Dans le rapport final de la mission d'observateurs européens aux élections législatives, remis dernièrement aux autorités algériennes, un long chapitre est consacré à la non-capacité de la presse algérienne, dans les conditions actuelles, de couvrir cet événement, de manière objective et libre. La mission de l'observation de l'UE présente plusieurs arguments : tout en concédant qu'il existe “une relative ouverture du secteur médiatique", les observateurs de l'Union européenne pensent que “la presse est encore soumise à plusieurs limitations". Ils citent, dans ce sens, le bas salaire des journalistes, leur manque de formation et les sanctions qualifiées de “sévères" contenues dans la législation pour la diffamation et les outrages contre les institutions gouvernementales. “Par conséquent, afin d'éviter des répercussions légales, les médias pratiquent souvent un certain niveau d'autocensure", note la délégation de l'UE qui rappelle, en outre, l'existence de l'article 46 de l'ordonnance portant mise en œuvre de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale qui punit d'une peine de prison et d'une amende “quiconque qui utilise ou instrumentalise les blessures de la tragédie nationale, pour porter atteinte aux institutions de la République (...), fragiliser l'Etat, nuire à l'honorabilité de ses agents (...), ou ternir l'image de l'Algérie sur le plan international". Bien que le code pénal algérien ait été modifié en 2011, remplaçant les peines d'emprisonnement par des amendes, le législateur a introduit le délit d'offense au président de la République et à toute institution publique, à l'instar du Parlement et les forces armées. Les observateurs de l'Union européenne notent, également, la conservation des autorités algériennes du monopole sur la publicité étatique et le monopole sur l'impression et la diffusion de la presse, mettant en avant les cas dans lesquels les frais d'impression ont été utilisés comme arme de pression “pour que la presse ne se montre pas trop critique envers les autorités". “Une situation analogue existe en ce qui concerne la distribution des journaux, sauf El Khabar et El Watan, qui ont créé un circuit indépendant de distribution, les autres publications dépendent du réseau public", précise-t-on dans ce rapport. Les observateurs de l'Union européenne terminent leur rapport par une série de recommandations en commençant d'emblée par faire remarquer que les articles du code pénal prévoyant l'emprisonnement pour les délits de presse, ainsi que l'articles 46 de l'ordonnance portant la mise en œuvre de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale “ne sont pas conformes aux normes internationales". Ils conseillent, par ailleurs, les autorités algériennes de garantir le pluralisme des opinions et des thèmes “à travers une forme de couverture électorale qui assure aux citoyens la possibilité réelle de s'informer sur les questions et les enjeux des élections. À cet égard, les médias publics pourraient adopter, conjointement aux messages gratuits assignés aux partis politiques et aux listes indépendantes, des formats qui permettent aux journalistes de questionner librement les candidats et de discuter leurs différentes propositions politiques". Le rapport propose une nouvelle loi sur l'information qui annulera le monopole d'Etat sur la publicité et demande “l'adoption rapide d'un organisme de réglementation des médias impartial, indépendant et compétent, en charge de la juridiction ordinaire et de la campagne électorale. Un mécanisme transparent et rapide de supervision des médias et d'adjudication des plaintes et autres violations devrait également être mis en place pour assurer un véritable pluralisme et l'équité des opportunités entre les différentes orientations politiques". Enfin, les observateurs européens pensent qu'un code de déontologie devrait être souscrit par les opérateurs de la presse. N. H.