L'opposition syrienne a annoncé hier qu'elle suspendait sa participation à plusieurs rencontres à l'étranger pour dénoncer “le silence international sur les crimes" commis par le régime, au lendemain de tirs meurtriers de missiles contre Alep. Dans le même temps, la Coalition de l'opposition a annoncé la prochaine création d'un gouvernement en zone rebelle qui, selon des experts, devrait lui permettre de rattraper son retard sur les groupes islamistes implantés sur le terrain et de pousser à l'action une communauté internationale récalcitrante. Le chef de la Coalition, Ahmed Moaz al-Khatib, a affirmé que le retrait de l'opposition des réunions internationales était “un message de protestation adressé à tous les gouvernements du monde qui voient comment le peuple syrien est en train d'être tué et ne font que regarder". Ce cri est lancé alors que le conflit, qui a fait plus de 70 000 morts, selon l'ONU, s'apprête à entrer dans sa troisième année, sans aucune issue en vue. Assimilant le “silence international" à “une participation à la tuerie", l'opposition a dit qu'elle allait suspendre sa participation à la prochaine réunion des Amis du peuple syrien, prévue le 28 février à Rome, de même que ses visites en Russie, allié du régime de Bachar al-Assad, et aux Etats-Unis. Elle a affirmé tenir en particulier les dirigeants russes “pour responsables éthiquement et politiquement, car ils continuent à soutenir le régime par les armes". M. Khatib était attendu dans les semaines à venir à Moscou. Il avait été invité à Washington par le sous-secrétaire d'Etat, William Burns, lors de la dernière réunion des Amis du peuple syrien, le 12 décembre. “Nous ne pouvons visiter aucun pays, s'il n'y a pas de décision claire concernant ce régime sauvage et barbare", a affirmé M. Khatib au Caire, en référence au régime de Damas. Londres a appelé l'opposition à reconsidérer sa décision, affirmant préparer “une nouvelle offre de soutien à la Coalition à Rome". Mais celle-ci dit ne plus vouloir “écouter des déclarations qui ne sont pas accompagnées d'actions", estimant que le monde avait la responsabilité de protéger les Syriens d'un “boucher", selon le porte-parole de la Coalition Walid al-Bounni, en référence au président Assad. “Si vous êtes nos vrais amis, aidez-nous à arrêter les massacres qui sont en train d'être commis contre notre peuple", a-t-il lancé. À plusieurs reprises, l'opposition a demandé à la communauté internationale de fournir des armes aux rebelles combattant le régime, mais M. Bounni n'a pas évoqué cette question de façon explicite. La Coalition, reconnue par plusieurs pays occidentaux comme le représentant légitime du peuple syrien, a par ailleurs annoncé son intention de former un gouvernement chargé de gérer les territoires rebelles. Elle se réunira le 2 mars à Istanbul (Turquie) pour décider de la composition de ce cabinet “provisoire" et choisir son chef. Souvent accusée d'être déconnectée du terrain, l'opposition “veut établir une présence en Syrie qui lui donnerait plus de crédibilité", commente Salman Shaikh, directeur du Brookings Doha Center. Sur le terrain, les violences ne montrent aucun signe de répit, faisant hier au moins 64 morts, dont 34 civils, à travers le pays, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).