D'abord, permettez-moi d'exprimer mes sincères condoléances, et celles de mon gouvernement à tous ceux qui ont perdu un proche à In Amenas. Mes pensées sont avec tous ceux qui ont été affectés par cette terrible tragédie. Comme l'a souligné le Premier ministre dans sa déclaration la semaine passée, nous devons reconnaître tout ce qu'ont fait les Algériens pour faire face à cette attaque épouvantable. Le Royaume-Uni comprend les difficultés auxquelles a été confrontée l'Algérie avec plus d'une trentaine de terroristes bien décidés à tuer des innocents dans un complexe industriel vaste, dangereux et éloigné de tout. Comme l'a mentionné le Premier ministre dans sa déclaration plutôt cette semaine, cela aurait constitué une mission des plus difficiles pour n'importe quelles forces de sécurité dans le monde, et nous devons reconnaître aux Algériens la détermination avec laquelle ils s'y sont engagés. Au-delà de tout cela, la responsabilité de ces morts incombe très clairement aux terroristes. La priorité principale de l'ambassade britannique au cours de ces derniers jours était d'apporter de l'appui aux ressortissants britanniques et à leurs familles qui ont été touchés par cette terrible tragédie à In Amenas. Nous avons travaillé jour et nuit avec les autorités algériennes, BP et avec tous nos collègues à Londres. C'était un énorme effort de coopération, et nous sommes reconnaissants envers les autorités algériennes de leur excellente coopération en permettant à nos experts consulaires et les équipes policières de travailler en étroite collaboration avec les experts algériens. Nos priorités immédiates ont été la sécurité des ressortissants britanniques sur place, I'évacuation des blessés et des otages libérés. Notre tâche primordiale, désormais, est de rapatrier les morts au Royaume-Uni. Une équipe internationale d'experts britanniques, américains et norvégiens entreprend actuellement, en étroite collaboration avec les autorités algériennes, le travail d'identification formelle des corps. Nous voulons que ce processus se fasse dans les meilleurs délais, mais il va imposer un travail intense de la part des spécialistes scientifiques et de la police, et pourra donc prendre un certain temps. Cette attaque met en relief la menace que les groupes terroristes posent aux pays et aux populations de cette région — ainsi qu'à nos ressortissants, nos entreprises et nos intérêts. Il y a quatre ans, c'est de la région de l'Afghanistan et du Pakistan que venait la menace principale de l'extrémisme islamique. Des efforts immenses ont été accomplis pour s'attaquer à cette menace et en réduire l'ampleur. Alors qu'à un certain moment, ce sont trois quarts des entreprises terroristes les plus sérieuses visant le Royaume-Uni qui avaient des liens avec cette région, aujourd'hui cette proportion a été réduite à moins de la moitié. Mais dans le même temps, des groupes affiliés à Al-Qaïda se sont développés au Yémen, en Somalie et dans certaines parties de l'Afrique du Nord et du Sahel. En Afrique du Nord et au Sahel, comme en Somalie, I'activité terroriste a été nourrie par les prises d'otages avec rançon ainsi que des activités criminelles de caractère plus général. Jusqu'à présent, c'est sur les Etats eux-mêmes qu'a pesé la menace terroriste, ainsi que sur les grands intérêts internationaux. Cette menace en constante évolution exige une réplique internationale. Il faut qu'elle soit tout à la fois très ferme, intelligente, patiente et qu'elle s'appuie sur de solides partenariats internationaux. Tout d'abord, nous devons être bien conscients que cette violence meurtrière appelle une réplique vigoureuse en matière de sécurité. Nous devons être réalistes et sans aucune illusion quant aux menaces auxquelles nous avons à faire face. Notre rôle consiste à soutenir les gouvernements de la région dans leur détermination à combattre cette menace, comme le font bon nombre d'entre eux et à grands frais. Nous allons donc collaborer étroitement