Le premier vice-président du Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD), M. Djamel Ferdjellah, a dressé, hier, un tableau peu reluisant quant à la situation des droits de l'Homme et des libertés publiques en Algérie. Cet ancien député du RCD s'exprimait dans le cadre d'une conférence inscrite au programme de l'université d'été des étudiants que son parti organise depuis lundi dernier, dans un camp de toile de Aokas, dans la wilaya de Béjaïa. Afin de mettre en évidence “le retard de l'Algérie” dans ce domaine, voire “la régression grave qui affecte les droits de l'Homme et les libertés”, notamment depuis le scrutin du 8 avril qu'il a qualifié de “mascarade”, l'orateur a préféré introduire sa communication par des rappels historiques retraçant l'évolution de cette notion dans le monde depuis la toute première “déclaration universelle des droits de l'Homme et du citoyen” dont avait accouché la Révolution française, le 26 août 1789, en passant par l'autre déclaration universelle qui date de 1948 et jusqu'à la création d'Amnesty International, en 1961, par l'avocat britannique Peter Benenson. M. Ferdjellah relève que l'importance de cette question n'a cessé de prendre de l'ampleur aux yeux de l'opinion internationale, jusqu'à devenir, aujourd'hui, “l'un des critères majeurs sur la base desquels on jauge la gouvernance des Etats”. “La notion des droits de l'Homme et des libertés, explique Djamel Ferdjellah, fonctionne aujourd'hui comme une sorte de ligne de démarcation entre deux types de régime : ceux qui reconnaissent les droits des citoyens dans les textes et dans les faits, d'une part, et ceux d'autre part, qui se donnent des lois conformes aux standards internationaux, mais qui, dans la pratique, répriment et entravent la promotion des droits citoyens et des libertés”. L'ancien député de Béjaïa n'a pas manqué d'arguments pour classer l'Algérie dans la seconde catégorie. “Notre pays a paraphé toutes les conventions internationales qui visent à la défense et à la promotion des droits de l'Homme, cela n'empêche pas le pouvoir d'incarcérer des journalistes injustement, ni de réprimer les syndicats autonomes, les militants politiques et les citoyens qui revendiquent leurs droits politiques ou sociaux”. “Cette répression est nettement plus visible, car plus féroce, depuis la mascarade électorale du 8 avril”, fait-il remarquer en imputant cet état de fait à “la personnalité” et au “parcours” de Abdelaziz Bouteflika à qui il reproche de “confondre régime présidentiel et royauté”. Et de citer, pour étayer son propos, les Etats-Unis d'Amérique où “le régime présidentiel fonctionne sous le contrôle du Congress”, alors qu'en Algérie, “le pouvoir législatif et le pouvoir judiciaire, bien qu'indépendants selon les textes, restent concentrés aux mains d'un seul homme, le chef de l'Etat”. Pourtant, considère M. Ferdjellah, “l'Algérie pouvait et peut encore aspirer à mieux, si l'on en juge par les acquis démocratiques arrachés grâce aux luttes de la génération d'après-guerre”. L'orateur s'emploie alors à retracer l'évolution des droits et libertés en Algérie qui se confond avec ces luttes. “Ces dernières ont été inaugurées dans la clandestinité par un groupe d'étudiants organisés dans le fameux Cercle culturel d'Alger au sein duquel se distinguait déjà un certain Saïd Sadi”, rappelle Djamel Ferdjellah. “C'est le même Saïd Sadi, rappelle-t-il encore, qui sera à l'origine de la création de la première section algérienne d'Amnesty International et de la première Ligue algérienne des droits de l'Homme, ce qui lui vaudra un procès à la cour de sûreté de l'Etat qui prévoyait des peines allant jusqu'à la condamnation à mort”. Ces luttes ont abouti au Printemps berbère, puis à “la révolte d'octobre qui a acculé le pouvoir à lâcher du lest en acceptant une ouverture au pluralisme politique et médiatique”. Qu'en est-il donc aujourd'hui ? La réponse de Djamel Ferdjellah est sans équivoque : “Le projet démocratique et républicain est dans une phase de résistance, et il n'a d'autre alternative que de s'atteler au combat. Notre espoir est grand quant à la victoire finale car la notion des droits de l'Homme et des libertés est, sans conteste, celle qui transcende le mieux les limites partisanes.” S. C.