Résumé : Semra est morte d'inquiétude. Elle ne s'attendait pas à se retrouver sous le même toit que Rabah. Même s'il est vieux, il a encore toute sa tête. Il la reconnaîtra. Elle prie pour qu'il parte, car elle ne pourra pas passer le week-end, enfermée dans la chambre de Dalila. Celle-ci trouve son père en train de montrer les photos du mariage. Rabah lui parle de leur ressemblance. Il est convaincu de l'avoir déjà vue. Dalila souhaite son départ, car elle sent que cela finira mal s'il reste... -Pourquoi m'as-tu regardé ? Pourquoi, je devais me taire ? Dalila sourit à son mari tout en lui intimant de baisser la voix. - Chut ! Elle l'entraîne dans la chambre de ses parents. Elle lui doit une explication et elle ne peut pas lui mentir. Elle lui raconte sans donner trop de détails mais elle se tait quand il écarquille les yeux. Il n'en revient pas qu'elle lui ait laissé sa place. - Comment a-t-elle justifié son absence auprès de sa famille ? - Elle... Elle hésite à lui dire toute la vérité. Qui sait comment il réagira en apprenant que son amie intime est une enfant illégitime, retrouvée abandonnée à Sour El-Ghozlane. Elle ne peut pas lui dire qu'elle est une pupille de l'Etat. Même si c'est quelqu'un de bien qui a réussi sa vie, le regard des autres change. Les gens sont sans pitié. Dalila se demande que lui dire qui puisse ne pas soulever d'autres questions. Elle ne veut pas s'enfoncer dans d'autres mensonges même s'ils sont innocents. Elle soupire. - Comprends-moi ! Sa famille était dans la misère et elle voulait les aider. C'est pourquoi elle m'a remplacée à l'insu de tous ! Même papa n'est pas au courant ! - Tes parents auraient accepté de les aider. Pourquoi ne pas leur en avoir parlé ? l'interroge-t-il. - Comme ça... Ecoute, Semra a juste travaillé, empoché le salaire et filé avant qu'on ne découvre la supercherie ! S'il te plaît, le prie-t-elle. Cela doit rester entre nous ! Semra n'a rien fait de mal ! - Mais elle aurait pu le faire ! rétorque-t-il. - Elle a juste gagné le salaire à la sueur de son front ! J'espère qu'il va partir dès maintenant, car je ne peux pas la garder dans ma chambre tout le week-end ! dit-elle avant de soupirer. J'ai hâte de le voir partir ! Je vais aider maman... Promets-moi de ne rien dire à mes parents ! - T'inquiète ! Dalila lui envoie un baiser et file à la cuisine. Le cœur serré, il lui semble que le temps s'est arrêté, qu'ils mangent lentement, qu'ils parlent trop politique et sport. Ils devraient apprendre à manger silencieusement et plus vite. Elle se retient de crier de joie lorsqu'elle les entend sortir dans le couloir. Elles sortent de la cuisine pour dire au revoir à Rabah. Elle soupire de soulagement lorsque son père décide de le raccompagner à la gare routière. - Enfin, lâche-t-elle en allant trouver Semra qui se redresse à son entrée. Il a fini par partir ! J'ai cru que mon cœur allait s'arrêter ! Pourquoi est-il venu ce week-end ? - Tu es sûre qu'il est parti ? - Oui, sinon je serai mal ! Elles ont eu chaud toutes les deux. Quelques instants plus tard, Semra peut enfin quitter la chambre sans craindre de tomber sur l'ancien directeur, témoin direct de son histoire d'amour raté et de l'usurpation de l'identité de son amie. Elle respire mieux, et le reste de la journée se passe dans une ambiance chaleureuse. Les deux amies se retrouvent et passent la nuit ensemble. Elles peuvent enfin parler sans craindre d'être surprises. - Tu crois qu'il reviendra sur le sujet ? demande Semra. - Je ne sais pas... J'espère que ça ne va pas le travailler, dit Dalila. Car je suis autant impliquée que toi. J'avais menti à mes parents, à Noureddine... - Même s'il a des doutes, il ne pourra pas vérifier et cela remonte à des années, dit Semra qui se veut rassurante. J'ai changé depuis. Même si on se croisait, il ne me reconnaîtra pas ! Je suis sûre qu'on se fait du mauvais sang pour rien ! - Inch Allah ! Le lendemain, Semra rentre chez elle. Dalila et Noureddine retournent à Bouira. Quelques semaines plus tard, Dalila lui apprend qu'elle est enceinte. Elles s'appellent régulièrement mais ne se voient plus autant qu'avant. Semra est prise par son travail, et le week-end elle le consacre à sa maison. Elle aurait rendu visite à son amie si celle-ci avait son propre foyer. Elle ne voulait pas s'imposer auprès de sa belle-famille. Parfois, Dalila lui racontait les petites misères que lui faisait sa belle-mère. - La vie est ainsi faite ! Sinon tu vas t'ennuyer, dit Semra. Et comme ça, tu auras toujours quelque chose à me raconter ! Dis, tu n'aurais pas des secrets ? Dalila n'ose pas lui dire, mais en rangeant les albums de photos laissés chez ses parents, elle a remarqué qu'il en manque plusieurs. Elle a demandé à sa mère à qui elle les a donnés, mais celle-ci était tout aussi surprise. Son père aussi n'y avait pas touché. Il lui est venu à l'esprit que c'était peut-être son ami Rabah qui les avait pris. Cela faisait des mois depuis qu'il était parti. Il n'était pas revenu, et au téléphone, il n'avait plus parlé de “l'inconnue" qui avait usurpé son identité. C'était bon signe, pense-t-elle. Elle ignore pourquoi mais elle s'attend chaque jour à ce qu'il lui rendre visite. Pour l'interroger... (À suivre) A. K.