Pour ce comité, la décision des autorités d'empêcher ses militants associatifs de se rendre à Tunis vise à ne pas les laisser témoigner sur les violations des droits de l'Homme en Algérie. Le refoulement par la police, le 25 mars au poste frontière d'El-Ayoun (El-Tarf), de militants et syndicalistes algériens qui se rendaient à Tunis pour prendre part au 10e Forum social mondial (FSM) a soulevé un grand tollé auprès des ONG internationales (Human Right Watch, le Réseau euroméditerranéen des droits de l'Homme (Remdh), l'Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l'Homme, le programme conjoint de la Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme (Fidh) et de l'Organisation mondiale contre la torture (OMCT)... Joignant sa voix à ce concert d'indignations, le Comité international de soutien au syndicalisme autonome algérien (Cisa) s'est élevé contre “ces obstacles à la liberté de mouvement" qui, à ses yeux, “ne semblent viser qu'à empêcher les défenseurs susmentionnés de mener leurs activités de défense des droits de l'Homme". “Le pouvoir ne veut pas qu'ils témoignent de la situation des droits de l'Homme en Algérie au Forum social mondial de Tunis", a expliqué le Cisa, qui a appelé les autorités algériennes à “mettre un terme à toute forme de harcèlement à leur encontre". “Selon les informations reçues le 25 mars 2013 vers 4 heures du matin, deux bus de la délégation du Snapap, de la Laddh et du CNDDC sont arrivés au poste frontalier d'El-Ayoun à la frontière avec la Tunisie. Les 96 membres de la délégation ont alors remis leur passeport à la Police aux frontières (PAF), et ce n'est qu'à 9 heures du matin que leurs documents de voyage leur ont été restitués sans cachet d'approbation", a rappelé le Cisa, avant de préciser : “D'après certains policiers, une instruction serait venue ‘de très haut' pour interdire le passage des participants algériens en Tunisie". Ne se limitant pas à la dénonciation, le Cisa a envoyé une lettre de protestation aussi bien au président de la République, Abdelaziz Bouteflika, qu'à d'autres responsables algériens, à l'image du président de l'APN, Larbi Ould Khelifa, des ministres de l'Intérieur et de la Justice, respectivement Daho Ould Kablia et Mohamed Charfi, du représentant permanent de l'Algérie auprès de l'ONU, Boudjemaâ Dilmi, ou encore du président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'Homme (CNCPPDH), Farouk Ksentini. Dans sa missive, le Cisa demande aux autorités algériennes de “garantir en toutes circonstances l'intégrité physique et psychologique de l'ensemble des défenseurs des droits de l'Homme en Algérie" ainsi que de “mettre un terme à toute forme de harcèlement à l'encontre de tous les défenseurs des droits de l'Homme en Algérie, afin qu'ils puissent mener leurs activités de défense des droits de l'Homme librement et sans entrave". En somme, le comité invite le gouvernement algérien à “se conformer aux dispositions de la Déclaration universelle des droits de l'Homme et instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits de l'Homme ratifiés par l'Algérie". Autre action envisagée par le Cisa : la saisine des ambassadeurs d'Algérie en Europe. Le 26 mars, l'ONG Human Right Wach avait énergiquement dénoncé la décision des autorités algériennes d'empêcher les militants associatifs et syndicalistes algériens de se rendre en Tunisie qualifiée de “scandaleuse". “Il est scandaleux que les autorités algériennes interdisent à ces militants de se rendre en Tunisie pour assister au Forum social mondial", s'est exclamé le vice-président Moyen-Orient et Afrique du Nord de HRW, Eric Goldstein, qui ne s'est pas privé d'accuser les autorités algériennes d'entraver les activités “légitimes" de défense des droits humains. “Il est grand temps qu'elles (les autorités algériennes, ndlr) mettent fin à leur campagne de harcèlement et d'intimidation des partisans de la réforme, et d'observer leurs obligations en vertu du droit international", a-t-il affirmé. D'autre part, le Front des forces socialistes (FFS), dont une délégation est à Tunis où elle participe à ce forum, est monté au créneau pour dénoncer cette “nouvelle atteinte flagrante et inadmissible à la liberté de circulation". “À cet événement qui fait honneur au Maghreb, les autorités de notre pays se sont d'ores et déjà distinguées par une attitude d'un autre âge, en interdisant à des dizaines de jeunes Algériennes et Algériens de se joindre à ce ‘forum de la dignité'", a déploré le parti de Hocine Aït Ahmed. La veille, le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD) s'est, lui aussi, élevé contre cet arbitraire qui “aggrave l'isolement de l'Algérie sur la scène mondiale et humilie la nation". “Cette nouvelle violation du droit à la liberté de mouvement et ce ghetto imposé aux participants algériens à des rencontres internationales signent la constance d'un pouvoir aux abois et coupé des réalités du monde", a relevé la formation présidée par Mohcine Belabbas. A. C.