Son nom est depuis quelques années déjà indissociable avec le Mouloudia d'Alger. Véritable décideur et principal artisan des accords de rachat avec Sonatrach, il aura régné à la tête du Doyen d'une main de fer, reléguant tout le monde, notamment ses collègues du conseil d'administration et même les membres du CSA, au rôle de simple figurants. Omar Ghrib, puisque c'est de lui qu'il s'agit, recrute et limoge les entraîneurs comme bon lui semble. Il enrôle les joueurs et surtout c'est lui qui paye tout le monde. Il n'hésite du reste pas à mettre la main à la poche pour payer même les repas des joueurs. En clair, il est toujours là, au moment où beaucoup de dirigeants mouloudéens brillent par leur absence. Il se permet même de critiquer à tout bout de champ. Sportifs et politiques passent à la trappe, rien ne semble lui faire peur. Mercredi dernier sur le plateau d'Ennahar TV, Ghrib s'est démené comme un diable pour tirer sur tout ce qui bouge. Wali d'Alger, Aziz Derouaz, Brahmia opposition et même les journalistes, chacun en aura eu pour son grade. L'homme se sent intouchable. Il y a quelques mois, il n'avait également pas hésité à tirer à boulets rouges sur Rachid Marif, le parrain du MCA, Abdelkader Drif, Mohamed Raouraoua, Mahfoud Kerbadj et la liste est encore longue. Au moment où Ghrib soutient qu'il n'a pas de tuteur politique et qu'il agit seul “grâce à mon argent et celui de mes amis", d'aucuns estiment que Ghrib n'est que le prête-nom de “véritable décideurs", incrustés dans la nomenclatura de l'Etat. Alors qui est Omar Ghrib ? Qui est derrière lui ? Coopté en 2001 Coopté en 2001, au sein de l'Association El-Mouloudia, qui a hérité de la part de Sonatrach la gestion de la section football du MC Alger grâce à ses affinités avec une figure emblématique du Doyen, le défunt Aggoun, Omar Ghrib est devenu, au fil des années, le numéro un du club et surtout le faiseur de la pluie et du beau temps dans la maison mouloudéenne. Doté d'un sens des affaires assez pointu, disent ses proches, l'homme sait mieux que quiconque dans ce milieu impitoyable que le véritable nerf reste l'argent. Ghrib a vite compris en effet que devant la crise financière qu'allait vivre le MCA après le retrait de la mamelle nourricière de Sonatrach, qu'il avait plus de chance d'atteindre le sommet de l'organigramme du club en jouant à chaque fois au sauveur. Il commencera dès lors en 2003 comme simple chauffeur de l'ancien président le Dr Messaoudi, histoire d'approcher de près l'entourage de l'équipe et se débrouillera pour faire en sorte qu'à chaque fois, il dépannera l'équipe — en mal de liquidités — pour telle ou telle achat ou mission. Personne ne se souciera de l'origine des sous, l'essentiel étant que le groupe des joueurs retrouve son confort, surtout en ce qui concerne les rémunérations de fin de mois. Mais toujours dans l'ombre en raison d'une lutte de leadership qui ne lui pas été jusque-là favorable mais surtout en raison des résultats décevants de l'équipe, en mal de titres. Pas facile de se prévaloir en fait d'une quelconque légitimité quand l'équipe se morfond au bas du classement, quand bien même vous êtes le véritable bailleur de fonds de l'équipe. Cependant, en 2006, avec la Coupe d'Algérie remportée contre l'USMA, Omar Ghrib commence à entrevoir la lumière. Pas encore les feux de la rampe, mais son nom circule déjà. En 2007, un peu plus avec la seconde Coupe d'Algérie toujours contre l'USMA mais son jour de gloire viendra en fait en mai 2010. Ce jour-là, le Mouloudia est sacré champion d'Algérie pour la 7e fois de son histoire après tant d'années de disette. Son nom est scandé dans les tribunes, Ghrib peut désormais se targuer d'avoir gagné un titre de champion en étant seul aux commandes du MCA. En 2010, il devient incontournable “Je pense que ce jour-là, il a officiellement assis son pouvoir au MCA. Il est devenu incontournable aux yeux des supporters du MCA, avides de titres mais pour nous qui sommes proches de l'équipe, nous savions déjà que Ghrib était le faiseur de tout au MCA. Quand vous avez une société, vous avez besoin d'argent pour la faire fonctionner. Et bien quand d'autres se dérobent, il était le seul à ramener des fonds au club. Il se débrouillait tout le temps pour régler des notes ou payer des joueurs. À l'intersaison, c'est lui qui s'occupait du recrutement. Il fallait avoir du liquide pour faire signer tel ou tel joueur. Vous pensez que Hachouid ou Metref, par exemple, auraient signé au MCA s'ils n'avaient pas empoché leur dû, du moins ce