Dix films, d'inégale valeur, ont été projetés, jeudi après-midi à la Cinémathèque, dans le cadre de la compétition des JCA, section des courts-métrages algériens. Le deuxième court-métrage du réalisateur de «Demain, Alger ?» était la plus belle surprise de la sélection. De tous les films projetés dans le cadre de la compétition court-métrage des JCA*, «Al-Djazira» (l'île) d'Amin Sidi-Boumédiène est résolument le meilleur, le plus intéressant, le plus éloquent sans doute, qui construit à la fois un propos thématique et un autre, esthétique. À un sens du cadre quasi-parfait, s'ajoute une belle manière de faire des plans (panoramiques), où le personnage est «perdu» dans l'immensité d'une ville, Alger. Un Alger vidé qui se réveille, qui s'offre à ses habitants, qui respire dans le silence. Une ville réinventée par la caméra et le regard d'Amin Sidi-Boumédiène. «Al-Djazira» c'est l'histoire d'un homme qui arrive de nulle part. D'où vient-il ? Pourquoi traverse-t-il cette ville ? On ne le saura qu'à la faveur de quelques messages subliminaux que le réalisateur glisse dans ses scènes. Réaliste ou surréaliste, là n'est pas la question. Le plus important est que le réalisateur nous entraine dans son univers fantaisiste. Amin Sidi-Boumédiène a remporté, jeudi soir à Abu Dhabi, la distinction du meilleur film arabe. Ses producteurs, Yacine Bouaziz et Fayçal Hammoum (Thala Films) ont décroché le prix du meilleur producteur du monde arabe. Une belle consécration en attendant, celle des JCA. Parmi les films qui ont fait l'unanimité aux JCA, «J'ai habité l'absence deux fois» de Drifa Meznner. Produit dans le cadre de Béjaia Doc, le court-métrage est une longue lettre qu'écrit Drifa (qui se met en scène) à son frère, qui a choisi le chemin de l'exil il y a une vingtaine d'années. Karim Sayad s'est intéressé à la passion d'un jeune homme de Sour El Ghozlane pour le personnage du héros berbère, Takfarinas. Touchant et émouvant, «Avancer l'arrière» suit un personnage attachant qui part à la recherche du tombeau de Takfarinas. Dans ses propos, parfois naïfs, dans ses gestes, on décèle un malaise de la jeunesse, qui continue de rire et de sourire, malgré les blocages, les difficultés, l'incompréhension et même la marginalisation. D'autres films ont été projetés jeudi aux JCA, notamment «le Hublot» d'Anis Djaad, prix du meilleur scénario de court lors des deuxièmes Journées cinématographiques d'Alger. Le film raconte le quotidien monotone et sans fantaisie de deux jeunes, qui n'ont qu'une terrasse d'un immeuble qui donne sur la mer pour s'évader. Même si les comédiens ont largement porté le film, ceci n'a pas suffi pour donner de l'épaisseur au propos, défaitiste et peu crédible. Le problème de «le Hublot» est que c'est un excellent texte, mais le passage de l'écrit à l'écran a été quelque peu chaotique. Le film revient également sur le désespoir de la jeunesse. La jeunesse algérienne est désespérée, c'est un fait. Faut-il traduire ce désespoir à chaque fois par la mort (!) est une question qui mérite aujourd'hui d'être posée. Mourir (et même mourir pour rien) devient une finalité, une solution facile même, et c'est bien dommage ! Mounia Meddour concourt également avec son court-métrage, «Edwidge», qui relate l'histoire d'une jeune femme, triste et solitaire. Son métier de femme de chambre ne lui apporte aucune satisfaction. Sa vie ne la convient pas, mais elle ne fait rien pour la changer jusqu'au jour où...un homme apparait dans sa vie. Un drame existentiel, qui traduit l'insatisfaction de l'homme d'aujourd'hui, et son incapacité à être heureux. Le jury présidé par Saïd Ould Khelifa a du pain sur la planche pour départager tout ce beau petit monde. Le résultat, ce soir à la clôture prévue pour 19 heures à la Cinémathèque. S.K * Liste des courts-métrages en compétition aux JCA : «Avancer l'arrière» de Karim Sayad, «Mollement un samedi matin» de Sofia Djama, «I miss you» de Fethi Bendida, «Green card» de Fethi Bendida, «J'ai habité l'absence deux fois» de Drifa Meznner, «Encre et le monde» de Sofiane Bellali, «Caractères» d'Ibtissem Deha, «Edwidge» de Mounia Meddour, «Le Hublot» d'Anis Djaad, «Al-Djazira» d'Amin Sidi-Boumédiène. Le film «la Gandoura blanche» d'Akram Zahgba n'a pas été projeté.