Résumé : Ma rencontre avec Youcef était différente des autres. Jusque-là, je ne le considérais que comme un coéquipier avec qui je devais sortir en reportage. Pourtant, nous avions des goûts en commun ! Lorsqu'il me demanda en mariage, je demeurais perplexe. Une autre à ma place aurait hurlé de bonheur, et sauté de joie. Mais moi à cette minute, je demeurais comme hypnotisée. Je tenais le combiné de téléphone dans ma main, et de l'autre je tentais d'atteindre quelques fines poussières qui s'étaient incrustées dans les touches du cadran. Le tic nerveux qu'on se découvre dans des moments de grande émotion. Je répondis hâtivement à Youcef que je devrais en premier lieu réfléchir. Oui c'était ça. Il faut bien réfléchir avant de franchir un si grand pas. Le mariage n'était pas un jeu. Je tentais de repousser encore un peu l'échéance. Mes parents. La famille. Enfin, tout ce monde que je côtoie quotidiennement avait aussi son mot à dire là-dessus. C'était bien sûr des banalités dépitées sur un ton hésitant. Une faiblesse de ma part. Mais je ne pouvais accepter sans un petit recul. Oui. On est comme ça, nous les femmes actives et intellect intellectuelles. Intellectuelle ? Je ne le suis pas à vrai dire. J'avais juste un petit bagage emprunté pour quelques destinations encore inconnues. Je ne pouvais donc répondre favorablement à Youcef sans avoir fait mes “comptes" et additionné mes aspirations ! Loin de s'offusquer Youcef se met à rire : -Je patienterai. Je suis très patient. Tu me connais bien. J'attendrai donc le temps qu'il te faudra pour te décider. Mais en mon for intérieur, je sais que tu te décideras. Hein ? N'est-ce pas ? Je te rappelle que nous nous connaissons comme aucun autre couple, non marié, ne s'était connu avant nous. Nous avons fait un long périple ensemble, et nous nous complétons mutuellement... Je pense que tu as tout simplement peur de t'engager. Autrement dit, tous les arguments que tu viens de brandir n'ont pas lieu d'être. Je ne pouvais le nier. J'avais peur de m'engager. Il avait trouvé la raison la plus plausible. Pourquoi donc ? Quelque chose en moi refusait de répondre... Je ne savais pas qu'au moment où je pensais que la vie commençait à me sourire, il suffisait d'une demande en mariage pour que mon cœur se mette à battre et mon cerveau à tourner dans le vide. Je raccrochais... Un vent s'engouffrait dans ma chambre par la fenêtre restée grande ouverte. Je n'osais même pas me lever pour la fermer. Quelques papiers sur mon bureau se dispersèrent. Je me remets à relire quelques notes récoltées lors d'une conférence et que je m'apprêtais à exploiter pour les besoins d'un article. Mais mon cerveau avait arrêté de penser. Je n'avais ni l'envie ni le courage de continuer. Je me lève pour fermer la fenêtre. Le vent continuait de secouer les branches des arbres, et le ciel devenait de plus en plus bas. On était au début de l'automne. Une saison qui évoque toujours pour moi le romantisme. Oui c'était ça. Je suis romantique. Idiote et sentimentale... Je ne sais plus. Que suis-je enfin ? Une femme qui recherche l'amour ou la sérénité ? Les deux peut-être. Sans le savoir, je devenais cette femme fragile et instable. Autrement pourquoi refuser le mariage ? Pourquoi refuser un homme tel que Youcef, qui attirait tous les regards féminins. Je n'étais pas jalouse, mais je savais que mes collègues femmes m'enviaient. Toutes voulaient Youcef. Toutes rêvaient de sortir avec lui, ne serait-ce qu'une fois. Oui. Elles le pensaient même tout haut. Je n'oublierai jamais leurs regards, leurs grimaces et leurs clin d'œil... Youcef représentait pour chacune d'elles un idéal.. Mais pour moi, l'idéal n'existait pas. Est-ce mon intuition féminine qui me mettait en garde contre l'avenir ? Que pouvait donc me cacher le futur ? Je tente de chasser ces idées et de repenser à la demande en mariage de mon collègue. Oui. Je crois que je pourrais être heureuse avec lui. Il était doux, attentionné, correct. Peut-être un peu trop ambitieux, mais cela ne gâchait rien. L'ambition mène toujours à bon port lorsqu'on sait l'entretenir. à suivre Y. H.