qu'ils exigeaient par anticipation et parfois même en monnaie étrangère ? En fait, Ghrib a une seule qualité ; la seule qui nous intéresse nous les supporters, l'argent, le reste c'est du blabla", témoigne un fan du MCA, très proche de l'équipe mais pas de Ghrib comme il tient à le préciser : “Je suis un fou fan du MCA mais un supporter de Ghrib mais force est d'avouer que le Mouloudia n'a trouvé que lui dans les moments difficiles. Cela est une réalité que personne ne peut nier." À ceux qui doutent de l'origine de cet argent et à ceux qui soutiennent que Ghrib ne fait qu'aggraver la dette du MCA, un autre supporter répond : “Ces gens auraient préféré peut-être que le MCA refuse l'argent soi-disant douteux de Ghrib pour ne pas avoir de dettes. C'est bien mais on aurait sans doute fait une croix sur nos ambitions à un moment où l'Etat nous a lâchés. On serait peut-être redescendu en D2 même. Alors moi je préfère l'argent de Ghrib et le titre de champion de 2010", dit il. “Souvenez-vous de Chelsea et le débat sur l'origine de l'argent de Roman Abramovitch." Et d'ajouter : “En tout cas cette dette colossale dont parlent certains n'a pas empêché Sonatrach de racheter le club." Un autre fan fera cette comparaison assez saisissante : “Souvenez-vous de Chelsea et le débat soulevé par l'origine de l'argent de Roman Abramovitch. On disait que le gars faisait dans le trafic d'armes et je ne sais quoi encore, mais, aujourd'hui, personne ne remet le sujet sur la table car tout simplement les fans sont contents des résultats de leur équipe, et c'est l'essentiel. Souvenez-vous aussi du transfert de Maradona à Naples, on disait que c'est la mafia qui l'avait financé mais une année après avec les exploits de Maradona, les fans de Naples sont passés à autre chose..." Mais une question s'impose : Ghrib qui a ramené de l'argent au MCA grâce à des prêts contactés chez des amis, dit-il, et effectivement inscrits au registre des dettes de la SSP-MCA, environ 8 milliards de centimes (l'argent de Ghrib), est-il assuré pour autant de les récupérer ? En l'absence de repreneur et l'échec des négociations avec notamment Loungar et Pellicano, Ghrib qui a tout fait vendre les actions du club, avait des soucis à se faire. Cependant, avec l'arrivée de Sonatrach, le problème est visiblement réglé. Ghrib va récupérer son dû et cela a été certainement une condition dans les discussions entre les deux parties. Il faut savoir à ce titre qu'au mois de Ramadan dernier, Sonatrach avait déjà commencé à négocier avec Ghrib en personne. Un haut cadre de l'entreprise pétrolière avait appelé sur le portable personnel de Ghrib pour faire la proposition. Il a été ensuite convié au siège de Sonatrach pour entamer les négociations. L'interlocuteur de Ghrib n'avait pas cessé de répéter que “ce sont les autorités qui ont décidé d'un tel rachat" et qu'il avait tout intérêt à faciliter l'opération. Ghrib ne s'en cache pas du reste. Lors d'une intervention sur la chaîne Ennahar TV, il déclara sans ambages : “Ce rachat est l'œuvre du président Bouteflika, que nous tenons à remercier. Le chef du gouvernement a donné son accord à travers une dérogation spéciale pour que Sonatrach qui est une entreprise publique nationale devienne propriétaire du MCA." Sonatrach a traité directement avec lui Ses propos vont corroborer ceux du président-directeur général de Sonatrach, M. Abdelhamid Zerguine. “Notre décision d'investir dans quatre clubs de l'élite est stratégique. Elle a été cautionnée par les autorités publiques du pays et vise à aider le football algérien à rebondir", a déclaré, M. Zerguine. Autrement dit MM. Zerguine et Ghrib ont scellé un accord décidé en haut lieu. Une fois son argent récupéré, Ghrib quittera-t-il le Mouloudia d'autant plus qu'il s'est engagé à vendre ses actions ? L'intéressé, toujours sur Ennahar TV, botte en touche et fait remarquer que la priorité pour l'heure est de voir le MCA retrouver sa santé financière à travers le bailleur de fonds, Sonatrach, mais il annoncé par là- même qu'il reste le coordinateur de la section football dans le directoire installé par Sonatrach et qui comprend sept membres dont quatre de la société pétrolière et trois du conseil d'administration du MCA. “Je pense pas que Sonatrach tentera de débusquer Ghrib après avoir racheté le club. Zerguine en aura toujours besoin car il veut avoir à la tête de l'équipe quelqu'un présent H24 avec le groupe. Une sorte de lien direct mais qui n'aura pas les coudées franches en matière d'argent. Un employé quoi !" S. L.