Le parti Ennahda de Rached Ghannouchi renonce officiellement aux ministères-clés, à savoir celui de l'intérieur, des Affaires étrangères et de la Justice. C'est ce qu'a en tout cas confirmé, hier, le leader d'Ennahda, Rached Ghannouchi. Ce dernier a informé que ces trois ministères régaliens seront cédés à des indépendants, acceptant une revendication-clé de la classe politique et ouvrant la voie à la mise en place d'un nouveau gouvernement pour sortir le pays d'une profonde crise politique, économique et sociale sans précédent. “Nous confirmons la neutralisation des quatre ministères de souveraineté, le ministère de l'Intérieur y compris sera sous une personnalité hors des partis politiques", a-t-il déclaré. Visiblement Ennahda semble avoir appris la leçon pour lâcher ces trois ministères. Après le scandale dans lequel il s'est fourré son ministre des Affaires étrangères, Rafik Abdeslam, de s'être livré à “des parties fines avec sa copine" à l'hôtel Sheraton de Tunis aux frais de l'Etat. Ou encore Ali Laârayedh, ex-ministre de l'Intérieur, accusé par ses pairs de vouloir politiser l'institution policière, d'avoir était passif et responsable d'un sentiment réel d'insécurité sous son mandat. Bref, M. Ali Laârayedh, l'actuel Premier ministre qui était chargé de former son nouveau gouvernement en 15 jours depuis sa nomination, pourrait fort probablement l'annoncer d'ici la fin de la semaine. Après cela, il devra présenter son cabinet et son programme au président. Actuellement, Ennahda dirige les ministères de l'Intérieur, de la Justice et des Affaires étrangères. Alors quez celui de la Défense, il est contrôlé par un indépendant, Abdelkarim Zbidi, en fonction depuis janvier 2011 et la révolution, entre guillemets, qui a fait fuir le régime de Zine El Abidine Ben Ali. Après sa longue résistance, Ennahda cède ainsi à une revendication de la quasi-totalité de l'opposition et de ses partenaires laïques au gouvernement, Ettakatol et le Congrès pour la République (CPR) du président Moncef Marzouki. “Nous voyons que c'est dans l'intérêt de la Tunisie que le gouvernement, dans la période transitoire et pour la période à venir, réunisse les islamistes et les laïcs (...) même si nous sommes majoritaires", a précisé encore M. Ghannouchi. En théorie, avec 89 députés, Ennahda peut réunir assez facilement la majorité nécessaire de 109 élus sur 217 à l'Assemblée nationale constituante (ANC), mais il doit trouver un soutien bien plus large pour pouvoir prétendre à sortir la Tunisie de sa crise. Car si l'assassinat de Chokri Belaïd a fait imploser le gouvernement sortant, cela fait des mois que la vie politique est paralysée. La Constitution est dans l'impasse faute d'accord sur la nature du régime politique, bloquant l'organisation de nouvelles élections. Or, l'adoption de la Loi fondamentale nécessite une majorité des deux-tiers à l'ANC. La Tunisie est aussi confrontée à l'essor d'une mouvance salafiste violente, qui, selon les autorités, a assassiné Chokri Belaïd. I. O.