. L'armée ougandaise traque avec l'UA et une centaine de membres des forces spéciales américaines les rebelles de l'Armée de résistance du Seigneur (LRA) et leur chef Joseph Kony, recherché par la CPI. Elle se rendra aussi au Kenya pour évoquer les élections programmées en 2013 et devrait s'entretenir avec le président sortant de Somalie, Sharif Cheikh Ahmed, candidat à sa succession, les fragiles institutions somaliennes de transition devant être renouvelées au cours des deux prochains mois, avec un Parlement chargé d'élire un président au plus tard le 20 août, selon un calendrier soutenu par la communauté internationale. La chef de la diplomatie américaine doit boucler son voyage par le Malawi et l'Afrique du Sud, avec une rencontre avec l'ancien président Nelson Mandela, qui vient de fêter ses 94 ans. Hasard du calendrier, le périple d'Hillary Clinton fait suite au Forum Chine-Afrique organisé avec succès fin juillet par Pékin pour consolider et élargir ses parts de marché en Afrique. Et si les Chinois ont une bonne longueur d'avance, c'est qu'avec eux il n'y a pas de déterminismes démocratiques pas même les droits de l'homme élémentaires. D. B