Les accords de Minsk ne sont que de l'encre sur du papier au vu de la situation de guerre dans l'est de l'Ukraine, où le cessez-le-feu demeure impossible à faire respecter malgré les efforts et les menaces des pays occidentaux. La poursuite des combats dans l'est de l'Ukraine a tourné en dérision les dernières tentatives occidentales de parvenir à un cessez-le-feu, même si elle pourrait toutefois ouvrir la voie à une paix plus durable. C'est l'avis des analystes, qui estiment qu'il n'a pas fallu longtemps pour s'apercevoir que la trêve négociée par la France et l'Allemagne, signée la semaine dernière à Minsk, demeure inapplicable. Marquant à peine une pause, les rebelles pro-russes ont bombardé la ville stratégique de Debaltseve, contraignant l'armée ukrainienne à une humiliante retraite. Pour Ievgen Vorobiov, de l'Institut polonais des affaires internationales : "C'est le cas classique où l'enfer est pavé de bonnes intentions". Selon lui, "la chancelière allemande Angela Merkel a vu que la situation se détériorait rapidement et que les Etats-Unis parlaient de livrer des armes, et d'une escalade dans le conflit, et elle a senti qu'elle devait agir. Mais elle n'avait pas de plan B si le cessez-le-feu échouait, et elle n'avait rien pour le faire respecter, ni pouvoir militaire ni sanctions supplémentaires". Les pays occidentaux s'échinent depuis à trouver une réponse, et à l'issue d'une rencontre vendredi à Paris, Angela Merkel et le président français François Hollande se sont bornés à appeler une nouvelle fois au respect de la trêve. Pendant ce temps, le président russe, Vladimir Poutine, continue de démentir tout soutien direct aux rebelles, même si l'OTAN affirme catégoriquement que les forces spéciales, l'artillerie et les unités de défense aériennes russes sont toujours très actives en Ukraine. Mais plusieurs analystes estiment que la bataille pour Debaltseve était inéluctable, les rebelles voulant clairement plus de territoires et de ressources pour parvenir à un mini-Etat viable dans l'Est. Cette ville revêtait aussi une importance symbolique, après avoir été un élément clé de campagnes militaires aux XIXe et XXe siècles. La France et l'Allemagne pourraient avoir décidé d'accepter la chute de Debaltseve comme le prix à payer pour la paix, estime Jorg Forbrig, de l'institution américaine de politique publique German Marshall Fund of the United States. "Ils ne sont pas naïfs. Peut-être qu'ils pensent que maintenant que cette question est d'une certaine façon réglée, cela pourrait contribuer à un cessez-le-feu plus durable", décrypte-t-il. Reste à savoir maintenant si les rebelles vont vouloir d'autres territoires, et notamment, le port stratégique de Marioupol, sur la mer d'Azov. Mais Balazs Jarabik, de la Fondation Carnegie pour la paix internationale, estime que les séparatistes pourraient hésiter à attaquer une ville d'un million d'habitants à majorité russophone. "Plus l'avancée des rebelles est sanglante et plus cela donne raison à ceux qui disent que la Russie doit s'arrêter", souligne M. Jarabik. Ce dernier souligne que Poutine a déjà atteint ses principaux objectifs : il a pris la Crimée, il a un conflit gelé dans l'Est. Maintenant il doit faire cesser les combats pour que la pression internationale retombe. Il y a lieu de signaler que 179 soldats ukrainiens ont été tués en un mois dans la bataille de Debaltseve et 81 sont toujours portés disparus. "Du 18 janvier au 18 février, 179 soldats ont été tués, 110 ont été fait prisonniers et le sort de 81 soldats n'est pas encore éclairci", a annoncé hier Iouri Birioukov, un conseiller du président ukrainien, Petro Porochenko. M. T./Agences