Le développement du gaz de schiste en Algérie fait face à plusieurs préjugés, estime l'ancien patron de la compagnie pétrolière nationale. L'ancien P-DG de Sonatrach s'est prononcé sur l'option gaz de schiste retenue par le gouvernement Sellal pour développer nos reserves hydrocarbures. Il avance différents arguments en faveur du dévelopement de ces ressources non conventionnelles. “Bien sûr qu'elle est intéressante et même nécessaire, parce qu'il s'agit aujourd'hui de préparer non pas la pérennité de la rente, mais l'indépendance énergétique du pays dans quelques décennies seulement (30 à 40 ans ?). Le monde entier est en train de travailler sur une transition énergétique vers de nouvelles ressources qui comprennent aussi les renouvelables (solaire, éolien et autres), et bien sûr un nouveau modèle de consommation basé sur l'économie d'énergie surtout. Les pays d'Amérique du Nord y travaillent depuis plus d'une décennie et ont réussi à le rendre techniquement exploitable même si pour le moment son coût d'exploitation demeure très élevé. Alors l'Algérie doit-elle attendre qu'il soit trop tard pour s'y intéresser ou au moins démarrer une approche technique que l'ancienne loi sur les hydrocarbures ne prévoyait pas ? Je pense qu'il était grand temps d'intégrer ce type de ressources dans la règlementation en vigueur. Quant à l'importance du potentiel de gaz de schiste, Abdelamadjid Attar l'estime au minimun à 2 500 milliards de mètres cubes, tout en situant les difficultés à extraire ces ressources. “Il ne faut pas croire non plus que l'exploitation de ce gaz de schiste va être facile et survenir dans 4 à 5 années car il faudra d'abord étudier et évaluer ce potentiel sur le plan quantitatif, en mesurer l'exploitabilité et la rentabilité commerciale. Pour cela il faut mener des études sur de grandes surfaces, faire quelques forages d'appréciation, des projets pilotes d'exploitation, des études d'impact sur l'environnement comme on en fait d'ailleurs actuellement pour toutes les autres activités pétrolières “conventionnelles". Et c'est au bout de cette période qui peut prendre 4 à 5 années qu'on pourra décider l'exploitation ou non. Le gaz de schiste n'est pas plus différent du gaz naturel actuellement produit, et c'est son mode de piégeage et d'exploitation qui n'est pas “conventionnel". Le schiste qui le renferme ou plutôt le piège qui le renferme n'est plus une structure du sous-sol qu'on a l'habitude de rechercher, mais une surface qui peut être immense et couvrir la majeure partie du Sahara au stade actuel des connaissances. Il s'agit en fait de la roche mère qui a déjà généré et expulsé (par migration) vers d'autres couches dites “réservoirs" l'essentiel des hydrocarbures conventionnels que nous exploitons aujourd'hui. Cette roche ou ce schiste renferme encore un volume résiduel de gaz ou d'huile impossible à produire, le schiste étant imperméable. Le pourcentage de présence de ces hydrocarbures résiduels dans le schiste est bien connu aujourd'hui dans toutes les régions où d'anciens forages existent, ayant permis de l'évaluer par carottage ou diagraphies. Si on considère ces données seulement et l'extension géographique des deux principales couches de schiste existant dans le sous-sol du Sahara (appelés silurien et frasnien), je peux vous dire que les volumes en place dans le sous-sol saharien sont tellement importants que je n'ai pas envie de donner un chiffre qui pourrait choquer certaines consciences. Mais sachant que la nature réserve aussi beaucoup de surprises et que dans de nombreux cas, même quand le gaz de schiste est bien dans le sous sol, on ne pourra jamais le produire pour plusieurs raisons techniques et commerciales. Je pense que les chiffres avancés récemment par la Sonatrach avec un minimum de 2500 milliards de m3 récupérables est raisonnable. Alors attendons quand même les résultats des premières évaluations en cours". Il reste donc un long chemin à faire pour que ces ressources soient exploitées. S. S.