Bien plus réussie que ses glorieuses précédentes de 1975, 1982, 1986 ou encore 1990, l'année 2014 du football algérien restera, dans les annales, comme celle qui a vu sa vitrine la plus exposée et l'équipe nationale réussir le plus grand exploit de sa riche et longue histoire : une qualification aux 1/8es de finale de la Coupe du monde. A la faveur d'une éclatante victoire aux dépens de la Corée du Sud (4-2) et d'un nul héroïque face à la Russie, les Verts de Vahid Halilhodzic se sont ouverts le chemin de la gloire, en dépit d'une première sortie ratée face à la Belgique qu'elle a, au final, accompagnée dans sa marche vers le deuxième tour. Il n'y avait qu'à voir l'océan de larmes qui avait coulé sur les joues algériennes au soir de la qualification à ce deuxième tour à l'issue d'une parité homérique face à la Russie pour mesurer l'impact d'une telle performance. Joueurs, sélectionneur, officiels, journalistes et public algériens étaient, ainsi, pris par l'émotion de voir le drapeau au croissant rouge sang se réserver une place parmi les étendards des seize meilleures équipes du globe, trente-deux ans après la fracassante entrée en matière de Gijon. Des moments forts, il y en a eu tellement au Brésil, comme pour rendre encore plus savoureux ce millésime 2014 ! Le plus poignant demeurera, sans conteste, ce Qassaman repris en chœur par les quelques sept mille supporters DZ à chaque sortie des Verts dans ce Mondial auriverde. A Belo-Horizonte, à Curitiba et par deux fois à Porto Alegre, l'émotion était à son comble au moment où l'hymne national était chanté. Des moments magiques que tous ceux qui les ont vécus, en live ou derrière leur petit écran, n'oublieront jamais. Comme ils n'oublieront jamais ces "Argelia ! Argelia !" ou le cri de cœur, repris en chœur par l'écrasante majorité du public brésilien du stade Beira-Rio de Porto Alegre en fin de rencontre de l'épique Allemagne-Algérie en 1/8es de finale. "Argelia ! Argelia !" Envoûtés par le fighting-spirit des Verts, conquis par leur combativité, séduits par leur solidarité à toute épreuve face à la mécanique allemande et se reconnaissant volontiers dans leur jeu tout en technique, les Brésiliens qui assistaient ce soir-là à l'une des plus belles empoignades de "leur" Mondial prirent alorsfait et cause pour les coéquipiers de Rafik Halliche. "Pour moi, c'est l'image qui m'a le plus marqué durant cette Coupe du monde" nous confiera, un peu plus tard en zone mixte, Aïssa Mandi. Cette communion collective doit, toutefois, énormément aux prouesses individuelles d'hommes-clés de cette EN estampillée DZ, à l'instar de l'indispensable Sofiane Feghouli, certainement l'un des meilleurs Algériens au Brésil. Pour avoir mis fin à une attente algérienne de vingt-huit ans en marquant le penalty face à la Belgique, pour avoir co-signé avec Brahimi l'un des chefs d'œuvres techniques de ce tournoi, pour son dévouement dans des tâches défensives bouffeuses d'énergie et pour tout ce qu'il a incarné tout au long du Mondial, Feghouli mérite amplement sa place dans le top-100 des meilleurs joueurs de l'histoire de la Coupe du monde, tel qu'établi par l'Equipe. A ses côtés, le Sétifien Djabou, lancé par Vahid Halilhodzic le 22 juin dernier face aux Sud-Coréens a, ce jour-là, ébloui le monde du football par sa vivacité balle au pied, sa technique et son sens du but. Avec des bribes de matches, l'éternel remplaçant sous l'ère Vahid a quand même scoré à deux reprises, égalant le record du mythique Assad et rejoignant son coéquipier Slimani comme meilleur buteur des Verts de cette Coupe du monde-2014. Un Slimani qui a réussi à multiplier sa valeur marchande par... 30 à la faveur de son bon mondial ! Un premier but plein d'audace et de sang-froid face à la Corée du Sud lorsqu'il a résisté au retour des défenseurs axiaux avant de tromper le gardien de près ; un autre encore plus important lorsqu'il s'éleva dans le ciel de Curitiba au-dessus de l'arrière-garde russe pour devancer le géant Akinfeev et offrir à l'Algérie une première qualification aux huitièmes de finale ; une passé décisive à Djabou face aux mêmes Sud-Coréens et, cerise sur le gâteau, élu deux fois "homme du match" par la FIFA. Homme de base de l'échiquier vert, Raïs M'bolhi aura, de son côté, été le vrai "Raïs" du navire algérien, qu'il a su maintenir à flot à force d'interventions déterminantes, de sorties rassurantes, de parades décisives et d'arrêts miraculeux. Assurément l'un des hommes forts des Verts au Mondial, Raïs a confirmé, dans les grandes occasions, qu'il était bien l'un des meilleurs portiers de la planète. Ce n'est, d'ailleurs, pas pour rien qu'un sondage de l'Equipe auquel ont participé plus de 230 000 lecteurs l'ont désigné à près de 65 % comme le gardien qui a le plus surpris par son niveau lors de cette Coupe du monde. Un tournoi planétaire réussi grâce, en grande partie, à un homme, le sélectionneur Vahid Halilhodzic, qui restera à jamais associé à cette qualification historique pour le deuxième tour. Intransigeant, têtu, arrogant, rancunier mais aussi tacticien, meneur d'hommes, émotif et touchant : Vahid est sorti grandi par le tournoi des Verts et notamment par cette prestation héroïque face aux Allemands qui lui a même valu une pétition sur le net appelant à son maintien à son poste de sélectionneur. Un appel populaire auquel est venu s'ajouter une prière présidentielle de continuer l'œuvre. En vain. Question de garder l'an de grâce 2014 encore plus singulier que ses autres devanciers. R. B.