L'Anglais est discret. C'est connu. Le Premier Ministre britannique, David Cameron, a eu la subtilité de débarquer à Alger en plein match de football de l'EN. Même si c'est le premier séjour d'un visiteur de ce rang depuis que l'Algérie est indépendante. Le Britannique a également du tact. Personne de ses prestigieux prédécesseurs, de Margaret Thatcher à Tony Blair en passant par John Major n'a pensé un jour aller visiter ce curieux pays qu'est l'Algérie, si proche et si lointain en même temps, que la majorité des Britanniques n'arriverait pas à situer sur la carte. Du côté de l'Algérien, cette indifférence est autant partagée que l'absence de bain de foule à son passage. Mais le British est aussi, et c'est connu, un indéfectible flegmatique. En débarquant en Algérie, 10 jours après In Amenas et une prise d'otages où Londres y a perdu quatre de ses ressortissants, David Cameron a mis au placard ses critiques contre Alger et l'assaut de l'armée pour aller s'incliner, sobrement, devant la stèle des Martyrs de la Révolution algérienne. Au pays de Sa Majesté, il est inadmissible de perdre son sang-froid et on sait se racheter. Mais au-delà des symboles et du timing, la visite de Cameron prend un autre sens avec la proximité de l'affaire de Tiguentourine où des intérêts britanniques ont été ciblés. Et pas des moindres. Chaque Premier Ministre qui passe au 10 Downing Street connaît les règles. Celle où British Petroleum est une institution aussi vénérée que le pudding et qu'il est du devoir des politiques de veiller sur BP comme on veillerait sur la reine mère. Le message de Londres est en soi assez clair : BP ne partira pas d'Algérie car son avenir énergétique, notamment dans le gaz de schiste, est seulement à 30 km du lieu de l'attaque. Si l'on y ajoute le fait qu'il ne faut pas froisser l'un des rares pays arabes et musulmans qui sait y faire face au terrorisme et qui ne transige jamais avec lui, une doctrine toujours appliquée par les Britanniques eux-mêmes, on comprend que Cameron va être aussi chaleureux que le thé de seize heures pour ne plus s'aliéner Alger. Car l'Anglais est un rusé. M B