Résumé : Nazim est furieux à l'idée de perdre Nedjma. Il lui reproche de préférer le médecin, car ce dernier pourrait lui assurer le confort et la mettre à l'abri du besoin jusqu'à la fin de ses jours. Nedjma n'est pas de cet avis. Elle révèle au jeune homme qu'elle n'avait pas encore dit son dernier mot. Nedjma toussote : - Il y a quelques jours, le Dr Lyès m'a invitée comme à ses habitudes à prendre le thé dans son bureau. Il y a comme cela des jours, où j'aimais sa compagnie. Et cela ne veut pas dire que je suis séduite par cet homme. Non, détrompe-toi… Je le considérais comme un grand frère. Peut-être même un confident. Mais cette fois-ci, je le sentais un peu tendu, un peu préoccupé. Je savais qu'il souffrait de sa solitude et je tentais par quelques conseils ou plutôt par quelques mots apaisants de mettre un baume sur ses blessures. Il me surprit alors par sa proposition. Il voulait faire de moi, me dit-il, non seulement sa femme, mais une agréable compagne pour ses vieux jours. Je demeurais sans voix… Je suis restée interdite un instant, avant de reprendre mes esprits et de réaliser que je ne rêvais pas. Je lui expliquais alors que je n'avais aucunement l'intention de refaire ma vie de sitôt après tout ce que je venais de subir. Mais il me rabroua en faisant référence à notre relation. Il ira jusqu'à me reprocher de passer plus de temps avec toi qu'avec lui, et me dit que s'il ne tenait qu'à lui, il t'aurait gentiment renvoyé sans terminer son œuvre. Il avait un regard envieux et jaloux et, à un moment donné, je pensais qu'il allait m'agresser. Il se reprit à temps et se radoucit avant de me proposer de nouveau le mariage tout en me demandant de bien réfléchir. Lui pouvait m'assurer le Pérou, par contre avec toi, je n'aurais que des ennuis. Je rétorquais que je n'avais pas à réfléchir. Que lui n'était que mon médecin et que toi tu es un ami. Un ami à qui j'ai pu confier mes malheurs et qui avait amplement compris mes états d'âme, car lui-même avait vécu la même situation que la mienne ou presque. Furieux, il s'est levé en me menaçant… Il avait brandi son index vers mon visage, puis s'était ravisé à mi-chemin de sa colère pour ébaucher un rire mauvais et sournois. Celui qu'il allait détruire serait plutôt toi. Tu n'étais pas encore prêt à la dernière étape et il pouvait enlever les pansements et te massacrer le visage en faisant croire à un accident… Cela pouvait arriver, me précise t-il… Après tout, il n'était qu'un être humain et non un ange… Il n'était qu'un chirurgien exposé à toutes les erreurs du métier. Là je pris réellement peur… Ce grand monsieur, celui qui réalise des miracles, celui que nous prenions pour un génie ou un ange gardien n'était qu'un mesquin jaloux, envieux, perfide, sournois. L'argent pouvait le rendre puissant certes… Mais il ne pouvait acheter le sentiment. Je compris la profondeur de sa détresse. Je sentais son désarroi… Mais sa façon d'agir se rapprochait de celle d'un inculte, d'un bandit des grands chemins. En quelques minutes, l'image idyllique que j'avais de lui s'effrita devant mes yeux. Quelque chose se brisa en moi… Je revoyais la scène où je t'ai trouvé en train de sangloter sur ton lit. à ce moment précis, je compris l'intensité de ta détresse. Je savais que l'amour que tu me portais était profond et sincère. C'est depuis que j'ai aussi réalisé que, malgré moi, mes sentiments avaient évolué et que je tenais à toi plus qu'à quiconque. Certes, tu n'avais pas encore de visage, mais tu avais un cœur et des qualités que d'autres ne possèdent pas, à l'instar du Dr Lyès. J'ai fait croire à ce médecin que je prendrais le temps de réfléchir comme il me le proposait. Cela fait déjà plusieurs jours que je ne dors plus. Je ne fais que penser au moment crucial où le chirurgien va devoir trancher. J'étais malheureuse à l'idée de devoir te quitter, mais plus malheureuse encore à celle de t'imaginer défiguré à vie cette fois-ci. Des images hideuses se dressaient devant mes yeux… Des images où je te voyais sans nez, sans oreilles, sans joues. Arborant une tête de Quasimodo. Ce n'était pas que tu me faisais peur. Non ! C'était le fait que tu vas prendre mes sentiments envers toi pour de la pitié… Je n'en pouvais plus. Les quelques heures où je pouvais fermer l'œil, je faisais des cauchemars… (À suivre) Y. H.