avec le gouvernement algérien pour tirer les leçons de cette attaque, et approfondir notre coopération en matière de sécurité. Nous devons œuvrer à travers toute la région. Au Nigeria, nous allons maintenir notre partenariat étroit en matière de sécurité avec un gouvernement aux prises avec un terrorisme d'inspiration islamique. En Libye, nous allons continuer d'appuyer le nouveau gouvernement en rapport avec l'urgente priorité qu'est la mise en place de forces de sécurité renouvelées et efficaces. Et au Mali, nous allons collaborer avec les Maliens eux-mêmes, avec leurs voisins et nos alliés étrangers pour empêcher qu'un nouveau foyer terroriste se développe aux portes de l'Europe. Nous soutenons l'intervention française qui a eu lieu à la demande du gouvernement du Mali et nous faisons ce qu'il faut pour que des forces armées sous commandement africain soient en mesure — avec la formation et le soutien voulus — d'aider à assurer la stabilité à long terme du Mali. Ce soutien va comprendre notamment la Mission de formation de l'Union européenne dont sont convenus la semaine dernière à Bruxelles les ministres des Affaires étrangères de l'UE. En deuxième lieu, la réplique très ferme qui doit être la nôtre en matière de sécurité doit aller de pair avec une attitude intelligente en matière politique. Les groupes affiliés à Al-Qaïda prospèrent dans des milieux caractérisés par la faiblesse des institutions politiques, I'instabilité politique et l'incapacité à résoudre des revendications politiques de longue date. Il nous faut donc assortir notre vigoureuse réplique en matière de sécurité à une approche politique qui prenne en compte ces questions. Il nous faut appuyer des gouvernements à la souveraineté mieux affirmée et comptables de leurs actes, soutenir les citoyens qui veulent trouver un emploi et se faire entendre, et collaborer avec l'ONU et nos partenaires étrangers pour résoudre les conflits et sujets de mécontentement de longue date. Troisièmement, nous devons faire preuve de patience et de détermination. Avec nos partenaires dans la région, nous nous trouvons au cœur de la lutte de toute une génération contre une idéologie qui n'est qu'une déformation extrême de la foi islamique et qui soutient que les meurtres collectifs et la terreur sont non seulement acceptables, mais nécessaires. Nous devons nous attaquer à ce mode de pensée délétère, chez nous comme en dehors de nos frontières, et résister aux idéologues qui cherchent à diviser le monde dans un affrontement entre civilisations. Les conflits et tensions de fond qu'exploitent les terroristes sont, dans bien des cas, anciens et profonds. Mais cette approche patiente, intelligente et très ferme constitue le meilleur moyen de vaincre le terrorisme et d'assurer notre propre sécurité. Nous devons la poursuivre avec une volonté farouche. Le Royaume-Uni va saisir l'occasion de sa présidence du G8 pour nous assurer que ce problème du terrorisme, et la façon dont nous y répliquons, soit placé comme il se doit au tout premier rang de notre ordre du jour. En somme, nous devons contrer les terroristes avec notre dispositif de sécurité, nous devons les vaincre militairement, nous devons nous attaquer au discours délétère dont ils se nourrissent, nous devons fermer l'espace non gouverné où ils prospèrent à l'écart de tout gouvernement, et nous devons nous attaquer aux sujets de mécontentement dont ils se servent pour s'assurer des soutiens. C'est la tâche à laquelle notre génération doit faire face, et nous devons faire preuve de la même détermination et du même sens du devoir que les générations précédentes face aux grands défis qu'elles ont eu à affronter. Le Royaume-Uni considère l'Algérie comme étant un partenaire-clé dans la lutte contre le terrorisme. L'Algérie a un rôle primordial à jouer dans la région et le Royaume-Uni est déterminé à se tenir aux côtés de l'Algérie alors que nous relevons ces défis ensemble. M. R. * Ambassadeur britannique à Alger